Comme le veut la tradition, chaque 1er-Mai, nos politiciens font une série de promesses, qu’ils soient déjà au pouvoir ou en quête du pouvoir. Cette année n’échappe pas à la règle. Sur les différentes estrades des partis politiques traditionnels, notamment le MSM à Vacoas, le Parti Travailliste à Port-Louis, le MMM à Rose-Hill et le PMSD à ébène, des promesses ont été bel et bien faites. Cette année, c’est un peu spécial, car elles ont été formulées à l’aube des élections générales. C’est sur un fond de campagne électorale que les leaders des divers partis ont annoncé une série de mesures. Toutefois, nous allons nous concentrer sur des mesures du Premier ministre et leader du MSM, Pravind Jugnauth, et celles de l’ancien chef du gouvernement et leader du Parti Travailliste, Navin Ramgoolam. Cela, parce que, selon des observateurs politiques, cette joute électorale se jouera entre ces deux partis. Des experts vont décortiquer pour nous quelques-unes des mesures annoncées.
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Annonces de PRAVIND JUGNAUTH : Un autre câble sous-marin de fibre optique
L’aménagement d’un autre câble sous-marin de fibre optique pour améliorer la connexion internet. Une parmi la série de mesures annoncée par le chef du gouvernement lors de son discours à Vacoas.
Roshan Seetohul : «Le câble Metiss assurera un accès internet plus rapide»
« Concernant l’aménagement d’un autre câble sous-marin, on est en train de faire référence au câble Metiss », explique le président de l’Outsourcing and Telecommunications Association of Mauritius (OTAM). Selon Roshan Seetohul, il s’agit là d’un câble qui reliera Maurice à Madagascar, la Réunion et l’Afrique du Sud. Il est prévu qu’il soit opérationnel fin 2019 ou tôt en 2020.
« Ce câble en principe assurera l’accès à un internet sécurisé et plus rapide, et fera baisser les tarifs d’internet, à la satisfaction des consommateurs », poursuit-il. Roshan Seetohul soutient que, si c’est au câble Metiss auquel le Premier ministre fait référence, c’est une initiative de la Commission de l’océan Indien (COI). Et ce projet regroupe six opérateurs, dont le Central Electricity Board (CEB), Emtel de Maurice, Telma de Madagascar et trois autres.
Avec les autres câbles existants comme SAFE, Seacom, Easy et Lion, le câble Metiss apportera un plus, avance catégoriquement le président de l’OTAM. Et d’ajouter que si toutefois, on envisage un nouveau câble, il ne sera d’aucun intérêt. « Avoir encore un câble n’apportera qu’une redondance et pas plus », juge ce dernier.
L’extension du Metro Express
Le gouvernement travaille déjà sur l’extension du Metro Express vers ébène, Côte d’Or et l’Est du pays. Le Premier ministre rêve de connecter le pays en entier. Telle est l’autre mesure que l’on retient du discours de Pravind Jugnauth.
Pierre Dinan : «Où Maurice trouvera-t-il cet argent ?»
« Il est bon de rêver. » Avis exprimé par l’économiste Pierre Dinan. « Le Premier ministre veut une île Maurice moderne. C’est un objectif valable, mais qui ne va pas tomber du ciel. Il faut les finances. Or, le financement est problématique », s’exclame notre interlocuteur. Pierre Dinan se demande où l’île Maurice, qui a un faible taux d’épargne, trouvera-t-elle cet argent ?
L’économiste précise que Maurice devra faire appel au financement étranger, qui peut être sous forme d’investissement, de prêt ou de grant. « Nous voulons une ligne ferroviaire et ne voulons pas les capitaux des compagnies étrangères. Il est plus que probable que nous devrons emprunter. L’Inde nous a déjà donné de l’argent, mais il faudra rembourser », affirme Pierre Dinan. Ce dernier indique que, dans son dernier rapport, le Fonds monétaire international (FMI) est venu mettre le doigt sur notre dette publique, qui a augmenté. Il n’a pas manqué d’ajouter que, dans le prochain budget, il faudra que le ministre des Finances explique comment il compte réduire le poids de la dette.
L’économiste soutient néanmoins qu’un service ferroviaire est une bonne chose, car on est de plus en plus étouffé par le nombre de véhicules sur nos routes. « Je crois qu’il y a la masse critique, mais les personnes qui utilisent leur voiture opteront-elles pour le métro comme moyen de transport ? » se demande-t-il.
Pierre Dinan estime qu’il faudra changer les habitudes. Il est d’avis que le péage serait la solution, comme l’a fait le Singapour. « Le gouvernement aurait-il le courage de le faire ? Je n’en sais rien », déclare notre interlocuteur.
Projets de RAMGOOLAM : être moins sévère envers les fumeurs de cannabis
Tout en reconnaissant qu’il faudra être plus dur envers la drogue synthétique, le leader du Parti Travailliste considère qu’il faut être moins sévère envers les fumeurs de cannabis. C’est, du moins, l’une des mesures que Navin Ramgoolam a annoncée à Port-Louis.
Kunal Naik : «Moins de personnes opteront pour les drogues dures»
Le chargé de plaidoyer chez Prévention, information et lutte contre le Sida (PILS) estime que cette mesure est « définitivement réalisable ». « Maurice étant un petit pays, on peut mettre sur pied un système inspiré des autres modèles à travers le monde », rappelle Kunal Naik, tout en précisant que même l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a recommandé la reclassification du cannabis.
Selon Kunal Naik, il faut changer le regard sur le cannabis. Il affirme que, depuis des années, de fausses informations ont été véhiculées, mais des études ont démontré que le cannabis n’est pas dangereux. « Il a été démontré que, là où il y a eu une relaxation dans les lois autour du cannabis, moins de personnes vont vers les drogues dures », accentue le chargé de plaidoyer.
Il ne manque pas de souligner que le cannabis médicinal commence aussi à prendre de l’ampleur. Et il se dit convaincu que cette mesure portera ses fruits, si on trouve un système calqué sur les réalités mauriciennes et si on respecte les évidences scientifiques.
La baisse du prix des carburants
Autre mesure de l’ancien Premier ministre qui n’a pas laissé insensible : la baisse du prix des carburants.
Megh Pillay : «La marge de manœuvre reste la taxation»
Aux dires de l’ancien directeur de la State Trading Corporation (STC), nos taxes sur l’essence et le diesel sont particulièrement lourdes par rapport au prix à l’importation. « Si on décide de réduire les prix à la vente de ces produits, on jouit d’une marge de manœuvre très large pour le faire, et cela qu’importe le cours mondial du baril », explique Megh Pillay.
Selon ses explications, à l’importation un litre d’essence coûte environ Rs 16 à la STC (coût, assurance et fret compris). Il est vendu à Rs 47,00. Ce prix comprend Rs 26,85 de taxe. Donc, la différence représente les frais et marges de profits de toute la filière : compagnie pétrolière, stockage, transport, pompiste, etc. De même pour le diesel, qui ne coûte que Rs 17,80 à l’importation, et qui est pourtant vendu à Rs 38, avec Rs 14,40 de taxes par litre.
« Il est évident que ce niveau de taxation permet à tout gouvernement qui le souhaite de réduire le prix à la pompe, s’il décide fermement de le faire », signale Megh Pillay. Toutefois, il s’interroge : « Comment compenser toute baisse de ses revenus sous cet item dans son budget, c’est une toute autre question », dit-il.
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