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Bangladesh: la Première ministre quitte son palais pris d'assaut par des milliers de manifestants

La Première ministre bangladaise, Sheikh Hasina

La Première ministre bangladaise Sheikh Hasina a quitté lundi son palais de Dacca, selon une source proche de la dirigeante, avant que des milliers de manifestants antigouvernementaux ne le prennent d'assaut d'après des images télévisées.

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Un porte-parole des forces armées bangladaises avait auparavant indiqué à l'AFP que le chef de l'armée, le général Waker-Uz-Zaman, devait s'adresser au pays lundi après-midi. Ce général avait affirmé samedi dans un communiqué que les militaires se tiendraient "toujours aux côtés du peuple".

Le palais de Mme Hasina dans la capitale, Dacca, a été pris d'assaut par des milliers de manifestants, selon des images télévisées, après qu'une source a indiqué à l'AFP que la dirigeante avait fui pour un "lieu plus sûr". Elle a quitté la ville par hélicoptère, selon une source proche de la dirigeante de 76 ans.

"Elle voulait enregistrer un discours. Mais elle n'a pas pu avoir l'occasion de le faire", a précisé cette source proche de la dirigeante.

Le fils de Mme Hasina, Sajeeb Wazed, a exhorté les forces de sécurité à empêcher toute prise de pouvoir. "Votre devoir est d'assurer la sécurité de notre peuple et de notre pays, ainsi que de faire respecter la Constitution", a-t-il écrit sur Facebook.

Interrogé par l'AFP, un conseiller proche de la Première ministre a déclaré sous couvert d'anonymat que la démission de Sheikh Hasina était une "possibilité".

Fille aînée de Sheikh Mujibur Rahman, le père fondateur du Bangladesh qui a pris son indépendance du Pakistan en 1971, Sheikh Hasina est au pouvoir depuis 2009, après un premier mandat entre 1996 et 2001.

Lundi, des centaines de milliers de manifestants antigouvernementaux défilent dans les rues de la capitale au lendemain d'une journée sanglante au cours de laquelle des affrontements ont fait au moins 94 morts à travers le pays.

D'après des témoins, de larges foules marchent dans les rues de Dacca et ont abattu des barrages. Le quotidien Business Standard estime que quelque 400.000 protestataires manifestent ainsi lundi, un nombre que l'AFP n'a pas été en mesure de vérifier.

Au moins 300 personnes ont été tuées depuis le début des manifestations en juillet, selon un bilan de l'AFP à partir de données de la police, de responsables et de sources hospitalières.

Dans le pays, un couvre-feu est entré en vigueur dimanche soir. Les 3.500 usines ont fermé au Bangladesh où l'industrie de l'habillement a été le principal moteur de l'impressionnante croissance économique.

L'accès à internet est coupé de manière généralisée lundi, d'après des fournisseurs et des organismes de surveillance.

- "Champ de bataille" -

Dimanche, de nouveaux heurts entre opposants à Mme Hasina, forces de l'ordre et partisans du parti au pouvoir avaient fait au moins 94 morts dans tout le pays.

C'est le bilan le plus lourd en une seule journée depuis le début des manifestations antigouvernementales il y a un mois dans ce pays musulman de 170 millions d'habitants où les étudiants contestent, sur fond de chômage aigu des diplômés, les faveurs dont bénéficient les proches du pouvoir pour devenir fonctionnaires.

Parmi les morts figurent au moins 14 policiers, selon le porte-parole de la police, Kamrul Ahsan. Un commissariat à Enayetpour (nord-est) a été pris d'assaut et 11 policiers tués, selon la police.

Tout Dacca s'est transformé "en champ de bataille" et une foule de plusieurs milliers de manifestants a mis le feu à des voitures et des motos près d'un hôpital, selon une autre source policière.

"La violence choquante au Bangladesh doit cesser", a exhorté dimanche soir le Haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'homme, Volker Türk.

- Appel au retrait des troupes -

Ces affrontements comptent parmi les plus meurtriers depuis l'arrivée au pouvoir il y a 15 ans de Mme Hasina. Pour rétablir l'ordre, son gouvernement a notamment fermé écoles et universités et déployé l'armée.

D'anciens officiers militaires ont depuis apporté leur soutien aux contestataires.

Dans une prise de position hautement symbolique contre la Première ministre, un ancien chef de l'armée, le général Ikbal Karim Bhuiyan, et plusieurs autres ex-officiers supérieurs ont appelé au retrait des troupes de la rue, en soulignant que les gens n'avaient "plus peur de sacrifier leur vie".

Dans plusieurs cas, des soldats et des policiers ne sont d'ailleurs pas intervenus contre les protestataires, contrairement au mois dernier.

"Ceux qui sont responsables d'avoir poussé les habitants de ce pays dans un état de misère aussi extrême devront être traduits en justice", a aussi estimé M. Bhuiyan.

- "Vivre librement" -

Le pays compte de nombreux diplômés au chômage, et les étudiants exigent l'abolition d'un système de discrimination positive qui réserve un quota d'emplois publics aux familles des vétérans de l'indépendance.

Partiellement aboli en 2018, ce système a été restauré en juin par la justice, mettant le feu aux poudres, avant un nouveau retournement fin juillet de la Cour suprême.

La crise sociale s'est muée en crise politique à partir du 16 juillet, quand la répression a fait ses premiers morts, les manifestants réclamant alors la démission de Mme Hasina.

"Il ne s'agit plus seulement de quotas d'emplois", a déclaré à l'AFP Sakhawat, une jeune manifestante rencontrée à Dacca. "Nous voulons que les futures générations puissent vivre librement", dit-elle.

© Agence France-Presse

 

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