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Baisse de prix sur cinq produits : un soulagement temporaire pour les Mauriciens

L’objectif des subventions est de faire face contre la cherté de la vie.
  • Combien les consommateurs vont-ils pouvoir économiser ?

À partir du mardi 26 août, cinq produits essentiels verront leur prix réduit pour une période de six mois, grâce à une enveloppe de Rs 400 millions prélevée du Price Stabilisation Fund. Si certains estiment que ces mesures apporteront un certain soulagement, d’autres s’interrogent sur leur portée réelle et leur efficacité à long terme.

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À partir de la semaine prochaine, le lait en poudre, l’huile comestible, le fromage, le lait pour nourrissons et les couches pour bébés bénéficieront de subventions. Concrètement, la somme de Rs 50 sera déduite par kilo de lait en poudre, Rs 15 par litre d’huile Soya Bean, et Rs 55 sur le lait pour nourrissons de 900 grammes. Les couches pour bébés connaîtront une baisse de 50 sous l’unité, soit Rs 25 pour un paquet de 50, tandis que le « processed cheese », incluant des marques telles que Kraft et Bega, sera allégé de Rs 10. Cette décision intervient dans un contexte marqué par la hausse continue du coût de la vie à Maurice. 

Un soulagement ciblé, mais limité

Pour Suttyhudeo Tengur, président de l’Association pour la Protection de l’Environnement et des Consommateurs (APEC), la mesure pourrait alléger le fardeau de nombreux ménages. « La subvention de produits tels que le lait en poudre, le fromage, et l’huile comestible, consommés par une large part de la population, pourra probablement aider à réduire le coût de la vie pour de nombreux ménages », explique-t-il. 

Toutefois, il avance que pour les produits comme le lait infantile et les couches, dédiés à une clientèle spécifique, l’impact sera limité à une minorité. Ainsi, poursuit-il, cette mesure pourrait partiellement soulager la majorité, mais son effet global sur le pouvoir d’achat pourrait être modéré si la majorité des dépenses n’est pas concentrée sur ces produits. « Pour une efficacité accrue, il serait pertinent d’étendre ou de cibler davantage les subventions selon les besoins », affirme-t-il.

Pour sa part, Claude Canabady, secrétaire de la Consumer’s Eye Association, partage une vision plus optimiste. « Je pense que c’est une très bonne initiative et cela va aider les consommateurs dans les grandes lignes. C’est trop tôt pour une évaluation et passer un jugement hâtif, il faut donner le temps au temps », dit-il.  

Certes, il concède que le lait infantile et les couches pour bébé ne s’appliquent qu’à une petite partie de la population. Cependant, pour lui, cela peut être considéré comme assez conséquent si l’on prend en compte les mères célibataires et divorcées. « Ce n’est qu’un commencement d’une initiative qui va dans la bonne direction », fait-il ressortir. 

Du côté des importateurs, Sonny Wong, Chief Operating Officer d’Innodis, salue également l’initiative. « Nous accueillons l’initiative du gouvernement, qui cherche à atténuer l’impact de l’inflation sur certains produits de base pesant lourdement sur le budget des ménages, en particulier ceux à faibles revenus. L’augmentation inévitable du coût de la vie est une source de tension sociale. En agissant sur des produits sensibles comme ceux destinés aux bébés et l’alimentation de base, le gouvernement cherche à préserver la paix sociale et à répondre aux attentes populaires », explique-t-il. 

Selon lui, si cette mesure était accompagnée d’une politique de ciblage social plus précise, d’une orientation vers la production locale et d’une meilleure transparence, elle pourrait gagner en efficacité.

Critiques sur l’impact réel

Cependant, certains restent sceptiques quant à l’effet de ces subventions sur le pouvoir d’achat des Mauriciens. L’économiste Chandan Jankee considère que la liste de produits subventionnés ne reflète pas le panier type des familles mauriciennes. « On voit qu’il y a une intention de la part du gouvernement pour faire baisser les prix. Cependant, subventionner une liste de cinq produits ne va pas améliorer la situation de manière significative. Les produits mentionnés ne représentent pas la majorité des dépenses d’une famille. Il aurait été pertinent d’inclure d’autres produits consommés par les ménages à faibles revenus, comme les grains secs, les sardines ou le poisson salé. Du coup, je ne trouve pas que cette mesure apportera un réel soulagement à la population », souligne-t-il.

