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Centres de jeunesse : la relance est enclenchée

Formation, information, loisirs et sports. Ce sont les quatre axes principaux autour desquels s’articulent les activités des centres de jeunesse de l’île.

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Lancé dans les années 80, le concept qui a fait ses preuves, nécessite aujourd’hui un lifting pour trouver un second souffle.

Mardi 22 août, 17h45 au centre de jeunesse de Bambous. Une salle comble d’hommes et de femmes, tous âges et toutes origines confondus, s’apprêtent à accueillir le ministre de la Jeunesse et des sports. Il s’agit d’une réunion organisée par le ministère dans le sillage de sa campagne Ki mo kapav fer pou mo kartie.

Camping dans le cadre du National Youth Award.

Un évènement pour cette localité de l’Ouest qui n’a pas vu de ministre «  depuis l’inauguration du centre de jeunesse, il y a des années », comme le souligne Bleck Lindor, un jeune actif de Bambous. Alors qu’il se chuchote que le ministre, « fidèle aux habitudes locales » arrivera en retard, Stephan Toussaint se pointe avec dix minutes d’avance. Après un rapide tour de l’établissement pour un constat de l’état des infrastructures, il rejoint les habitants dans la salle.

Formation des jeunes en « lifeskills ».

D’emblée, il explique l’objectif de sa visite : faire revivre les centres de jeunesse. Dans ce contexte, Stephan Toussaint effectue actuellement une tournée des 29 centres du pays. « L’idée, c’est d’aller à la rencontre des jeunes et de les écouter pour connaître leurs réalités, leurs besoins, leurs aspirations et leurs attentes, souligne-t-il. Je ne viens pas vous faire des promesses, je ne prétends pas apporter des solutions immédiates ou faire des miracles.

Je suis là pour vous écouter afin de dégager, par la suite, un plan d’action adapté à votre région, vos attentes et vos besoins. » Chaque région ayant sa spécificité et son mode de vie, le ministre estime qu’on ne peut plus imposer un seul et même programme pour tous.

Célébration de la fête nationale par la West Civic Association.

Ces précisions apportées, la parole est à l’assistance. Il n’y a pas moins d’une vingtaine d’interventions de jeunes et de moins jeunes. Peer educator, coach sportif, travailleur social, dirigeant de club de jeunes, formateur. Pendant plus de deux heures, tous font part de leurs doléances et de leurs propositions pour un meilleur encadrement des jeunes de la région. La rencontre à Bambous, comme dans toutes les autres localités, prend fin sur une proposition concrète du ministre Toussaint. Soit la mise sur pied d’un comité de gestion autonome, constitué de représentants des jeunes de Bambous et ses environs, des forces vives et des Youth Officers du ministère pour gérer le centre de jeunesse.

La proposition est aussitôt acceptée. Ce comité sera donc chargé d’élaborer des projets, selon les besoins des habitants. Il fera aussi le lien entre le ministère et les habitants pour la réalisation de ces projets. Voilà qui répond à la majorité des demandes énoncées lors de la discussion : un soutien plus efficace et plus approprié du ministère, l’extension des heures d’ouverture, l’aménagement de desks supplémentaires pour des besoins spécifiques, des organisations régulières de manifestations sportives, éducatives, artistiques et culturelles.


Les objectifs

Les 29 centres de jeunesse offrent des opportunités de développement mental, physique et moral aux Mauriciens âgés entre 14 et 35 ans. Les objectifs de ces centres, qui abritent également des structures appropriées pour des activités sportives et sociales, sont :

  • Informer et conseiller les jeunes
  • Organiser des programmes de formation axés sur l’environnement et la santé
  • Favoriser l’initiative et inculquer le sens de responsabilité chez les jeunes
  • Intégrer les jeunes dans l’élaboration et la mise en œuvre de programmes pour leurs semblables
  • Améliorer la croissance saine et le développement des jeunes
  • Promouvoir les activités littéraires, sportives, culturelles, récréatives et sociales
  • Offrir aux jeunes la possibilité de faire bon usage de leur temps de loisir
  • Promouvoir des échanges et partages entre les jeunes de différentes régions et cultures afin de mieux se connaître, se comprendre et apprendre à vivre en communauté
  • Offrir des services de conseil aux jeunes afin qu’ils puissent mieux comprendre leurs problèmes et trouver les solutions nécessaires
  • Promouvoir les valeurs morales et spirituelles dans le but d’éveiller la conscience civique et le patriotisme chez les jeunes
  • Développer les talents et les potentiels cachés des jeunes

Pépinière de jeunes talents - Bleck Lindor : « C’est une source et c’est au jeune d’y puiser »

Bleck Lindor initie les jeunes à la musique.

Il a fait briller le quadricolore mauricien à l’international. Bleck Lindor, 27 ans, a remporté en 2014 le premier prix dans la catégorie Art and Design du Youth Excellence Award en Suisse. « Pour moi, tout a commencé au Centre de jeunesse de Bambous », confie fièrement le jeune homme. En effet, Bleck découvre sa voie lors d’un passage du sculpteur Lewis Dick au centre, il y a plus de dix ans.

