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Bal Rajsingh Sharma Bandhu, taximan devenu avocat... et agriculteur

Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu avec son taxi. Me Singh Yuvir Sharma Bandhu entouré de son père, Me Bal Rajsingh Sharma Bandhun, sa mère Mithila et ses deux frères Vakeel et Yuver devant l’enceinte de la Cour suprême.
  • Son fils cadet marche aujourd’hui sur ses pasL’obs

tination est le chemin de la réussite. Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu ne dira pas le contraire. Cette persévérance, il l’a transmise à ses trois fils, dont l’un a suivi ses pas. Le Dimanche/l’Hebdo est allé à la rencontre du père et du fils. 

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«To fou twa. Li inposib ! » Les taquineries de ses collègues, Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu, 61 ans, s’en souvient encore. Il n’était alors qu’un simple chauffeur de taxi. Et il n’avait même pas son Higher School Certificate. Qu’importe, son rêve était d’être avocat. Un rêve qu’il a accompli. Une passion dont a hérité l’un de ses fils, Yuvir, 27 ans. Le 23 septembre 2022, ce dernier a prêté serment comme avocat. Treize ans après son père.

Père et fils partagent la même étude, Innerchambers, au bâtiment Bahemia, à Port-Louis. La complicité de ces habitants de la région d’Arsenal saute aux yeux. Le même amour pour cette profession les anime. La même volonté de combattre l’injustice, à aider autrui. Sans parler du fait que l’un est aussi bavard que l’autre !

Dès son plus jeune âge, raconte Me Singh Yuvir Sharma Bandhu, il voulait porter la toge. Et du haut de ses 5 ans, il l’avait même portée. Est-ce un rêve qui s’est réalisé ? « Je voulais être avocat et j’ai travaillé dur pour que ce rêve devienne réalité », confie le jeune avocat avec un sourire. « Même à l’école, lorsqu’on me demandait ce que je voulais faire plus tard, sans hésitation, je répondais que je voulais être l’homme qui porte la toge », lance-t-il. 

Cette ténacité, il la tient de son père, Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu. Lui, simple chauffeur de taxi, qui s’est battu contre vents et marées pour pouvoir un jour revêtir la robe noire d’avocat. C’est le 11 septembre 2009, à l’âge de 48 ans, qu’il prête enfin serment. Comment a-t-il accompli ce cheminement ? 

Sans complexe, Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu révèle que cela lui a pris 30 ans. Le chemin a été semé d’obstacles, dit-il. Notamment d’ordre financier. Ce qui l’a contraint, à un moment, de baisser les bras. Mais sa volonté de réussir a fini par prendre le dessus. 

Il raconte avoir dû quitter le collège à l’âge de 19 ans, alors qu’il était en Lower VI, afin de trouver un emploi pour aider financièrement ses parents, Mahinder Sharma Bandhu et Lutchmeen Gobin. Issu d’une famille modeste de six enfants dont une sœur, il fréquentait alors le collège Saint Barthelemy, à Port-Louis. 

Rien n’est impossible si on veut réussir»

« J’ai été employé par Me Osman Noormahomed Abbasakoor, Senior Attorney, en 1980. » C’est alors qu’il fait la rencontre de Me Madan Dulloo et de l’ancien chef juge Asraf Caunhye. « J’ai été inspiré à la suite de ma rencontre avec eux pour réaliser mon rêve d’être avocat. Je me disais, pourquoi pas. De plus, je voulais porter la toge pour combattre les injustices et les discriminations de la vie », martèle Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu. 

Il sera au service du Senior Attorney pendant deux ans, avant de se lancer dans la carrière de chauffeur de taxi. Il opère dans un premier temps à Plaine-Verte Central et Plaine-Verte Lower. Puis, pour l’hôtel Maritim et à l’hôtel La Plantation, à Balaclava, pendant plus de 20 ans. Durant ses pauses, en attendant des clients, il étudie dans son taxi.

Le 14 février 1993, il se marie avec Mithila, qui est actuellement employée à l’hôtel Cocotiers à Baie-du-Tombeau. Le couple aura trois enfants, Yuver, 27 ans, Yuvir, 26 ans, et Vakeel, 19 ans. L’aîné est policier et détient un LLB (Hons) de l’université de Leeds, alors que le benjamin est élève au collège Royal de Port-Louis. Il est en attente des résultats du HSC. 

La même année, il s’envole pour la première fois pour l’Angleterre afin d’entamer les procédures pour ses études pré-universitaires. Cependant, deux semaines avant son départ, le père de Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu décède. Malgré cela, il met le cap sur la Blonde Albion. 

