Arvind Nilmadhub est catégorique. L’augmentation des salaires dans le secteur public n’était pas nécessaire.
Dans cet entretien, l’économiste explique les raisons derrière un tel argument tout en préconisant la mise en place d’une institution qui englobera à la fois le Pay Research Bureau et le National Remuneration Board.
C’est désormais officiel. Les fonctionnaires toucheront une augmentation variant entre 6,5 % et 10,4 %. Est-ce un taux raisonnable, comme avance-t-on du côté du gouvernement ou un taux insuffisant, comme le clament les syndicalistes ?
C’est plus que suffisant. Je vais polémiquer un peu sur ce sujet. Cette augmentation n’était pas nécessaire. Je m’explique. Chaque année, le salaire est ajusté en se basant sur le taux d’inflation. Et depuis quelques années, le taux de croissance est resté plus au moins stable, avoisinant les 3%. Est-ce que cette augmentation justifie une croissance constante de l’économie ? Si, on avait découvert une réserve de pétrole et qui génère des emplois favorisant ainsi une augmentation drastique du taux de la croissance économique à Maurice, le PRB aurait certainement été une sorte de récompense pour les fonctionnaires.
Le rapport du PRB 2016 coûtera Rs 3 milliards par an au gouvernement. Quel impact sur les finances publiques et le Budget ?
Je pense que les Rs 3 milliards ont déjà été comptabilisées dans le Budget du gouvernement. Cependant, comme je viens de le dire, je pense que cette somme aurait pu être utilisée à bon escient. Avec les problèmes de congestion, d’accidents et d’ordre social qu’apporte une économie en développement tel que la nôtre, l’argent ne fait pas le bonheur. Le gouvernement aurait bien pu utiliser cette somme pour résoudre le problème de congestion, par exemple. Imaginez si un fonctionnaire arrive à temps sur son lieu de travail sans qu’il ne soit bloqué dans la circulation, cela va définitivement augmenter sa productivité et, par ricochet, il aurait pu donner un meilleur service au public.
[blockquote]« Si le gouvernement décide de faire un audit des compétences de chaque fonctionnaire, on verra peut-être que des gens sont récompensés pour leur appartenance politique. »[/blockquote]
[row custom_class=""][/row]
Pour un certain nombre d’observateurs, le présent rapport du PRB a le mérite de réduire l’écart entre ceux en haut de l’échelle salariale de la Fonction publique et ceux qui touchent des bas salaires. Vos commentaires…
L’écart diminue certes, mais il faut qu’il y ait une discrimination positive. Si le gouvernement décide de faire un audit des compétences de chaque fonctionnaire, on verra peut-être que des gens qui méritent un meilleur salaire ne sont pas récompensés alors que d’autres oui, en raison de leur appartenance politique.
Le rapport du PRB doit-il, selon vous, être publié chaque trois ans ou cinq ans ?
Je suis plutôt pour une institution qui englobe le Pay Research Bureau (PRB) et le National Remuneration Board (NRB) et qui publie un rapport, en toute transparence, chaque 5 ans. Comme je l’ai mentionné, ces trois dernières années, on a eu une croissance avoisinant 3 %. Et ce sont les fonctionnaires qui sont récompensés pour leurs efforts. Le secteur privé, qui englobe plus de 300 000 travailleurs, n’a-t-il pas droit à une récompense de l’État ?
Selon vous, l’introduction d’un nouveau système de détermination de salaires et conditions de travail qui engloberont à la fois le PRB et le NRB permettrait d’avoir une certaine uniformité au niveau du salaire…
Aujourd’hui, quand quelqu’un postule pour un emploi dans le secteur public, il sait exactement quel salaire il touchera. Souvent, ce n’est pas le cas dans le privé. Une institution commune, qui englobe le PRB et le NRB, et surtout indépendante, sera le précurseur pour la réduction de l’écart des salaires entre le secteur privé et le secteur public. D’ailleurs avec cette institution, chaque poste aura un barème de salaire et ce sera au secteur public ou privé de décider de la marche à suivre.
Après la publication de chaque rapport du PRB, des voix s’élèvent pour soutenir que les fonctionnaires soient plus performants et que le secteur public devienne plus efficient. Faudrait-il, selon vous, imposer des paramètres pour atteindre de tels objectifs ?
Justement, il faut impérativement qu’il y ait des paramètres tels que la croissance, le traitement du nombre de doléances et leur réduction, entre autres.
Parlons du secteur privé. L’introduction du salaire minimal est-il suffisant pour réduire l’écart des salaires dans le public et le privé ?
Certainement pas ! Mais, ce sera un début. Et c’est surtout une institution commune, qui englobe le PRB et le NRB, qui en sera le précurseur et apportera l’uniformité des salaires.
Revenons au salaire minimal. Quel montant préconisez-vous et pourquoi ?
Je ne vais pas me prononcer là-dessus, car il y a tout un travail derrière que les fonctionnaires et le secteur privé sont en train de faire pour arriver à un barème. N’oublions pas que beaucoup d’entreprises seront sévèrement affectées par l’introduction du salaire minimal. D’où, peut-être l’idée d’avoir une institution commune pour le PRB et le NRB, qui aurait été mieux placée pour trouver une solution à la réduction de l’écart de salaires.
Carte de visite
Agé de 34 ans, Arvind Nilmadhub est détenteur d’un BSc Statistics and Economics et d’un MSc en ‘Applied Economics’ avec spécialisation en ‘Economic Policy and Development’ de l’Université de Maurice. Il compte plus de 10 ans d’expérience dans le secteur public et privé. Il a démarré sa carrière en 2004 en travaillant au ‘Board of Investment’. Il faisait partie de l’équipe qui a travaillé sur la ‘Business Facilitation Act 2006’. En 2010, Arvind Nilmadhub intègre le British American Investment (Mtius) en tant qu’’Economist/Research Analyst’ avant de ne joindre Iframac et d’assumer le poste de ‘Head of Business Intelligence’ dans une société de ‘global business’ ayant des bureaux à Prague, Canada, Londres et Maurice. Arvind Nilmadhub est actuellement ‘Executive Director’ au sein de la firme de consultant Afribrains Ltd.Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !