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Circulaire de Business Mauritius sur la CSG : des mesures pour protéger la communauté des affaires

Le dialogue entre l’État et le secteur privé sur la Contribution sociale généralisée (CSG) n’a rien donné jusqu’ici. Cependant, Business Mauritius ne compte pas pour autant baisser les bras. La fédération patronale poursuivra les discussions et envisage d’autres mesures si le besoin se fait sentir.

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«Depuis la présentation du Budget et avec le soutien de nos membres partenaires, nous avons multiplié les demandes auprès des autorités concernées pour que l’entrée en vigueur de cette taxe soit reportée », explique Business Mauritius dans une circulaire envoyée à ses membres ce lundi 21 septembre. Si la fédération trouve « louable » la volonté de l’État d’enclencher une réforme de la pension, il y a, soutient la fédération patronale, « trop d’interrogations sur la validité et l’application de la CSG » comme le fait ressortir une équipe technique composée d’économistes, d’actuaires et des spécialistes des pensions. « Pour une question de gouvernance et dans l’intérêt du bien commun, il est essentiel d’avoir des consultations techniques approfondies sur la façon de réformer l’écosystème des pensions à Maurice », avance Business Mauritius. 

D’où l’insistance de la fédération patronale pour des consultations avec toutes les parties concernées - état, spécialistes des pensions, communauté des affaires, syndicats et société civile.  « Nous notons les bonnes volontés de part et d’autre, ainsi que le dialogue renouvelé de ces dernières semaines, mais qui n’a, malheureusement, pas encore abouti à une solution gagnante pour tous.  Nous allons continuer dans la voie du dialogue et prendrons d’autres mesures si nécessaire pour protéger la communauté des affaires et l’emploi, surtout dans le contexte exceptionnellement éprouvant dans lequel nous nous trouvons tous », fait ressortir Business Mauritius.  La fédération a conclu en évoquant sa « volonté ferme » de trouver la « meilleure solution possible pour les entreprises, et cela dans un esprit de collaboration nationale ».

Des actions légales envisagées 

Plusieurs personnes envisagent, à titre individuelle, d’avoir recours à des actions légales pour contester la CSG. « Au niveau des actuaires, nous n’envisageons, toutefois, pas des actions légales, mais notre invitation au gouvernement pour trouver de meilleures formules tient 
toujours », indique Bernard Yen. 

Les contributions repoussées jusqu’à novembre 

Normalement, avec l’entrée en vigueur de la CSG le 1er septembre, la contribution doit être déduite ce mois-ci et le paiement doit se faire le 31 octobre. Or, selon les provisions de la loi (Contribution sociale généralisée Regulations GN 214 de 2020), les contributions de septembre 2020 peuvent être repoussées jusqu’à novembre 2020. « Exceptionnellement, les entreprises pourront payer à la fin de novembre pour le premier mois. Cela n’aide pas beaucoup. C’est un changement assez brutal qu’on aurait dû éviter si le gouvernement s’était donné quelques mois de consultations pour améliorer la formule », avance l’actuaire Bernard Yen. 

  Contribution de l’employé  Contribution de l’employeur  
Rémunération jusqu’à Rs 50 000 par mois  1,5 % 3%
Rémunération au-delà de Rs 50 000 par mois  3% 6%

Les 4 inquiétudes de la communauté des affaires

La gouvernance 

« La CSG, qui est une taxe sur les salaires, remplacera le National Pensions Fund (NPF), qui est un régime contributif. Si le NPF a des lacunes, le fonds est géré selon un système tripartite par le gouvernement, les représentants des employés et des employeurs », explique Business Mauritius. Or, dans sa forme actuelle, déplore la fédération, la CSG sera collectée et gérée par les autorités uniquement, sans l’apport gestionnaire de ses partenaires sociaux.  

