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Betamax : le Red Eagle vendu pour Rs 715 M ?

red eagle Le Red Eagle se trouverait actuellement en Tunisie.

Un document daté du 15 octobre 2018 indique que le Red Eagle aurait été vendu à des acheteurs pakistanais en 2018.

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Betamax a-t-il vendu le Red Eagle ? C’est ce que semble indiquer un document qui circule actuellement au niveau de l’Hôtel du gouvernement. Signé Alpina Shippping S&P Market Report, ce compte-rendu des ventes de navires, daté du 15 octobre 2018, indique que le tanker a été vendu pour USD 20,1 millions, soit Rs 714,8 millions. Toutefois, Veekram Bhunjun, directeur de Betamax, n’a pas répondu à nos appels et messages pour confirmer la vente.

Selon le document d’Alpina, le Red Eagle a été vendu à des acheteurs pakistanais, bien que leur identité n’ait pas été dévoilée. Les détails fournis par ce document d’Alpina correspondent aux spécifications du Red Eagle : un poids propre de 74 997 tonnes et une fabrication en 2011 en Corée du Sud.

Alpina Shipping est une compagnie turque, mais son site web est actuellement indisponible. Par contre, le site de localisation des navires Vessel Tracking liste Adhart Shipping Pte Ltd comme propriétaire/gestionnaire du tanker. Adhart fait partie de l’Executive Group of Companies, partenaire singapourien de Betonix, compagnie de la famille Bhunjun au sein de Betamax. Un autre site similaire, Baltic Shipping, liste Betonix comme actuel propriétaire du Red Eagle.
Il faut rappeler que la construction du Red Eagle avait coûté plus de USD 60 millions (Rs 2 milliards) à Betamax. Au moment où le gouvernement mauricien décide de rompre le contrat, le tanker en était à sa quatrième année d’opération. Selon une source proche du dossier, si le gouvernement avait opté pour le rachat du tanker à l’époque, il aurait coûté USD 46 millions (Rs 1,6 milliard). Avec les dédommagements pour le manque à gagner, la somme aurait atteint
USD 60 millions (Rs 2 milliards). Les USD 20,1 millions mentionnés par Alpina seraient donc un prix « cadeau».

Selon Vessel Tracking, le Red Eagle se trouve actuellement en Tunisie. Depuis le début de l’année, il s’est rendu à Richards Bay (Afrique du Sud), à Maputo (Mozambique) et à New York (États-Unis).

Le tanker fait l’actualité depuis la semaine dernière, après le jugement de la Cour suprême qui estime que le contrat d’affrètement octroyé par la State Trading Corporation  à Betamax était illégal. En 2015, le gouvernement avait décidé de résilier le contrat et Betamax avait alors déclaré litige auprès d’un tribunal d’arbitrage à Singapour. Avant cela, soit en 2014, Betamax avait fait un chiffre d’affaires de Rs 1,4 milliard et un profit de Rs 129 millions. En 2015, ces chiffres sont passés à Rs 862,2 millions pour des pertes de Rs 35,5 millions.


Ce qui s’est passé dans l’affaire qui vaut Rs 4,5 milliards

L’affaire Betamax, c’en est une qui pèse Rs 4,5 milliards. Grâce à la Cour suprême mauricienne, le jugement du Centre international d’arbitrage de Singapour qui condamnait la State Trading Corporation  (STC) de débourser Rs 4,5 milliards plus intérêts a été renversé vendredi dernier. Betamax compte faire appel de ce jugement devant le Judicial Committee du Privy Council, car elle veut être dédommagée pour la résiliation du contrat de transport de carburants qui la liait à la STC pour une durée de 15 ans. Petit rappel des faits :

