
Sani cumule déjà fugues, arnaques en ligne et manipulations financières. Visé par un mandat d’arrêt, ce mineur de 16 ans à la dérive illustre une descente alarmante dans la délinquance juvénile.
Le 25 mai dernier, jour même de son anniversaire, Sani, jeune garçon de 16 ans domicilié à Montagne-Longue, a été interpellé par la police alors qu’il circulait sans permis sur une motocyclette qu’il aurait achetée avec de l’argent provenant de sources douteuses. Nouveau pied de nez à la justice de la part de cet adolescent déjà recherché par plusieurs unités de la police pour plusieurs délits.
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Cette scène surréaliste ne s’arrête pas là. Sani avait rendez-vous avec une mineure de 13 ans, portée manquante depuis le 6 mai par sa famille à la police de Bel-Air-Rivière-Sèche. Par quatre fois, elle a fugué pour aller à la rencontre de Sani. Au moment de l’arrestation de ce dernier, la mineure, visiblement désorientée, était seule à un arrêt de bus à Montagne-Blanche.
Au vu de la gravité des faits, Sani est présenté devant un juge de la Children Court à Port-Louis, en présence de son père le 27 mai 2025. Toutefois, l’audience ayant eu lieu en fin de journée, la caisse du tribunal était déjà fermée. Le magistrat décide alors de le relâcher sur parole, en lui ordonnant de se présenter le lendemain pour finaliser la procédure de sa libération sous caution. Une consigne qu’il ne respectera jamais. En effet, vers 2 heures du matin, Sani quitte la maison, échappant une nouvelle fois à toute surveillance, un comportement devenu presque habituel chez lui. Aujourd’hui encore, il reste introuvable et la police le recherche activement. La mineure de 13 ans, quant à elle, a été placée au Rehabilitation Youth Centre sous l’ordre d’un juge pour une période de six mois.
Né au Bangladesh d’un père mauricien et d’une mère bangladaise, Sani arrive à Maurice en 2016, à l’âge de 9 ans, accompagné de ses deux parents. La famille s’installe d’abord à Montagne -Longue. Mais rapidement, la situation familiale se complique : sa mère repart et revient à Maurice que quelques mois par an, tandis que son père, souvent absent à cause de son travail de chauffeur, ne peut assurer une présence constante.
Pour éviter que Sani ne se retrouve livré à lui-même, sa mère décide alors de le confier à des connaissances à Vacoas. C’est là que le jeune garçon, privé de repères stables, commence à fréquenter les mauvaises personnes. En l’absence de nationalité mauricienne, il n’a jamais été scolarisé dans le système local. Aujourd’hui, il est déjà catalogué comme un délinquant juvénile.
En 2024, âgé de 15 ans, il est dans le collimateur de la CCID pour des arnaques en ligne. Selon nos informations, il utilisait de faux comptes sur les réseaux sociaux pour vendre des objets fictifs, allant jusqu’à héberger d’autres jeunes impliqués dans des fraudes similaires. Lors d’une arrestation, il aurait même balancé les noms de ses complices à la police, se forgeant une réputation de « cerveau manipulateur ». Il a été autorisé à partir. Par la suite, un certain Wakeel, âgé d’une vingtaine d’années, a été arrêté par rapport à cette arnaque en ligne. Sur Facebook, son nom et sa photo ont déjà été publiés pour le dénoncer comme un escroc. « Bonjour, est-ce que quelqu’un connaît ce garçon ou sait où il vit, s’il vous plaît ? Il m’a vendu un drone et maintenant il m’a bloqué sur Facebook. J’ai entendu dire que c’est un escroc, et qu’il travaille avec un autre garçon appelé Sani ».
Maître de la manipulation et de l’escroquerie
Les enquêteurs sont formels : les transactions financières douteuses effectuées à travers le compte bancaire de la mère de Sani soulèvent de nombreuses questions. Les montants transférés, parfois élevés, pourraient prouver que celle-ci est soit complice, soit utilisée à son insu. Selon une source proche du dossier, le compte de la mère recevait de l’argent suspect, utilisé pour des arnaques en ligne avant d’être transféré ailleurs.
Pire encore, l’adolescent ne possède pas d’acte de naissance mauricien, mais sa mère a réussi à lui obtenir un passeport mauricien. Le passeport bangladais serait actuellement au bureau de probation, mais les autorités suspectent que la mère pourrait l’avoir récupéré avec Sani et être repartie au Bangladesh.
Après avoir ignoré sa convocation devant le tribunal pour enfants, la magistrate a ordonné, le mercredi 11 juin dernier, l’arrestation immédiate de Sani. Elle a également demandé le lancement d’un avis de recherche le déclarant « personne disparue ». Son nom et sa photo seront bientôt diffusés dans les médias. Une fois retrouvé, il sera placé dans un centre RYC pour une longue période, en raison du non-respect d’un ordre de la cour.
Les policiers sont désormais sur ses traces. Le suspect serait en lien avec d’autres adultes, dont un qui serait impliqué dans des affaires de drogue. Un cocktail explosif pour un jeune qui, malgré son âge, semble évoluer dans un univers parallèle, où les lois n’ont plus de prise.
Sa mère pourrait également être inquiétée dans cette affaire. La CID la soupçonne d’avoir couvert ou facilité les actions de son fils, volontairement ou non. Le rôle qu’elle a pu jouer dans la gestion des fonds illégaux ou la dissimulation de l’identité de son fils est aujourd’hui au cœur de l’enquête.
Sollicités pour une réaction, le père de Sani ainsi que sa grand-mère paternelle affirment que le jeune garçon est devenu incontrôlable, notamment à cause de ses mauvaises fréquentations. « Personne n’arrive plus à le maîtriser, il continue à escroquer des gens », déplore son père. « Nous aurions préféré qu’il soit placé dans un centre de correction jusqu’à sa majorité, pour sa propre sécurité », ajoute-t-il. La grand-mère maternelle, visiblement exaspérée, confie : « Ce garçon sait exactement ce qu’il fait. Il est rusé, rapide, et il manipule les gens autour de lui comme un adulte expérimenté ».
Sani, 16 ans, représente un véritable casse-tête pour la police, la justice pour mineurs et les structures d’encadrement social. Un jeune garçon à la trajectoire inquiétante, qui semble toujours échapper aux mailles du filet judiciaire. Mais pour combien de temps encore ?

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