La pérennité

Autre point noir : contrairement au NPF qui perçoit des cotisations de contribuables pour financer leurs propres pensions, la CSG percevra des cotisations des employeurs et des employés actuels pour payer les retraités actuels. « Or, notre population vieillit et il y a de plus en plus de retraités pour de moins en moins de population active : que se passera-t-il quand il n’y aura plus assez de contributions provenant de la population active pour payer la pension de tous les retraités ?  Il n’y a, à ce jour, dans la loi qui a été votée, aucune visibilité quant à cette problématique », fait ressortir Business Mauritius. Ce texte ne contient pas de plan précis montrant comment le fonds de la CSG pourrait être investi et grandir. 

L’équité 

La CSG ne sera pas payable par tous les Mauriciens qui travaillent, comme c’est le cas pour le NPF, mais uniquement par les employés du secteur privé.  « Le gouvernement, donc indirectement tous les contribuables incluant ceux du secteur privé, vont payer la part des fonctionnaires », déplore Business Mauritius. . « Pour ceux prenant leur retraite après l’abolition du NPF, les bénéfices seront réduits puisque le fonds est programmé à disparaître dans le temps », explique Business Mauritius. Par ailleurs, les travailleurs et professionnels indépendants qui gagnent plus que Rs 10 000 ne verseront que Rs 150 par mois.  « Or, un employé d’une entreprise faisant le même travail, avec une rémunération de plus de Rs 10 000, devra quant à elle payer 3% de son salaire. Cette différence s’accentue pour les professionnels à hauts revenus qui seront assujettis à des régimes fiscaux distincts et des écarts de contribution significatifs », déplore la fédération. 

Le coût et l’impact sur l’emploi

« La taxe étant prélevée sur les salaires équivalents ou supérieurs à Rs 40 000, le CSG pénalise, pour ainsi dire, les entreprises qui paient mieux. Cela est, d’abord, contraire à la vision commune d’une économie à haut revenus et pénalisera, par la suite les entreprises dans des segments de services à valeur ajoutée, comme les Tics », fait ressortir BM. Étant donné que cette taxe est un coût supplémentaire pour les employeurs, la CSG pourrait aussi dissuader les entreprises de recruter, à un moment où il serait crucial de booster l’emploi. 

Amar Deerpalsing, président de la Fédération des PME : «Nous avons beau manifesté, mais le système est là» 

« L’employé et l’employeur contestent la CSG. Or, une tierce partie, à savoir les autorités, vient affirmer que la CSG est bien pour nous », martèle Amar Deerpalsing, président de la Fédération des PME. Il déplore que le gouvernement continue à camper sur sa position malgré les contestations. « Il y a même eu une manifestation (Ndlr : le Kolektif Konversasyon Solider avait organisé le 11 juillet dernier une manifestation pour déplorer plusieurs actions du gouvernement dont l’abolition du NPF par la CSG). Nous avons beau manifesté, mais le système est là. Même les professionnels, notamment les actuaires viennent dire que ce système n’est pas soutenable. Or, le gouvernement ne veut pas entendre raison et persiste dans cette voie », fulmine Amar Deerpalsing pour qui la CSG est une taxe pure et simple et non un fonds de pension. 

Bernard Yen, actuaire : «Une véritable discrimination entre les jeunes et les personnes âgées»

Bernard Yen est catégorique. Avec la CSG, trois catégories d’employés sont victimes de discrimination, voire d’injustice.  D’abord, il y a la discrimination entre le secteur privé et le secteur public (Ndlr : si le secteur privé devra contribuer pour la CSG, c’est l’État qui le fera pour les fonctionnaires). Deuxièmement, celle entre le secteur privé formel et l’informel (Ndlr : les travailleurs indépendants ne paieront que Rs 150). Tertio, la discrimination entre les jeunes et les personnes âgées. « C’est le plus grave à mon avis. Le jeune qui débutera sa carrière n’auras pas le NPF, mais seulement la CSG alors qu’avec le NPF il aurait eu une pension supérieure à sa retraite. Or, une personne âgée aura sa pension de vieillesse, le NPF, la CSG et le plan de pension de son employeur si elle en bénéficie. Pourtant, elle n’aura rien contribué pour avoir cette pension additionnelle », déplore Bernard Yen. 

Maya Sewnath : «Risque-t-on des pénalités si on n’arrive pas à appliquer la CSG ?» 

La directrice de SSS Furniture dit être toujours dans le flou. « Nous avons fait une demande auprès des autorités pour avoir plus d’explications sur le concept de CSG mais on reste toujours sur notre faim. Il faut qu’il y ait un débat ouvert au niveau national pour adresser les nombreuses questions des entrepreneurs », soutient Maya Sewnath qui compte environ 40 employés. Au niveau de l’application de la mesure, elle avance que son comptable fera le nécessaire. « Mais, personnellement, j’ai des craintes sur ce sujet. Par exemple, si on ne calcule pas le montant de la CSG et l’appliquer comme il le faut, est-ce qu’on aura des pénalités à payer ? Est-ce qu’il y aura des campagnes de sensibilisation dédiées aux entreprises jusqu’à ce que nous comprenions cette nouvelle formule », demande-t-elle. Cependant, elle confie qu’elle a appris que pour les employeurs, le coût pour le paiement de la pension sera moindre. « Mais, cela reste à voir. On le saura à la fin du mois », dit-elle. 

Vinay Kanhye : «C’est une mesure qui est un peu difficile à comprendre»

Vinay Kanhye, directeur de V. K. Health Foods, compagnie qui exporte du moringa, souligne que le remplacement de la cotisation au National Pensions Fund (NPF) par la ‘Contribution Sociale Généralisée’ (CSG), est « un peu difficile à comprendre ». « Le fonds est contributif. De ce fait, c’est difficile pour moi de me prononcer sur les coûts pour l’entreprise. Dans la conjoncture actuelle, on ne sait pas si ce nouveau système qui vient abolir le National Pensions Fund va garantir une meilleure contribution pour les PME », se demande-t-il. 

Jervin Seebarrun : «Le montant que je verserai pour la CSG sera inférieur à celui du NPF»

« Personnellement je n’ai toujours pas compris la différence entre le NPF et la CSG. Il y un manque d’explications sur l’application de cette nouvelle formule », exprime Jervin Seebarrun, directeur de J&J Group Ltd Contracting and Renovation Works, qui compte plus d’une cinquantaine d’employés. Il avance qu’il a laissé cette tâche entre les mains de son comptable. Par ailleurs, dit-il, le montant du paiement de la contribution de pension va changer non seulement en raison de la nouvelle formule mais aussi en raison d’une baisse dans le nombre d’employés. « Avant le confinement, je versais chaque mois Rs 70 000 pour le NPF, mais les conséquences de la Covid-19 ont tout changé. J’ai très peu de Mauriciens qui travaillent avec moi actuellement. La majorité sont des Bangladeshis. Et de ce que j’ai compris, les travailleurs étrangers ne sont pas éligibles pour la CSG. Du coup, le montant que je vais verser à la Mauritius Revenue Authority sera inférieur à celui du NPF », dit-il. 

Jayesh Ajwani : «Nous avons une équipe administrative qui travaille dessus»

Jayesh Ajwani, Chairman de Virgin Oil Company (Mauritius) Ltd, est catégorique. « Nous avons des Mauriciens et des étrangers qui travaillent chez nous. Si cette nouvelle mesure est pour leur amélioration, nous serons heureux de contribuer à la Contribution sociale généralisée. Comme cette mesure est déjà en vigueur depuis le 1er septembre pour tous les employés et employeurs, nous avons une équipe administrative qui travaille dessus, mais c’est difficile d’évaluer les coûts additionnels à ce stade ». « Dans ce contexte difficile, nous devons tous contribuer à remettre l’économie du pays sur les rails », a-t-il conclut.

 

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