Au Cœur de l’Info - Lutte contre la drogue : place à une nouvelle approche

Face à l’échec de la répression, le combat contre les drogues pourrait prendre un nouveau tournant. Lors de l’émission Au cœur de l’info, des spécialistes ont plaidé pour explorer d’autres pistes, comme la dépénalisation ou la légalisation du cannabis, pour freiner la progression des drogues synthétiques.

Les invités, l’addictologue Kunal Naik, le psychiatre Taroonsingh Ramkoosalsing et Percy Yip Tong, cofondateur du Collectif Urgence Toxida (CUT), ont expliqué qu’il faut cesser de diaboliser le cannabis. Selon eux, la dépénalisation ou la légalisation de cette substance ne provoquerait pas une hausse de sa consommation. Ils ont fait remarquer que, bien que la cigarette et l’alcool soient légaux à Maurice, tout le monde n’en consomme pas. 

Les spécialistes rappellent que le cannabis est moins nocif et crée moins de dépendance que la cigarette ou l’alcool. Seuls 15 à 20 % des consommateurs développent une problématique liée à cette drogue, alors que les produits de synthèse provoquent beaucoup plus de cas d’addiction. 

« Avec le cannabis, il y a peu d’hospitalisation en cas d’abus. En revanche, avec les drogues synthétiques, les consommateurs peuvent présenter de graves problèmes de santé, parfois mortels », a fait ressortir le psychiatre Taroonsingh Ramkoosalsing. Il a ajouté qu’au Brown Sequard Mental Health Care Centre, les deux salles d’une soixantaine de lits autrefois réservées aux personnes dépendantes de l’alcool accueillent désormais des consommateurs de drogues synthétiques.

Dépénalisation 

De son côté, l’addictologue Kunal Naik estime que l’alcool est plus dangereux que le cannabis contrôlé, contenant un faible taux de tétrahydrocannabinol (THC). Ce dernier constitue, selon lui, un produit plus « propre » que les drogues synthétiques, dont la composition est souvent douteuse. Le Dr Ramkoosalsing a précisé qu’il est difficile de sevrer un consommateur de drogues synthétiques.

Pour Percy Yip Tong et Kunal Naik, la dépénalisation et la légalisation du cannabis représenteraient un moindre mal pour contrer les ravages des drogues synthétiques. Une telle approche, encadrée par une réglementation stricte, permettrait de restreindre le trafic de drogue, bien qu’il ne sera pas possible d’éradiquer complètement le problème des drogues synthétiques dans l’immédiat. Toutefois, cette mesure pourrait constituer une forme de réduction des risques, comme ce fut le cas face au VIH/sida avec l’introduction du programme d’échange de seringues.

Le Junior Minister Kugan Parapen a souligné que s’il n’y avait pas de problème de drogue à Maurice, le débat sur la dépénalisation ou la légalisation du cannabis n’aurait pas lieu d’être. Selon lui, il faut aborder la question sans préjugés, afin de permettre un débat dépassionné et constructif.