Interview

Arjoon Suddhoo, chairman d’Air Mauritius: «Air Mauritius doit sortir de son moule de ‘small airline’»

Arjoon Suddhoo a de grandes ambitions pour la compagnie nationale d’aviation. Le président du conseil d’administration d’Air Mauritius se réjouit de l’arrivée, ce mardi 15 mars, du nouveau Chief Executive Officer Megh Pillay, avec qui il a déjà travaillé dans le passé. Le couloir aérien Afrique-Asie est dorénavant une réalité avec le premier vol direct sur Changi le 11 mars. êtes-vous satisfait de la réalisation de ce projet ? Pour comprendre la satisfaction qui nous anime en ce moment, il faut remonter à une année quand le nouveau board d’Air Mauritius (MK) avait hérité d’un lourd héritage, avec notamment des pertes de plus d’un milliard de roupies. Mais plus grave, le moral et la productivité des employés  étaient au plus bas. Nous nous étions engagés à remonter la pente. Aujourd’hui, nous récoltons les fruits d’un travail assidu et de sacrifices consentis par tous les employés. Je suis convaincu que la confiance est maintenant rétablie. Pour revenir à votre question, oui je suis très content de la concrétisation dans un temps record du couloir aérien. Attention, Changi n’est pas la destination finale. De là-bas, il y a encore 200 autres qui nous attendent. Cela se fera avec la collaboration des autres compagnies qui desservent cette région. Nous allons avoir une visibilité jamais atteinte à travers Changi. En contrepartie, nous allons vendre Changi et l’Asie à l’Afrique.
Que va-t-il se passer pour nos destinations traditionnelles ? Nous avons trop longtemps été euro-centred. C’est important, mais il ne faut pas oublier qu’il y a aussi un marché porteur dans cette partie du monde. Il y a la Chine, la Malaisie, Singapour et la Thaïlande. Le développement de Maurice dépend beaucoup de ce qui se passe en Afrique. Nous bénéficions d’une position stratégique, tant géopolitiquement qu’économiquement. Le couloir aérien va promouvoir le développement du business. Il relie l’Afrique et l’Asie à travers  Maurice. Nous sommes un key player dans ce grand projet qui arrive à point nommé. Il s’agit d’un projet national qui ne se limite pas qu’à Air Mauritius. Plusieurs autres organisations majeures ont un rôle à y jouer.
[blockquote]« Si le prix du pétrole reste bas, je ne vois pas pourquoi on ne baisserait pas les tarifs des billets d’avion »[/blockquote]
Il ne faut pas se leurrer : MK n’est qu’une petite compagnie… Après le clean-up de l’année dernière, l’autre aspect important pour le board et pour moi demeure la vision de la compagnie. Nous devons avoir une stratégie et savoir quelle direction nous prenons. Dans cinq, voire dix ans, je ne veux pas faire partie d’une small airline. Air Mauritius devra grandir et contribuer davantage au développement du pays. Nous devons aspirer à de grandes ambitions, desservir le maximum de destinations et rivaliser avec les plus grandes compagnies de la région… MK a-t-elle les moyens de ses ambitions ? Nous avons 12 avions et desservons une vingtaine de destinations. Il y a deux manières de grandir : à l’intérieur et à l’extérieur. Nous avons fait beaucoup de progrès à l’intérieur de la compagnie. D’ailleurs, les résultats sont visibles. Maintenant nous nous attaquons à notre visibilité dans la région et dans le monde. C’est là où la vision que nous avons est importante. Nous devons sortir du moule de la small airline et mériter le respect de nos concurrents. Nous devons devenir numéro un dans cette partie du monde. On peut le faire. Nous le serons un jour. C’est en partageant cette vision et ces ambitions avec nos employés que nous atteindrons ce but. C’est là que le concept de couloir aérien et de compagnie régionale d’aviation entre en jeu. Financièrement, comment MK compte-t-elle s’y prendre pour lancer le projet de compagnie régionale d’aviation ? Des consultants travaillent sur le