Baisse de prix

Pour lui, l’effet de la mesure sera également limité dans le temps. « Offrir des subventions pour une période de six mois aura certainement un effet éphémère. Par la suite, les prix continueront de grimper et les consommateurs se retrouveront dans la même situation. La mesure n’est donc pas une solution durable face à la cherté de la vie », fait-il remarquer. 

D’ailleurs, l’une des préoccupations majeures de cette initiative concerne sa pérennité. Que se passera-t-il si les prix des produits continuent d’augmenter après la période de subvention ? Selon Suttyhudeo Tengur, plusieurs scénarios sont possibles. « Les ménages pourraient continuer à faire face à une hausse du coût de la vie, ce qui réduirait l’efficacité de la mesure », explique-t-il. 

Il envisage alors que le gouvernement puisse prolonger ou ajuster le programme de subventions. « Il pourrait aussi envisager des mesures structurelles, comme la diversification de l’offre ou des politiques pour contrôler l’inflation, afin d’éviter une dépendance prolongée aux subventions », précise-t-il.

Claude Canabady suggère, de son côté, qu’il faudra sans doute revoir les pourcentages de subvention et réfléchir à un mécanisme de financement complémentaire. « Le gouvernement pourrait taxer davantage les produits de grand luxe pour subventionner les produits de base », propose-t-il. Selon lui, cette approche viserait à rendre la politique plus équitable et durable, tout en s’assurant que les subventions ciblent efficacement les besoins essentiels de la population.

Selon nos interlocuteurs, la baisse de prix annoncée pour ces cinq produits essentiels constitue l’intention du gouvernement pour soulager les ménages face à la cherté de la vie. Toutefois, son efficacité réelle dépendra de sa durée et des mesures complémentaires mises en place.  Pour eux, si elle représente un pas dans la bonne direction, elle ne constitue pas à elle seule une solution durable pour protéger le pouvoir d’achat des Mauriciens.


Les recommandations pour assurer une utilisation plus efficace du Price Stabilisation Fund

Suttyhudeo Tengur : « Pour maximiser l’efficacité des subventions et soutenir les ménages les plus vulnérables, il est essentiel de mettre en place un ciblage précis, orientant l’aide vers les foyers à faible revenu. Ce dispositif doit s’accompagner d’un suivi et d’une évaluation réguliers afin de mesurer l’impact des mesures et d’ajuster les actions si nécessaire. La diversification des produits subventionnés est également cruciale : les aides doivent évoluer pour inclure d’autres produits de première nécessité en fonction des besoins de la population. 

La transparence dans la gestion des fonds constitue un pilier fondamental pour prévenir toute mauvaise utilisation et renforcer la confiance des citoyens. Parallèlement, encourager la production locale permet de réduire la dépendance aux importations et de stabiliser les prix à long terme. Enfin, ces mesures doivent s’inscrire dans une approche globale, combinant soutien direct et politiques macroéconomiques, afin de maîtriser durablement l’inflation et préserver le pouvoir d’achat ».

Claude Canabady : « Je pense qu’il serait nécessaire de réaliser une enquête auprès du public afin d’évaluer l’efficacité des mesures mises en place. De plus, la Consumers’ Eye Association insiste sur l’importance de prendre en compte l’opinion des consommateurs pour réellement savoir si les mesures fonctionnent et déterminer où des ajustements sont nécessaires. Je l’ai déjà dit, et je le répète. Psychologiquement, le public apprécie davantage quand son point de vue est pris en considération, plutôt que de voir des décisions appliquées sans consultation ».

Chandan Jankee : « Le problème se situe dans notre système même. Il est d’abord nécessaire de réaliser des recherches approfondies sur la consommation des Mauriciens afin d’identifier les produits les plus couramment utilisés et de subventionner ceux-ci. Il est surtout essentiel de s’assurer que ces produits bénéficient aux familles les plus vulnérables. Par ailleurs, il serait pertinent d’introduire une carte de ration, comme cela se fait en Inde. Il s’agit d’un système de ‘two-tier pricing’. Si vous faites partie d’une famille en bas de l’échelle, vous obtenez une carte de ration qui vous permet d’acheter environ 20 produits de base à des prix subventionnés. Si la famille souhaite acheter au-delà du quota imposé, elle paie le supplément au prix du marché. Ce système améliorerait réellement le pouvoir d’achat des Mauriciens. Puis, des réformes en profondeur sont nécessaires, notamment la libéralisation des importations et la promotion de la production locale via des incitations fiscales. »


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