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Cardinal Maurice E. Piat sur Radio Plus : « Nous avons les politiciens que nous méritons »

Selon Mgr Maurice Piat, certains devraient cesser de réclamer des faveurs aux politiciens en leur faisant croire qu’ils ne voteront pas pour eux dans le cas contraire. Le cardinal intervenait au Grand Journal de Radio Plus.

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Le nouveau cardinal Maurice E. Piat a exprimé son aversion pour la proximité entre des organisations socioreligieuses et la politique. Il intervenait à l’émission du Grand journal de Radio Plus. Il a aussi salué la démarche du Premier ministre sir Anerood Jugnauth dans la nouvelle stratégie du gouvernement qui a associé la souveraineté de Maurice au droit de retour des Chagossiens dans l’archipel. Il répondait aux questions d’Abdoollah Earally.

« Toute proximité trop grande entre une religion et les politiques ou les partis politiques est très dangereuse », a déclaré Mgr Maurice E. Piat au cours de cette émission. Pour lui, chacun a un travail à accomplir dans la société. En tant que citoyen, il estime avoir le droit de dire, de critiquer si nécessaire ou d’appuyer les initiatives du gouvernement. Cependant, il trouve « malsain l’attachement d’une religion à un parti pour obtenir des avantages ou qu’un parti s’attache à une religion pour avoir un fond de commerce de vote ».

Renouvellement des partis

Attentif à la situation politique du pays, Mgr Piat estime que nous sommes arrivés à un moment où il faut renouveler le personnel politique du pays. « Il est essentiel que dans tous les partis il y ait un renouvellement et que les leaders ouvrent la porte et donne leur place aux jeunes qui ont des choses à apporter. »

Poussant sa réflexion plus loin, il estime que nous avons les politiciens que nous méritons. Selon lui, nombreux sont les électeurs qui se plaignent des politiciens qui ne sont pas sur le terrain, qui sont corrompus, etc. « Si un politicien prend un bribe, c’est bien parce que quelqu’un le lui offre pour obtenir une faveur. »

Rôle des politiciens

Pour Mgr Piat, la population devrait se remettre en question et se demander si elle exerce une pression sur les politiciens, afin qu’ils fassent leur travail, ou si elle obéit à leurs caprices.

Énumérant les faveurs que recherchent certaines personnes, il s’est demandé s’il faut solliciter un politicien pour avoir un autobus pour aller à des funérailles, donner du travail etc. « Est-ce le rôle d’un politicien ? » s’est interrogé le cardinal.

Mgr Piat considère que chacun devrait se remettre en question. Et cela n’est pas l’apanage des seuls politiques. « Si l’on braque les projecteurs sur eux, nous ne résoudrons rien. C’est à la population de voir de quelle manière elle traite les politiciens. » Pour cela, il faut penser globalement et agir localement, en commençant dans sa circonscription et cesser de réclamer des choses aux politiciens, en leur faisant croire qu’on ne votera pas pour eux s’ils n’accordent pas des faveurs. « Nous devons exiger des politiciens qu’ils fassent leur travail de représentation », a martelé Mgr Piat.

Souveraineté de Maurice

Mgr Piat a insisté qu’il continuera à défendre la cause des Chagossiens, comme il l’a déjà fait, indépendamment de son statut. Ce sont les arguments qui ont plus de poids pour convaincre. Il a salué les initiatives du Premier ministre sur le dossier Chagos. Sir Anerood Jugnauth avait associé la souveraineté de Maurice au droit de retour des Chagossiens dans l’archipel. Il considère que cela a eu certains échos dans le monde et rappelle que les évêques de l’océan Indien ont écrit un message en septembre pour appuyer cette initiative.

Inégalités sociales

Par ailleurs, Mgr Piat s’est dit préoccupé par le climat social du pays, notamment concernant les inégalités entre les classes sociales et la prolifération des drogues synthétiques. Selon lui, les inégalités sont flagrantes d’une région à l’autre, si l’on tient compte du niveau de vie des personnes aisées et celui des pauvres.
Il a exprimé son inquiétude pour le modèle de développement économique où il est question d’augmenter le Produit intérieur brut (PIB) pour obtenir davantage de croissance économique pour plus de bien-être. Ce modèle économique n’apporte pas la prospérité à tout le monde, dénonce Mgr Piat. « Cela produit des inégalités dans tous les pays du monde », a-t-il soutenu. Se référant aux commentaires des économistes, il estime que ce modèle est dangereux, d’autant plus que les institutions n’arrivent pas à changer la situation qui profite à un petit nombre.
Il explique le danger de ce modèle qui fait croire que pour être heureux il faut posséder une belle maison et beaucoup d’équipements. « C’est un mensonge de la société. Il peut y avoir beaucoup de malheur dans une grande maison, car ses membres ne mènent pas une vie de famille heureuse et à l’inverse, il peut y avoir beaucoup de bonheur dans une modeste maison », a dit Mgr Piat.

Prolifération des drogues

La prolifération des drogues synthétiques inquiète également le cardinal. Ce phénomène a pris une ampleur préoccupante et touche des jeunes de toutes les couches sociales. Il apparaît que les jeunes se laissent entraîner dans l’engrenage des nouvelles drogues et finissent par vivre de grandes souffrances, ainsi que leurs proches. Mgr Piat n’a pas caché son impuissance devant une telle situation, car il n’y a pas de solution rapide à ce problème.

Aggraver les peines de prison et la répression ne changeront pas les choses. Il préconise plutôt la prévention que promeuvent déjà les travailleurs sociaux. « Il faudrait soutenir ce travail et écouter le vécu des personnes prisonnières de l’enfer de la drogue, qui ont cru trouver le bonheur dans ces produits. » Mgr Piat affirme que ceux qui sont tombés dans la drogue devraient être traités comme des malades et qu’ils ont besoin de soins de qualité. « Les consommateurs de drogue, et non les vendeurs, devraient se voir proposer une réhabilitation. Ceux qui refusent devraient purger leur peine en prison », a soutenu le cardinal.

 

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