Avant d’entreprendre des études de droit, il effectue, en 1995, un A Level Law à l’université de Cambridge. En 1996, il étudie le droit à la London School of Law. Yuvir naît entre-temps. 

Ensuite, il retourne au pays et poursuit ses études de droit (LLB) à distance. Il révèle que cela n’a pas été facile. Il se voit contraint de faire une pause dans ses études pour des raisons financières. 

Ce n’est qu’en 2004 que Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu s’envole de nouveau pour l’Angleterre pour compléter ses études de droit et aussi le Bar Vocational Course à l’université de Northumbria. En 2008, il est called to the bar au Inner Temple en Angleterre. Entre-temps, il ne chôme pas. Pour payer ses études, il travaille comme vigile à Newcastle.

De retour à Maurice, il fait son « pupillage » chez feu Me Yousuf Mohamed, Senior Counsel, Maneesh Gobin, actuellement Attorney General, Me Marc Hein, Senior Counsel, feu Me Dhan Kissoon, Mes Rodney Rama et Osman Noormahomed Abbasakoor, Senior Attorney. En septembre 2009, il prête enfin serment comme avocat.

Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu a aussi été chargé de cours en droit à l’université des Mascareignes, à Beau-Plan et à YK Business School BPP Mauritius Limited, à Belle-Terre. Il détient également un MSc en Criminal Justice. L’homme de loi est toujours lecturer en droit pour des étudiants privés.

Lorsque Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu ne porte pas la toge, il revêt ses habits d’agriculteur. « Le matin avant d’aller au travail, je coupe des herbes pour mes animaux que j’aime tant. Ce sont mes ‘bébés’. Et, aussi, je suis un registered farmer depuis un an. Non seulement je m’occupe de mes ‘bébés’, mais je fais aussi la culture des légumes. Récemment, j’ai planté des bringelles et du voème, entre autres », dit-il fièrement.

Par ailleurs, Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu a aussi joué dans le film bollywoodien Help en 2010, auprès de l’acteur indien Bobby Deol, fils de l’acteur Dharmendra qui l’avait recommandé, soutient-il. « Rien n’est impossible si on veut réussir », conclut Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu.


Qui est Me Singh Yuvir Sharma Bandhu ?

La vie est un défi à relever, un bonheur à mériter, une aventure à tenter. Me Singh Yuvir Sharma Bandhu a fait sienne cette devise. Il se décrit volontiers comme un aventurier. 

Il fait ses études primaires à Le Nid, Triolet. Puis, il poursuit ses études secondaires au Adolphe de Plevitz SSS à Grand-Baie. À 18 ans, il quitte le collège et entame des études supérieures de droit à distance à l’université de Northumbria, à Newcastle. 

Entre-temps, il prend de l’emploi comme Insurance Advisor à l’ex-compagnie British American Investment de 2014 à 2015. En 2015, il rejoint une compagnie offshore, Antix Corporate Solutions, en tant que trainee. Cet emploi lui permet de consacrer plus de temps à ses études de droit, ses horaires de travail étant de 5 heures à 14 heures. 

Il exercera comme Marketing Agent à la compagnie Guardian Marketing Ltd de 2017 à 2018. Puis, il effectue un internship à DASAUTO Co. Ltd, où il aidait aux réparations et à l’entretien des véhicules des marques BMW, Mercedes et Audi. Et il coordonnait la planification des réparations et la commande. 

En 2019, le jeune homme s’envole pour l’Angleterre afin de compléter ses études de droit. Si la pandémie de Covid-19 vient perturber ses plans, cela ne le décourage pas pour autant, bien qu’il doive également faire face à des problèmes de santé. 

« Pendant la Covid-19, cela a vraiment été rude. Tout était au point mort en Angleterre. C’est alors que je me suis lancé dans d’autres activités au lieu de me croiser les bras. » Il participe au Great North Run. « J’ai fait 28 kilomètres en 28 jours, ce qui m’a valu d’obtenir un trophée. Puis, j’ai aidé à recueillir des fonds en participant à un marathon pour des recherches sur le cancer. »

Le 22 juillet 2021, il prête serment comme avocat à l’Honorable Society of Inner Temple en Angleterre. De retour à Maurice, il fait son « pupillage » chez Me Ghanshyamdas Bhanji Soni, Me Huchun Gunesh (avoué), au bureau du Directeur des poursuites publiques (DPP) sous la supervision de Me Meenakshi Gayan Jaulimsingh, Acting Assistant DPP, au bureau de l’Attorney General sous la supervision de Me Sulakshana Beekarry-Sunassee, Assistant Solicitor General, et chez Mes Antoine Domingue et Gavin Glover, tous deux Senior Counsel. 

