Interview

Cardiopathie des enfants - Dr Deshmukh Reebye: «Les maladies cardiaques peuvent être évitées»

Le Dr Deshmukh Reebye (en médaillon)
1 % des enfants qui naissent à Maurice peuvent être atteint d’une malformation congénitale cardiaque. Zoom sur la cardiopathie des enfants avec le cardiologue interventionnel Dr Deshmukh Santosh Reebye. Combien d’enfants souffrent de maladies cardiaques ? La fréquence se situe autour de huit sur mille enfants nés vivants de par le monde. La maladie congénitale cardiaque est un phénomène mondial. Il y a des cas à la naissance qui sont très sérieux et d’autres qui sont routiniers et n’ont pas de détresses. C’est à la suite des examens et des consultations qu’on découvre qu’il y a une anomalie.
Voulez-vous dire qu’on ne peut pas détecter un problème cardiaque avant la naissance ? En effet. Il y a une science qui n’est pas très développée à Maurice, c’est l’échocardiographie fœtale qui permet de déceler des maladies graves dans le fœtus. L’écoute du battement de cœur du fœtus par le gynécologue n’est pas suffisante. On fait cela par exemple dans une famille où il y a eu des naissances avec des malformations. Cela permet à la femme enceinte de savoir à quoi s’attendre. Deuxièmement, s’il y a des maladies très graves du fœtus, l’accouchement doit se faire dans un centre spécialisé où il y aura recours à une prise en charge cardiologique immédiatement.
[blockquote]« Grâce à la vaccination des filles avant la puberté, la malformation due à la rubéole a pu être éliminée »[/blockquote]
Quelles sont les cardiopathies les plus courantes ? Ce sont des trous dans le cœur, un canal artériel persistant, des anomalies des valves cardiaques ou des anomalies de l’aorte. Parfois, il y a des lésions beaucoup plus sévères comme la non-formation d’une partie du cœur, l’absence d’une valve ou des grosses artères. Les malformations congénitales sont les plus fréquentes. Quelles sont les causes de ces troubles cardiaques ? Il n’y a pas de causes dans la majorité des cas. C’est plurifactoriel et on n’est pas encore arrivé à les déterminer. Cela ne veut pas dire qu’une femme enceinte ne doit pas prendre des précautions. Elle ne doit pas fumer ni prendre des boissons alcoolisées ni des médicaments sans avis médical. Il y a eu parfois des malformations à cause de ces facteurs. Il y a aussi eu des infections que la mère ne peut empêcher comme ce qui se passe au Brésil avec le Zika qui a provoqué la malformation du cerveau (microcéphalie) chez les nouveau-nés. Grâce à la vaccination des filles avant la puberté, la malformation due à la rubéole a pu être éliminée. Il y a aussi des maladies qui ne sont pas congénitales, mais qui sont dues à des inflammations chroniques. Par exemple, le lupus, la polyarthrite rhumatoïde. Vous avez parlé de la cigarette, de l’alcool et de la prise de médicaments comme facteurs de risque pour une malformation, est-ce qu’il y en a d’autres ? Dans une famille où il y a un antécédent de maladie congénitale cardiaque le risque est légèrement plus élevé pour le deuxième ou troisième enfant. Il y a une incidence accrue cela indépendamment des problèmes cardiaques des parents. Peuvent-elles être évitées ? Beaucoup de maladies cardiaques peuvent être évitées à travers la prévention primaire : une bonne alimentation et de l’exercice physique. Un enfant est un adulte potentiel. Il faut lui donner de bonnes habitudes et cela commence très tôt dans la vie. Quelles sont les incidences que cela peut avoir sur la vie du malade si une cardiopathie n’est pas traitée comme il se doit ? Heureusement que ce sont des cas qui sont tolérés jusqu’à la croissance et même jusqu’à l’âge adulte. Mais il y a des cas où on doit intervenir soit tout de suite après la naissance, ou dans un bref délai. Par exemple, dans des cas de la transposition des grosses artères sans connexions, afin de permettre au sang de se mélanger. S’il n’y a pas de connexions, on doit la créer à travers une sonde spéciale. Cela permet la survie du bébé jusqu’à ce qu’on fasse la chirurgie requise. Une valve très serrée qu’on peut dilater, soit à la naissance ou dans les jours qui suivent à travers le cathétérisme cardiaque. Il y a des maladies qui sont asymptomatiques. L’enfant grandit avec un très petit trou dans le cœur. Cela ne va pas influencer sa croissance ni ses activités physiques. Il y a souvent ce genre de situation qu’on peut laisser tranquille, c’est-à-dire qu’on n’intervient pas. Souvent, on le découvre quand on fait des examens médicaux dans les écoles comme un souffle qui n’était pas présent à la naissance et qui se manifeste quelques mois ou quelques années après lors d’un examen. Seule une échocardiographie peut déterminer de quoi il s’agit exactement. Parfois, il peut s’agir d’un souffle innocent, mais parfois cela peut être pathologique avec le rétrécissement de l’aorte ou la sténose d’une valve qui devient de plus en plus serrée. Cela nécessite une intervention qui se fait en interventionnel. Est-ce que nous disposons de toutes les facilités requises pour traiter tout type de problème cardiaque chez les enfants ? Oui, mais il y a des maladies complexes qui nécessitent une chirurgie itérative. Souvent on ne corrige pas les défauts, mais c’est un traitement palliatif pour permettre la survie. Par exemple, la maladie bleue due à une absence de valve, le premier geste à faire c’est un shunt palliatif à travers la chirurgie pour apporter du sang au poumon à travers une petite opération. Est-ce qu’un enfant atteint d’une cardiopathie peut espérer vivre normalement ? Avec des lésions minimes, un enfant peut pratiquer du sport et il n’y a pas de répercussions sur la santé de l’enfant ou de l’adulte. Quel est le pourcentage d’enfants qui souffrent de cardiopathie ? Sur les plus de 12 000 naissances que nous avons à Maurice, 1 % peut être atteint d’une maladie congénitale cardiaque. Parmi eux, 5 % des cas peuvent être considérés comme graves. Dans la majorité des cas, ils arrivent à l’âge adulte. Ils doivent cependant prendre des précautions surtout quand ils vont chez le dentiste. Ils doivent avoir une bonne hygiène bucco-dentaire, car il y a des bactéries qui viennent des dents qui ne sont pas saines et qui peuvent affecter leur cœur. Est-ce qu’un examen routinier du cœur doit être effectué également ? On devrait faire des examens chez les enfants à haut risque comme ceux qui sont obèses ou qui sont issus de famille à très haut risque, c’est-à-dire dans des cas où il a eu des morts subites. Ils doivent faire un examen cardiaque au moins une fois à l’adolescence.
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