Le contexte 2008

  • Le contrat avec la compagnie indienne Mangalore Refineries and Petrochemicals Limited (MRPL) est renouvelé. Au lieu de louer un pétrolier pour faire le va-et-vient entre le port de Mangalore, en Inde, et Port-Louis, le gouvernement décide de trouver un transporteur pour une longue durée.
  • 19 décembre 2008 : Le Cabinet donne son aval pour un accord entre Betonix/ESM et l’État pour que la Joint Venture approvisionne Maurice en pétrole pendant 15 ans.
  • 30 janvier 2009 : La Joint Venture Betonix/ Executive Shipping Management (ESM) propose un contrat d’affrètement de produits pétroliers à la STC.
  • 28 avril 2009 : Le State Law Office émet des réserves et reproche à la STC de ne pas avoir eu recours à un appel d’offres pour sélectionner un prestataire. Il s’inquiète aussi de certaines clauses du contrat qu’il estime être trop en faveur de Betonix/ESM.
  • 6 mai 2009 : Betamax est incorporée. Betonix Holding Ltd détient 10 506 actions et l’armateur singapourien ESM en detient 1 854. Le conseil d’administration de la STC donne son feu vert pour la signature du contrat.
  • 26 novembre 2009 : L’accord entre la STC et Betamax est signé et entre en vigueur le lendemain.
  • Février 2011 : Insight Forensics, cabinet dirigé par Roshi Bhadain, remet un rapport au ministre du Commerce et de l’Industrie d’alors, Showkutally Soodhun. Le document fait ressortir plusieurs points. Parmi,  le fait que les membres du conseil d’administration de la STC reçoivent un rapport de BDO sur le Red Eagle à 21 heures le 26 novembre 2009. Le lendemain, à 11 heures, se tient une réunion durant laquelle le conseil d’administration approuve le contrat avec Betamax. Une précipitation qui interpelle les rédacteurs du rapport tout comme le fait que le contrat a été signé sans attendre l’avis du Parquet.
  • 27 mai 2011 : Le Red Eagle, premier pétrolier à battre pavillon mauricien et appartenant à Betamax, effectue son premier voyage vers Mangalore. Depuis la signature du contrat, Betamax avait loué un pétrolier auprès d’un autre armateur.

Le bras de fer gouvernement/ Betamax

2015

  • 31 janvier 2015 : En conférence de presse, sir Anerood Jugnauth, devenu Premier ministre suite aux élections générales du 11 décembre 2014, annonce la fin du contrat entre la STC et Betamax en soutenant qu’il était « illégal ». Avant d’en arriver là, il y a eu des négociations entre les différentes parties, mais elles n’ont pas abouti.
  • Avril 2015 : Ranjit Soomaroah, ex-directeur de la STC, est arrêté.
  • Octobre 2015 : L’ex-Premier ministre, Navin Ramgoolam, l’ex-vice-Premier ministre et ministre des Infrastructures publiques et du Transport, Anil Bachoo, et Veekram Bhunjun sont arrêtés ainsi que plusieurs hauts responsables de la Fonction publique.
  • Avril 2016 : Betamax porte plainte contre la STC, le Directeur des poursuites publiques et le Commissaire de police, entre autres.
  • Novembre 2016 : Le Directeur des poursuites publiques décide d’abandonner les charges contre les principaux protagonistes. Les 23 et 24 novembre, Navin Ramgoolam et Anil Bachoo sont blanchis.
  • 5 juin 2017 : Betamax remporte son affaire devant le Centre international d’arbitrage de Singapour. La STC est condamnée à verser des dommages de Rs 4,5 milliards en sus de pénalités de Rs 500 000 par jour jusqu’à ce qu’elle verse l’argent à Betamax. Immédiatement, le gouvernement fait savoir que le verdict sera conteste. Lors d’une Private Notice Question, l’Attorney General de l’époque, Ravi Yerrigadoo, révèle que la STC a payé 125 244 128 US$ de mai 2011 à janvier 2015 pour les services du Red Eagle et que le prix payé était bien au-dessus de celui du marché.
  • Août 2017 : La STC conteste la décision du centre d’arbitrage devant la Cour suprême mauricienne.
  • Novembre 2017 : Betamax loge une demande d’injonction auprès de la Haute Cour de Karnataka, en Inde, pour empêcher le Pacific Diamond, remplaçant du Red Eagle, de quitter le port. Maurice frise la crise pétrolière. Des dispositions immédiates sont prises pour faire venir des produits pétroliers des Seychelles et de l’Arabie saoudite. Le 11 décembre, l’injonction est levée.
  • 29 mai 2019 : La STC doit émettre une garantie bancaire de Rs 4,5 milliards ordonne la Cour suprême de New Delhi. Dans les coulisses de l’Hôtel du gouvernement, l’on laisse entendre que l’on ne respectera pas ce verdict.
  • 31 mai 2019 : La Cour suprême tranche en faveur de la STC en estimant que le contrat liant cette dernière à Betamax n’est pas valide, car il fallait passer par le Central Procurement Board.
 

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