business plan. Cette compagnie régionale sera une société subsidiaire d’Air Mauritius, qui détiendra la majorité des actions. Nous sommes ouverts à des partenaires potentiels. Y a-t-il une demande pour que la compagnie s’ouvre à des destinations africaines ? C’est à nous de créer la demande. Prenons le cas de Shanghai ou de Beijing. Y avait-il une demande ? Non. Nous l’avons créée. Nous avons investi et nous attendons les résultats. Cela prend du temps. Ce sont des risques qu’il faut prendre. Aucun marché n’est garanti. En tout cas, les Africains semblent s’intéresser au projet de compagnie régionale et au couloir aérien. MK ne se met-elle pas en danger en ouvrant son espace et en accueillant de grandes compagnies comme Turkish Airlines ? Nous n’avons pas peur de la compétition. Je ne crois pas dans une attitude protectionniste. Il faut y voir une collaboration et non une compétition. C’est pour cette raison je ne cesse de plaider pour qu’on grandisse. En ce faisant, on sera plus résilient, plus attirant. On ne peut pas se fermer à d’autres compagnies aériennes. Il est important que nous travaillions pour faire grossir le gâteau national, ce qui implique une plus grosse part pour tous. Nous avons un atout que d’autres n’ont pas : notre capacité d’opérer des vols directs qui réunissent toutes les conditions nécessaires. Nous allons nous focaliser sur cet atout et en tirer le maximum d’avantages. Le nouveau « Chief Executive Officer » Megh Pillay et vous partagez cette même vision ? Nous avons déjà travaillé ensemble. Nous avons d’ailleurs réalisé des profits record en 2013. Le board et moi attendons son arrivée avec impatience. Il aura tout le soutien nécessaire, que ce soit venant de moi, de la part du conseil d’administration ou des employés. Nous allons, avec les 2 800 employés, travailler en ayant un but commun et en regardant dans la même direction. Nous donnerons the best service at the best price. Nous allons démontrer qu’Air Mauritius a un potential énorme et que Megh Pillay  is the right person in the right place. 2 800 employés dites-vous ? La compagnie ne serait-elle pas en sureffectif ? Oui. Mais il n’y a que deux solutions. Nous débarrasser des employés surnuméraires ou utiliser ce même personnel pour faire plus. Avec le projet de compagnie régionale, nous allons avoir besoin d’effectifs supplémentaires. Je ne suis pas partisan du dégraissage. Nous avons de la place pour ceux qui travaillent et qui donnent des résultats. Un sujet qui fâche : le prix des billets d’avion… Je suis entièrement d’accord. Mais ce sont les forces du marché qui nous imposent certaines restrictions. Nous faisons des efforts là où nous pouvons. Si le prix du pétrole reste bas, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait baisser les tarifs des billets.  The onus is not just on Air Mauritius, it’s on the industry. En tant que compagnie nationale, Air Mauritius veut être le premier choix des Mauriciens. Un autre sujet controversé : le hedging… Nous avons essuyé un milliard de roupies de pertes, ce qui aurait pu se refléter dans nos profits. La question maintenant est de savoir si la compagnie devra recourir au hedging en octobre, une fois que l’accord en place arrivera à échéance ? C’est le board qui décidera. En tout cas, avec la stabilité du prix du pétrole, le hedging n’est pas d’actualité. Le mot de la fin… J’éprouve une énorme satisfaction du trajet accompli par la compagnie durant l’année écoulée. Nous avons surmonté d’énormes difficultés. Cela a démontré la capacité du personnel à relever des défis. Les employés ont la volonté d’épauler la direction pour mener la compagnie vers des sommets qui sont, pour l’heure, inaccessibles. Air Mauritius a un énorme potentiel. Il suffit d’avoir les bonnes personnes aux bonnes places. Nous en avons les moyens, la vision et le leadership.
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