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Audrey d’Hotman Desjardins, assistante sociale : «Les Mauriciennes sont loin d’être des vases à fleurs»

Audrey d’Hotman Desjardins est assistante sociale et psychothérapeute.

Les femmes représentent 51 % de la population de la République mauricienne. Et pourtant, leurs voix sont à peine représentées au parlement (12 %), là où se décident les règles de notre vivre-ensemble. « La majorité traitée en minorité, un joke ! » lance Audrey d’Hotman Desjardins, assistante sociale, psychothérapeute et, surtout, une citoyenne à part entière de Maurice. Pour elle, si les femmes ne sont pas représentées au Parlement, elles ne pourront pas faire entendre leur voix, leurs choix et leurs idées. 

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En quoi avoir une candidate dans chaque circonscription du pays serait intéressant ? « Ça ne serait pas ‘intéressant’, mais définitivement une condition sine qua none pour que je vote pour un parti politique quelconque cette année. Cela suffit les excuses pour ne pas présenter au moins une femme candidate par circonscription ! » répond-elle. 

Face à la sous-représentation des femmes en politique, un meilleur quota changerait-il la donne ? « Placez 35 femmes au Parlement, dont 10 ministres au Cabinet, et vous constaterez une différence notable dans le ton et la substance des débats parlementaires. Consultez Internet et observez les diverses assemblées parlementaires des pays, comparez celles où il y a une parité des genres et celles où les hommes sont majoritaires, et vous verrez les résultats », réplique-t-elle. 

Audrey d’Hotman Desjardins rappelle également l’existence d’études probantes sur la qualité de la gestion des organismes dont les comités d’administration sont plus diversifiés. « Nous avons même un Code de bonne gouvernance nationale. Cela prouve que la diversité des genres et des compétences est cruciale pour toute gouvernance, surtout celle d’un pays. »

Et que répond-elle à ceux qui critiquent la prétendue « médiocrité » des femmes candidates ? « Comment attendre d’elles un avis différent si elles sont isolées ? Dans quelle structure une ou deux voix dissidentes peuvent-elles se faire entendre ? » fait-elle ressortir. Selon Audrey d’Hotman Desjardins, à 30 %, nous pourrions avoir un début d’influence intéressant, mais à 50 % de présence féminine au Parlement, le changement serait inévitable.

Et quel « type » de candidates pour une meilleure représentation féminine ? « Quand vous employez quelqu’un pour un job, vous regardez ses compétences, ses expériences prouvées ainsi que ses valeurs et son honnêteté, non ? Alors, pour quelqu’un qui va gérer en mon nom la nation, j’applique la même rigueur », indique-t-elle. 

Les candidats, hommes et femmes, se présentent à la population pour solliciter sa confiance et son vote. À ce titre, elle estime qu’il est nécessaire de les soumettre à un entretien approfondi sur leurs compétences et leurs intentions pour le pays. 

D’ailleurs, explique l’assistante sociale, tout politicien a le devoir de travailler au bien-être de la population, pas seulement les femmes politiciennes. « Avoir une égalité des genres au Parlement, c’est pour assurer une meilleure qualité de gestion de notre pays. » Et d’ajouter : “If you keep doing what you have been doing, you will keep getting what you have been getting.”

Audrey d’Hotman Desjardins rappelle que les femmes ont initié de nombreux changements en politique, mais sont encore trop peu entendues au Parlement. Pourtant, elles sont nombreuses, au gouvernement et dans les ONG, à rédiger et influencer les dossiers envoyés au Parlement. « Les Mauriciennes sont loin d’être des vases à fleurs, et sont même extrêmement compétentes. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est l’université de Cambridge, entre autres. »

Une femme qui ose et qui réfléchit fait plus de poids ? « Pas plus, mais différemment. Le but n’est pas de ‘gagner’ au Parlement, mais bien de discuter de différents points de vue et d’arriver à des consensus acceptables pour le plus grand nombre. » La paix, le vivre-ensemble auquel nous aspirons tous, c’est ainsi que nous l’obtenons, et non pas dans une bataille rangée de gagnants-perdants, souligne-t-elle. 

N’empêche qu’il existe des freins à une meilleure participation des femmes en politique. Audrey D’Hotman Desjardins nuance. Si elle parle de l’« abjecte maltraitance verbale » dont elles sont victimes, et de la pression des candidats masculins, elle reconnaît qu’il y a un sujet qui fâche : l’argent. « L’accès aux millions qu’il faut pour obtenir sa candidature au sein des partis n’est pas à la portée de beaucoup de femmes. »

Donc, l’heure est au changement pour un meilleur avenir ? « Le propre de l’humain est d’aspirer au mieux, toujours. Alors le désir de changement est une constante, peu importe les époques et les gouvernants. » Quelles devraient être les priorités ? Si les femmes parlementaires ont le même travail que les hommes parlementaires, elle s’attend toutefois à ce qu’elles utilisent leurs expériences différenciées de femme, mère, partenaire et autre pour faire réfléchir différemment sur les besoins de la moitié de notre peuple. 

Aux dirigeants des partis politiques, Audrey D’Hotman Desjardins veut dire : « C’est du ‘bull....’ cet argument qu’on ne trouve pas de femmes ou de femmes compétentes à mettre comme candidates dans chaque circonscription. » Elle les invite à consulter la liste des femmes volontaires à travailler sur des Boards of Companies sur le site du Board of Good. « Il y a des CV longs comme le bras, et dans tous les domaines de compétences. De plus vous avez eu 56 ans pour éduquer et accompagner les femmes membres de vos partis, alors il n’y a plus d’excuses ! » 

 

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