
Le premier budget du nouveau gouvernement sera présenté sur fond de finances publiques sous tension. Après un audit jugé alarmant et une communication axée sur la fin des largesses passées, l’exécutif prépare le terrain à une austérité budgétaire, justifiée par une volonté de redresser une économie jugée fragile.
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Le nouveau gouvernement dévoilera son premier budget le 5 juin, dans un contexte économique qu’il qualifie de « difficile ». Depuis son arrivée au pouvoir, les messages diffusés laissent peu de place au doute : les priorités vont changer, et les années de largesse budgétaire appartiennent au passé. Plusieurs acteurs socio-économiques évoquent déjà les contours d’un exercice axé sur l’austérité, voire des choix impopulaires.
Un terrain préparé dès la campagne
Pour Gerald Lincoln, Country Managing Partner chez EY, ce virage vers un budget de rigueur n’a rien de surprenant. Selon lui, les prémices de ce discours ont été posées bien avant les élections générales. « Le nouveau régime préparait la population avant même les élections en disant que le pays est en faillite et que c’est la catastrophe », fait-il observer. Une stratégie de communication qui, selon lui, a permis de préparer les esprits à des mesures moins populaires que celles du passé. L’audit des finances publiques, réalisé dès la prise de pouvoir, semble avoir renforcé cette orientation. « L’audit a tiré la sonnette d’alarme de manière assez brutale », note Gerald Lincoln. Selon lui, le mot d’ordre du budget à venir sera sans doute celui de l’austérité. « Les mesures annoncées ne vont pas être cette générosité que nous avons connue sous l’ancien régime. Le gouvernement prépare la population à une certaine austérité et à un changement de cap pour dire que les cadeaux, c’est fini », indique-t-il.
Un état économique souvent mis en avant
Le rapport intitulé State of the economy, publié l’année dernière, vient conforter cette lecture. Pour Jayen Chellum, secrétaire général de l’Association des consommateurs de l’île Maurice (ACIM), ce document met en lumière l’héritage laissé par le précédent gouvernement. Cependant, Gerald Lincoln rappelle que la situation économique évolue constamment. « Ce rapport n’est pas ponctuel. L’état de l’économie est vivant et il change. Il y aura d’autres rapports similaires qui vont suivre », fait-il remarquer.
L’analyse de ce rapport amène aussi à envisager des décisions peu populaires, mais jugées nécessaires par certains observateurs pour remettre l’économie sur de bons rails. Jayen Chellum évoque la nécessité d’un virage stratégique après plusieurs budgets marqués par des mesures jugées économiquement insoutenables. « Le précédent régime offrait des cadeaux parfois insoutenables d’un point de vue économique. Il faudra des mesures impopulaires pour remettre l’économie sur les rails. »
Des attentes face aux réalités économiques
Parmi les enjeux qui devraient figurer en bonne place dans le budget 2025-26, l’inflation continue d’inquiéter. Jayen Chellum estime qu’elle demeure un facteur de pression sur le pouvoir d’achat. Il insiste aussi sur l’importance de réguler la masse monétaire en circulation. Selon lui, le moment est venu d’agir contre les dérives financières. « Il faut venir de l’avant avec des mesures concrètes pour régler le gaspillage de l’argent public, la corruption et les fraudes », ajoute-t-il.
Le secrétaire général de l’ACIM rappelle aussi certaines promesses électorales restées, à ce jour, sans concrétisation. C’est le cas notamment de la baisse des prix du carburant. Si une réduction a bien été appliquée en décembre, Jayen Chellum s’interroge sur la portée réelle de cette mesure, selon la tendance baissière des prix du pétrole sur le marché international. « On se souvient de la promesse d’une baisse d’environ Rs 20 dès leur prise de pouvoir. On peut comprendre la situation du Price Stabilisation Account (PSA). Cependant, le baril à l’international a diminué d’environ $14, ce qui n’est pas rien. On s’attend à ce que des efforts soient faits pour que cette baisse soit reflétée sur le marché local », indique-t-il.
D’autre part, le budget du 5 juin s’annonce donc comme un exercice d’équilibriste. Il devra combiner la rigueur budgétaire à une gestion prudente des attentes sociales. Un éventuel arrêt des mesures généreuses qui ont marqué les précédents exercices ne sera pas sans conséquence, tant sur le climat politique que sur les conditions de vie de la population. Derrière le discours sur la responsabilité économique, certains observateurs voient une volonté de rétablir l’ordre budgétaire. Ce qui passera probablement par des choix difficiles.

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