Kamil est arrivé à Maurice la veille du meurtre de sa mère Beebee Razeeyah Nuther Saib. Mais il n’a pas eu le temps de la voir. Cette ancienne Senior Inspector, passionnée de randonnées et de trails, a été retrouvée morte à son domicile à Rose-Hill. Son fils réclame justice. Deux suspects ont été arrêtés : Jansen Kervin Somadoo et Elsa Marie Jamillah Sylvio.
Ce que ressent Kamil aujourd’hui, c’est un immense chagrin, de la colère, mais aussi et surtout du regret… « Mo pann resi zwenn mo mama », dit-il d’une voix écrasée par la tristesse dans une déclaration accordée à Le Dimanche/L’Hebdo. Sa mère Beebee Razeeyah Nuther Saib, 70 ans, a été retrouvée morte chez elle à Rose-Hill, mercredi.
Kamil raconte qu’il est arrivé à Maurice le samedi 23 mars 2024 depuis Dubaï où il vit, soit la veille du meurtre de sa maman. Il confie qu’il a essayé de la joindre au téléphone. Mais ses innombrables appels sont restés sans réponse, car le téléphone était éteint. Rongés d’inquiétude qu’elle ne donne plus signe de vie, mercredi, les proches de la septuagénaire ont demandé à la police de Stanley d’intervenir.
Razeeyah Nuther Saib avait une riche carrière dans l’éducation publique, avant d’accéder au poste de Senior Inspector avant son départ à la retraite. Kamil garde de sa maman le souvenir d’une femme qui croquait la vie à pleines dents et d’une passionnée de randonnées, de natation et surtout de trails malgré son âge.
D’ailleurs, elle devait bientôt participer à un énième trail. « La semenn dernie, li ti anrezistre li pou partisip enn Trail. Mo ti dir li : ‘Ma, 70 zan to ena’. Me li ti motive », raconte Kamil. « Mo mama ti pe bien swagn so alimantasion ek li ti pe konsey ousi lezot lor benefis enn bon alimantasion », ajoute-t-il.
Ce que confirment des habitants de la route Boundary, à Rose-Hill, qui l’ont côtoyée. « Li pa ti fer so laz. Li ti enn madam ki ti pe bien pran kont so alimentasion ek so lasante. Li ti bien gard so lalign », disent-ils.
Le 12 mars 2024, Razeeyah Nuther Saib avait participé à une randonnée au château de Riche-en-Eau. Fin février 2024, elle avait atteint le sommet de la montagne du Corps-de-Garde. En août 2021, elle avait réussi à parvenir jusqu’au sommet de la montagne Trois-Mamelles.
C’est mercredi, en fin d’après-midi, que la police de Stanley a débarqué au domicile de la septuagénaire après avoir été alertée par ses proches. La voiture n’était pas là, laquelle sera retrouvée par la police plus tard, soit jeudi, abandonnée dans une rue à Rose-Hill. « Zonn fini touy li depi dimans. Zonn servi so loto pou deplas bann zafer », confie Kamil.
Une fenêtre de la maison était entrouverte. Une odeur nauséabonde se dégageait des lieux. La police a constaté, en premier lieu, un désordre indescriptible sur place. Puis, les officiers ont vu que la porte principale n’était pas verrouillée et ils n’ont vu aucun signe de Razeeyah Nuther Saib.
Ensuite, les policiers ont accédé à l’intérieur. Dans une des chambres, ils ont découvert le cadavre de la victime gisant dans une mare de sang. Diverses unités de police ont été appelées en renfort, de même que le Dr Sudesh Kumar Gungadin, chef du département médico-légal de la police. Ce dernier a constaté de prime abord qu’il s’agissait d’un foul play.
La Major Crime Investigation Team, dirigée par le surintendant Seebaruth et l’inspecteur Deewoo, ainsi que l’escouade du sergent L’Aiguille, de la Criminal Investigation Division de Stanley, ont démarré leurs investigations sur le terrain dès mercredi soir. Ils ont arrêté un premier suspect. Il s’agit de Jansen Kervin Somadoo.
Durant son interrogatoire, cet homme de 24 ans a avoué avoir agressé mortellement Razeeyah Nuther Saib. Il a avancé que le motif serait lié à des vols. Le suspect, dont la demi-sœur vit à l’étage de la maison de la septuagénaire comme locataire, a soutenu avoir cambriolé cette maison en trois occasions, emportant le téléviseur et la voiture de la victime, entre autres. Mais cette semaine, lorsqu’il s’est introduit par effraction dans la maison, il s’est fait surprendre par la retraitée. Il dit avoir alors lutté avec la victime avant de l’étrangler.
Abdul Samad, ex-époux de la septuagénaire : «Des députés parmi ses élèves»
Razeeyah Nuther Saib, qui vivait séparée de son époux Abdul Samad, laisse derrière elle deux fils. Après avoir appris la tragédie, il a fait le déplacement sur le lieu du crime, mercredi soir. Il garde de la septuagénaire le souvenir d’une intellectuelle. « Elle était très joviale et amicale. C’était une enseignante passionnée. Certains de ses élèves sont devenus des députés. Elle a influencé ses élèves tant sur le plan académique que dans leur apprentissage de la vie », indique Abdul Samad.
Le présumé meurtrier se rétracte et incrimine sa demi-sœur
Après ses aveux, Jansen Kervin Somadoo a été provisoirement inculpé de meurtre lors de sa comparution devant le tribunal de Rose-Hill, le jeudi 28 mars 2024. Mais un développement de taille est survenu dans le cadre de l’enquête, vendredi.
Le jeune homme est revenu sur ses aveux. Cette fois, il a incriminé sa demi-sœur Elsa Marie Jamillah Sylvio, âgée de 19 ans, comme étant celle qui a agressé mortellement la victime. Il a précisé que c’est sa demi-sœur qui lui a demandé d’endosser la responsabilité du drame : « Mo demiser finn dir mwa pran sarz la. »
Vendredi, le sergent L’Aiguille et ses hommes ont appréhendé Elsa Marie Jamillah Sylvio. Le samedi 30 mars 2024, elle a comparu devant la justice. Elle a été inculpée de meurtre. Durant son interrogatoire, elle a rejeté en bloc les accusations portées contre elle par son demi-frère. La police poursuit ses investigations pour élucider ce crime.
Avec l’arrestation de ces deux suspects, Kamil réclame justice pour sa mère : « Mo espere lazistis bizin donn enn santans bien sever. Mo mama ti aze ek san defans. Lalwa bizin bien sever. »
Charles Cartier, CEO d’Air Mauritius : « J’ai eu l’honneur de coacher Razeeyah en course à pied et en trail »
Grâce à ses activités sportives, Razeeyah Nuther Saib s’était lié d’amitié avec Charles Cartier, le Chief Executive Officer d’Air Mauritius. Il est très affligé par le crime dont a été victime la septuagénaire, une adepte du sport d’endurance. « J’ai eu l’honneur de coacher Razeeyah en course à pied et en trail. Elle avait un caractère de fer. Elle se sentait bien avec les sportifs plus jeunes qu’elle, parce qu’elle avait un niveau d’énergie exceptionnel pour son âge », témoigne avec tristesse Charles Cartier.
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