
Maurice fait face à une pénurie de main-d’œuvre locale. Un constat s’impose : l’économie ne pourra tenir sans travailleurs étrangers, malgré les défis sociaux et réglementaires.
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L’émission « Au cœur de l’Info », animée mercredi 3 septembre par Patrick Hilbert, s’est penchée sur les prochaines Assises du travail prévues ce mois-ci. Autour de la table, le constat a été unanime : face à l’exode des jeunes, au vieillissement de la population et à un faible taux de natalité, Maurice ne pourra échapper à un recours accru à la main-d’œuvre étrangère.
Sur le plateau, se sont succédé des voix issues de différents horizons : Adilla Diouman-Mosafeer, directrice de Talent Lab et spécialiste en ressources humaines, l’entrepreneuse Thelma Maharaullee, et Manish Bundhun, Chief People Executive du groupe Eclosia. Reza Uteem, ministre du Travail, et la syndicaliste Jane Ragoo, de la Confédération des travailleurs des secteurs public et privé (CTSP), sont intervenus au téléphone.
Adilla Diouman-Mosafeer a insisté sur l’importance de valoriser les travailleurs étrangers, essentiels à la vie quotidienne : « Comment va-t-on avoir le pain le matin sans eux ? Il est vrai que le sourire des Mauriciens est irremplaçable, mais il se perd. »
Pour elle, l’émigration des jeunes est devenue inévitable : « Il y a une fuite des cerveaux et c’est tout à fait normal, car les jeunes vivent dans un autre monde, ils veulent avoir accès à tout et vite. »
Même constat du côté de Manish Bundhun, pour qui la mobilité est désormais une réalité incontournable : « L’émigration circulaire est devenue normale, le monde se globalise et notre pays a besoin d’une main-d’œuvre meilleur marché que la nôtre. Nos jeunes diplômés ne veulent pas embrasser certains emplois qui ne sont pas rémunérateurs, alors qu’ils peuvent en avoir beaucoup plus ailleurs. »
Le ministre du Travail, Reza Uteem, a concédé le changement de mentalité chez la jeune génération : « Les jeunes ont envie d’un travail qui leur permette d’avoir une vie sociale, de ne pas travailler la nuit. Ils aiment avoir un temps pour le travail et un autre pour la famille, et c’est pour cela que les travailleurs étrangers sont importants. »
Tout en reconnaissant leur rôle clé, il a toutefois lancé une mise en garde : « Mon ministère veille au grain. On ne peut plus accepter des travailleurs étrangers qui ne sont pas des professionnels. Il faut les identifier pour éviter le mismatch, même s’ils sont essentiels. »
PME et grandes entreprises : deux réalités
Pour l’entrepreneure Thelma Maharaullee, la question doit être abordée avec nuance, en tenant compte de la taille des entreprises : « Le gouvernement devrait faire une différence entre les PME et les grosses entreprises. Ce n’est pas qu’on ne veut pas suivre le pas, mais la situation financière n’est pas la même. Le temps qu’on fasse les salaires, qu’on paie les congés de maternité et de paternité, les heures supplémentaires… Souvent, en tant que patrons, on est les derniers servis, et parfois pas du tout. »
La syndicaliste Jane Ragoo, du CTSP, a été la plus directe : « Le pays a besoin de plus de 100 000 travailleurs étrangers. » Elle a rappelé que, selon la loi, les expatriés doivent bénéficier des mêmes droits que les travailleurs mauriciens : « Tous les travailleurs étrangers qui viennent chez nous doivent bénéficier des mêmes droits que les Mauriciens, sans distinction. »
Si les invités n’ont pas tous la même approche, un constat clair ressort des débats : Maurice ne pourra maintenir son économie sans ouvrir plus largement ses portes aux travailleurs étrangers. La question des conditions, de la qualification et de l’équité de traitement reste cependant au cœur des préoccupations.

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