Hormis son LLB, Me Singh Yuvir Sharma Bandhu a un certificat en IJLS Induction Course for Prospectives Barristers. Il détient une maîtrise (LLM) en International Human Rights et un Advance Certificate en anglais, ce qui lui permet d’enseigner la langue anglaise. 

De plus, Me Singh Yuvir Sharma Bandhu a été actif durant ses études de droit. Il a assisté, en 2014, son père dans une affaire d’extradition d’une Malgache de 41 ans. Elle avait été condamnée à 10 ans de prison pour trafic de drogue aux Assises. Elle voulait purger sa peine dans son pays natal. Il a aussi participé à un colloque à La Réunion avec d’autres membres de la profession, dont Me Yahia Nazroo. 

S’il attribue aussi sa réussite au soutien de ses parents et de son oncle Mukesh, Me Singh Yuvir Sharma Bandhu maintient néanmoins qu’« il faut toujours persévérer dans la vie ». « Mon but a été atteint. Mon objectif maintenant est d’aider les gens qui sont dans le besoin, car des fois, il y a trop d’injustices », estime-t-il.

Son conseil aux jeunes ? « Il faut être honnête dans ce qu’on fait et les conseils qu’on donne à nos clients. J’ai eu l’opportunité de travailler avec des avocats d’expérience et de renom qui m’ont guidé durant mon cheminement. Mais j’ai encore à apprendre d’eux et des autres. Des fois, je suis certains procès de mes mentors lorsqu’ils plaident devant une cour de justice. Car mon parcours ne fait que commencer et j’ai encore du chemin à parcourir. »

Ce qu’ils détestent

Me Singh Yuvir Sharma Bandhu déteste les personnes pessimistes. « Ceux qui se montrent cruels envers les animaux, les injustices et les discriminations », ce sont là des choses qui mettent Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu hors de lui.

Leurs passions

Père et fils adorent le sport et les animaux. Me Singh Yuvir Sharma Bandhu est un passionné de football. Son équipe favorite est le Real Madrid. « Je ne manque aucun match et trois fois par semaine, je joue avec des amis. » 

Est-ce possible avec sa profession ? « Tout est possible. Il faut savoir s’organiser et profiter de la vie », souligne-t-il. 

Adepte de biographies de personnalités telles que Robin Sharma ou encore Nelson, il aime voyager, faire des randonnés et d’autres activités sportives, dont la nage. Il a eu l’opportunité de se rendre à La Réunion, Rodrigues, Dubaï, Madagascar, en Inde et en Angleterre. Par ailleurs, Me Singh Yuvir Sharma Bandhu aime cuisiner. « Je cuisine des choses simples, du poulet, des légumes, entre autres. » Le jeune avocat confie, d’autre part, qu’il ne peut pas se passer de sa chienne, un griffon qui se prénomme Ruby : « Je l’adore. »

Quant à Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu, il pratique le karaté, la boxe, le taekwondo et la chasse. Actuellement, il compte une vingtaine d’animaux, dont des moutons et des cabris. Il y a aussi une tortue et une cateau verte. 

Les manquements 

Selon Me Singh Yuvir Sharma Bandhu, certaines de nos lois doivent être revues car elles sont archaïques. Il estime que l’accusation provisoire n’a pas sa raison d’être et qu’il est primordial d’introduire le Police and Criminal Evidence Act (PACE). Sauf que, pour cela, il faut « the right person ». Dans la foulée, il déplore que l’e-filing soit une réalité uniquement devant la division commerciale de la Cour suprême. 

D’autre part, le jeune homme de loi constate que nombreux sont les Mauriciens à ne pas connaître la Constitution, la loi suprême du pays. Il insiste sur l’importance de l’inclure comme matière au primaire et au collège. Les gens doivent connaître leurs droits, martèle-t-il. 

Son père abonde dans le même sens. Me Bal Rajsingh Sharma Bandhu propose, par ailleurs, des afternoon / evening sessions par des « part-time magistrates / lay magistrates ». Ce qui règlerait le problème des personnes qui doivent souvent s’absenter du travail pour se rendre au tribunal. Sans compter que cela aiderait à diminuer les délais dans les procès et les deadlocks dans le judiciaire suivant la pandémie de Covid-19.

 

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