Interview

Arvin Boolell : «La commission d’enquête est un ‘eyewash’»

Arvin Boolell

Il n’est pas satisfait des attributions de la commission d’enquête instituée par le gouvernement. Pour Arvin Boolell, « elles auraient dû être plus larges pour toucher non seulement l’ex-Présidente, mais également l’homme d’affaires angolais Alvaro Sobrinho ». Sinon elle ne servira à rien, estime le député rouge de la circonscription no 18 (Belle-Rose / Quatre-Bornes)

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« La faute d’Ameenah Gurib-Fakim, c’est la trahison. C’est comme un coup d’État de palais »

Enfin une commission d’enquête comme le réclamait à tue-tête l’opposition. Le Premier ministre vous a bien eu…
Pas du tout. Les terms of reference (attributions) de cette commission d’enquête ne sont pas assez larges. Alvaro Sobrinho a été au centre de cette saga  et il n’est même pas concerné par cette commission d’enquête… Le Premier ministre a raté sa sortie. C’est un trompe-l’œil. Cet homme est la force centrifuge. Confier cette partie importante à la commission anticorruption ne servira à rien.

Cela vous étonne-t-il que la commission d’enquête ne vise que l’ex-présidente de la République ?
Je me demande pourquoi cibler seulement Ameenah Gurib-Fakim. Les terms of reference sont très limités. Ils ne sont pas en ligne avec les principes de transparence. J’espère que le Premier ministre reviendra à de meilleurs sentiments et étendra les attributions de cette commission.

L’une des attributions porte sur l’identification des personnes qui auraient été derrière la démarche de l’ex-Présidente de nommer la commission d’enquête jugée anticonstitutionnelle. Est-ce faisable et légal ?
Personne ne peut obliger Ameenah Gurib-Fakim à dévoiler l’identité de ceux qui l’ont aidée à rédiger le document incriminé. De toutes les façons, cette commission d’enquête est un eyewash. C’est le sentiment général. Sur le principe, on est d’accord pour une commission d’enquête, mais avec de plus vastes attributions. Il faut donner l’opportunité à tous ceux concernés de près ou de loin par cette affaire de déposer.

L’ex-Présidente a-t-elle fauté sur le fond ?
Ameenah Gurib-Fakim, dans la façon dont elle a procédé, a gaffé. Sa faute, c’est la trahison. C’est comme un coup d’État de palais.

Mardi prochain, vous ferez votre grand retour à l’Assemblée nationale. Quel est votre sentiment ?
Cela me fait chaud au cœur. D’autant plus que c’est le vœu de l’électorat. Les gens veulent retrouver de la sérénité dans l’hémicycle. La partielle au no 18 a donné la chance de rectifier le tir. C’est un avertissement que l’électorat a lancé au gouvernement.

Est-ce que vous avez une stratégie spécifique pour ce grand come-back ?
Sur le fond, l’opposition s’organise. Il y a une cohésion, une convergence pour acculer le gouvernement. Sur la forme, il faut être au-dessus des partis politiques. L’ensemble de l’opposition doit agir comme une force positive. Ainsi, cette volonté sera comme une énergie foudroyante qui fera entendre la voix de l’électorat.

Pourtant, le Mouvement militant mauricien (MMM) ne s’est pas joint à la plateforme commune qu’ont constitué  le Parti mauricien social-démocrate, le Parti Travailliste  et le Mouvement Patriotique. Les mauves préfèrent faire cavalier seul…
Il faut éviter cette approche partisane. L’objectif est le même pour tous les partis de l’opposition, soit acculer le gouvernement. Par exemple, sur le dossier Alvaro Sobrinho, toute l’opposition insiste pour qu’il y ait une commission d’enquête. Pas celle qu’on vient de nommer. Sur la forme, il y a un shadow boxing, mais sur le fond nous partageons les mêmes objectifs.

Dans sa stratégie, l’opposition semble principalement viser le Muvman Liberater (ML). Pourquoi ?
L’opposition est là pour faire son travail. Rajesh Bhagwan, dirigeant du MMM, a déclaré que l’objectif principal est d’acculer le gouvernement dans son ensemble, y compris le ML de Collendavelloo. Il n’y aura pas de voix discordantes entre nous. Il est clair qu’il y a discordance entre le Mouvement socialiste militant et le ML. Il y a une différence fondamentale entre eux. L’étincelle est là. La preuve  :  Sangeet Fowdar (député du ML) a réclamé, tout comme l’opposition, une commission d’enquête sur Alvaro Sobrinho. Le Premier ministre l’a dit lui-même, il est en présence de damning evidence contre Ameenah Gurib-Fakim. Au nom de la transparence, il faut rendre publiques ces preuves et donner la chance à la dame de s’exprimer.

Allez-vous ravir la place de Shakeel Mohamed à la tête des parlementaires rouges ?
Ce sera une politique de rupture. J’ai pris un engagement et je compte le respecté. Il n’y a aucune raison que je prenne la place de Shakeel Mohamed. J’agirai comme un mentor.

Est-il normal dans les circonstance qui entourent son départ que l’ex-Présidente garde ses privilèges ?
Si elle est trouvée coupable, elle ne le devrait pas. Cependant, au nom de la transparence et dans l’intérêt public, cette commission d’enquête ne doit pas viser uniquement Ameenah Gurib-Fakim, mais surtout Alvaro Sobrinho. Il faut étendre ses attributions afin de toucher également la Banque centrale, la Financial Services Commission  et le Board of Investment. Il y va de notre réputation.

Peut-on forcer Alvaro Sobrinho à déposer devant la commission d’enquête ?
Il aura l’obligation morale et légale de venir déposer s’il est convoqué par la commission.

Quel est votre sentiment personnel sur le départ de l’ex-Présidente ?
Qu’elle soit partie est un soulagement. Elle ne s’est pas pliée à la Constitution.

 

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