Il est alors en plein questionnement sur son avenir car il est marginalisé par les institutions conventionnelles de formation à cause de ses dreadlocks. Il décide alors de rejoindre l’école de formation du sculpteur de Bambous. Aujourd’hui, il pratique et enseigne la sculpture, la peinture et la musique aux jeunes. Il a même une école de formation au centre de jeunesse de Bambous. C’est avec reconnaissance que l’artiste jette un regard dans le rétroviseur.

Le sculpteur Bleck Lindor à l’oeuvre.

« Le centre m’a permis de découvrir et d’apprendre beaucoup de choses à travers le programme Spécial Vacances, le Youth Achievement Award et des formations en leadership. En fait, le centre de jeunesse est une source de découverte et de connaissance. Faut-il encore que le jeune vienne y puiser. »

Stephan Toussaint : « Un seul et même programme pour tous ne fonctionne plus »

Trente ans après le lancement du premier centre de jeunesse, quel est votre constat de sa forme actuelle  ?
C’est clair que l’offre ne répond plus totalement à la demande. Les aspirations d’un jeune d’aujourd’hui ne sont plus celles des années 90. Auparavant, avec une simple table de carom, tout le monde était content. Aujourd’hui, ce n’est plus le cas. Le jeune demande plus d’encadrement et de conseils.

D’ailleurs, j’ai été agréablement surpris face à la demande de nombreux jeunes pour des formations en leadership, premier secours, etc, bref, des formations à la vie. Le plus important, c’est que les besoins des jeunes de Bambous ne sont pas les mêmes que ceux de Mahébourg, Curepipe ou Triolet. D’où ma démarche d’amener chaque région à proposer ses propres projets pour son centre de jeunesse. Un seul et même programme pour tous ne fonctionne plus. 

Certes, chaque jeune a ses propres aspirations mais de manière générale, que recherchent-ils ?
Aujourd’hui, le jeune aspire surtout à un bon emploi sécurisé. La preuve : pendant nos descentes dans les différents quartiers, ils sont nombreux à demander des services-conseils relatifs à l’employabilité. Comment rédiger une lettre de motivation, un CV, passer un entretien, adopter les bonnes attitudes… Je trouve ça formidable ! C’est un projet qui peut être valable pour tous les centres de jeunesse. Les plus sportifs réclament bien évidemment le renouvellement des équipements existants et la construction ou le rehaussement des infrastructures telles que les terrains de foot, basket et volley, entre autres.

On aura beau proposer le programme le plus complet aux jeunes, il y a ceux qui ne délaisseront pas leurs consoles et autres écrans pour autant. Vous avez un plan pour ceux-là ?
Je ne veux pas vendre la peau de l’ours avant de l’avoir tué. Mais je peux d’ores et déjà vous dire que nous travaillons sur une formule pour attirer ces mordus de technologie. Elle sera mise en œuvre dans les 29 centres existants et le 30e, flambant neuf, qui sera bientôt inauguré à la Cité La Cure.

La parole aux jeunes

Danny Appadu : « Il faut absolument revoir le fonctionnement du centre »
Danny Appadu est animateur au ministère de la Jeunesse et des Sports depuis plus de dix ans. « Ce n’est pas logique d’avoir un centre qui n’ouvre qu’aux heures de bureau alors que c’est après que les gens en ont besoin.  » Il demande donc que le centre reste ouvert après 18 heures pour mieux répondre aux besoins de détente des habitants. Idem en week-end : le centre est fermé de samedi midi au lundi matin. « Il faut absolument revoir ce fonctionnement. Avec notre rythme de vie, qu’on soit étudiant ou employé, ce n’est que pendant le week-end que nous avons un peu de temps libre avec nos copains du villages. D’autant plus qu’ici, il n’y à rien d’autre comme distraction. »

Brigitte Paya : « Un ‘counselling corner’ est nécessaire »
Peer educator, formée par le ministère, Brigitte Paya accompagne les jeunes de la région pour une croissance saine. « Nous rencontrons souvent des jeunes à problèmes qui souhaitent se confier à nous.  Sauf que nous n’avons pas un endroit approprié pour les accueillir et les écouter. Comme nos sessions de formation se font avec une vingtaine de jeunes à la fois, il est difficile d’accorder à chacun une attention particulière », déplore Brigitte. Elle préconise donc l’installation d’un counselling corner au centre de jeunesse. « Un service permanent à l’abri des regards et en toute discrétion. C’est le seul moyen pour éviter que ces jeunes ne se tournent vers des personnes qui risquent d’être de mauvais conseil. »

Sunaina Joypaul : « Le soutien du ministère doit être adapté à nos besoins »
Présidente de la West Civic Association, Sunaina organise régulièrement des sorties éducatives, des trails, des compétitions et aussi des journées de team building. Parmi ses activités, qui se déroulent normalement les dimanches, certaines nécessitent l’utilisation du centre. « Le souci, c’est que le centre est fermé les dimanches. Pour avoir accès, nous devons payer les services d’un planton de notre poche, soit Rs 500 à Rs 1 000. » Elle appelle ainsi les responsables à être flexibles quant aux heures d’ouverture du centre. Elle réclame également un soutien plus adapté du ministère. « Quand on demande dix médailles, on n’en reçoit que cinq. Nous nous retrouvons alors dans une situation embarrassante face aux participants auxquels on avait promis plus de récompenses. »

 

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