Aveugle et à la tête d’une PME - Sanjay Brambodary : un artisan guidé par l’esprit d’entreprise

À l'âge de 57 ans, Sanjay Brambodary reste un homme déterminé malgré les épreuves de la vie. Ce père de quatre enfants, et son épouse Gina, tous deux aveugles, font preuve d'une volonté exceptionnelle. Résidant à Bambous, le quinquagénaire incarne la persévérance et le désir de conquérir les obstacles liés à son handicap visuel. Il y a plusieurs années de cela, il s’est lancé dans la création de produits en rotin. Aujourd’hui, il est à la tête d’une PME. 

Sa vie est loin d’être un fleuve tranquille. Bien au contraire, elle a été toujours remplie de défis et d’obstacles. Pourtant, au lieu de se lamenter et de jeter les armes, Sanjay Brambodary a fait preuve de résilience et de patience. 

En effet, enfant, a eu des problèmes de santé qui ont gravement affecté sa vue. « C’est à l’âge de 7 ans que je suis devenu aveugle. Je souffrais de fièvre et de convulsion. Cela a affecté ma vue. Je suis resté à la maison pendant cinq ans. J’ai suivi plusieurs traitements médicaux, en vain », raconte notre interlocuteur. 

C’est finalement à l’âge de 13 ans que Sanjay Brambodary a intégré une école pour aveugle. Toutefois, son parcours scolaire n’a pas été long. « À 15 ans, j’ai arrêté l’école et j’ai décidé de me lancer dans le monde du travail. J’ai cherché des petits boulots. À cette époque, il était difficile de trouver du travail dans des usines. Elles ne donnaient pas la chance aux personnes ayant un handicap », raconte-t-il. 

Toutefois, son chemin a pris un tournant en 1987 lorsqu'il a découvert sa passion à l'école pour aveugles. Là, il a commencé à travailler le rotin, développant des compétences précieuses au cours des cinq années qui ont suivies. Depuis, il caressait le rêve d’avoir un jour son propre atelier et sa petite entreprise. En Reynold Permal, de Lizie Dan La Main, lui propose du travail au sein de l’atelier de l’association. Sanjay Brambodary y travaille pendant une année. 

Il finit par partir voulant voler de ses propres ailes. Le parcours entrepreneurial du quinquagénaire n'a pas été sans embûches. Malgré des hauts et des bas, notamment une tentative de création d'une coopérative sociale avec des camarades de la région, Sanjay Brambodary a continué à persévérer. « En 1994, j’ai créé une coopérative avec l’aide de mon épouse qui avait appris le braille. Toutefois, au bout de trois à quatre ans, ce projet a capoté et on a dû mettre la clé sous le paillasson. J’ai compris que le business et le social ne font pas bon ménage », se rappelle-t-il. 

Après quoi, l’habitant de Bambous décide de se mettre à son propre compte. Il n’a pas voulu êtes découragé par ses expériences passées. N’ayant pas les moyens de louer un emplacement, il commence à travailler dans sa maison. « J’avais une terrasse que j’ai convertie en atelier. J’achetais une livre ou deux de rotin. Je créais mes produits. De bouche à oreille, je me suis fait une clientèle. C’est là que mon business a commencé à grandir. J’avais des camarades qui travaillaient avec moi. Je les payais pour chaque travail effectué », poursuit notre interlocuteur. 

Davantage de Commandes

Il a continué à développer son activité depuis chez lui, mettant un acharnement particulier à perfectionner son artisanat. « Au fil du temps, on avait davantage de commandes avec des hôtels et des contracteurs. La terrasse est devenue un store. On travaillait dans la cour en plein air. Malgré les difficultés, j’ai continué à persévérer », relate ce dernier. 

Sanjay Brambodary se souvient que l'année 2007 a apporté son lot de défis avec le passage du cyclone Gamede, qui a détruit son atelier. Cependant, grâce à la solidarité et à l'aide d'une personne bienveillante, il a pu reprendre ses activités. « Il y a un monsieur qui faisait mes courses. Il m’a proposé la maison de sa fille et de son gendre pour poursuivre mon activité en attendant que je trouve un lieu », confie-t-il.

Quatre enfants à l'Université

Aspirant à de grandes choses, l’habitant de Bambous contracte des emprunts pour agrandir son business, dont sa maison qui fait office d’atelier, mais, le projet n’aboutira pas. « Entre-temps, nos quatre enfants ont commencé l’université. Il y avait d’autres dépenses. Malgré les hauts et les bas, ‘nou manz ar li’. Tout en gardant espoir que mon rêve se concrétisera un jour », dit-il. 

Sanjay Brambodary ne se contente pas de créer des produits en rotin. Il conçoit de véritables œuvres d'art. Sa passion pour l'artisanat est évidente dans son engagement envers la qualité. « Je refuse que les gens achètent par pitié en raison de mon handicap, préférant qu'ils le fassent pour la qualité de mes créations », souligne notre intervenant. Il est exigeant envers lui-même, refusant d'accepter quelque chose de moindre que la perfection.

 « Les débuts ont été difficiles. On a commencé avec zéro sou. Au fil des années, on a pu investir dans des machines. Je pense vraiment qu’il faut faire des efforts si on veut réussir. D’ailleurs, malgré mon handicap, j’ai toujours été animé par cette envie d’avancer et de progresser. Il faut aussi aimer ce qu’on fait. Travailler le rotin n’est pas donné à tout le monde. Il faut de la patience et un savoir-faire hors pair. Aussi, il ne faut pas mettre l’argent en avant. C’est important, mais sans plus », soutient-il. Sanjay Brambodary se dit fier d’être devenu un exemple pour sa famille. « Bien que nous soyons aveugles, nos enfants sont fiers de mon épouse et de moi. Nous menons une vie normale. Mon épouse s’occupe des enfants comme n’importe quelle maman. Elle m’aide aussi à l’atelier où nous disposons des équipements adaptés aux aveugles comme des mètres à ruban en braille, entre autres », avance le quinquagénaire. Depuis l’année dernière, une fille de Sanjay Brambodary a décidé d’épauler son père. 

C’est ainsi qu’elle a enregistré la PME « Doux Rattan Brambodary Ltd ». Il espère que sa compagnie continuera à grandir et qu’il disposera de fonds pour acheter davantage d’équipements. Son histoire est un exemple inspirant de détermination et de résilience, démontrant que la passion et la persévérance peuvent surmonter les défis les plus ardus. Sanjay Brambodary n'est pas simplement un artisan talentueux du rotin, mais un modèle de réussite. Il prouve que l'art transcende l'obscurité et que la volonté de surmonter les obstacles conduit à des réalisations exceptionnelles.