Arianne Navarre-Marie : une femme debout 

Ne jamais faire de ses origines modestes une tare. Car, de l’abîme, l’on peut gravir les échelons de la vie. Et quand le mérite toque à la porte, « pena bare ». C’est le parcours de la ministre Arianne Navarre-Marie, fille de narifs des Chagos.

Sa vie, Arianne Navarre-Marie ne la voulait pas en dents de scie, même si elle a traversé des périodes difficiles. Très jeune, l’actuelle ministre de l’Égalité des genres s’est battue, consciente que la clé de la réussite réside dans la persévérance. Ceux qui l’ont côtoyée la décrivent comme une femme dévouée, prête à faire le bien autour d’elle. Avec une simplicité déconcertante, Arianne Navarre-Marie, mariée à Yvon et maman de deux enfants, Magalie, 36 ans, Housing Officer au Council West Sussex en Angleterre, et Jean-David, 40 ans, Credit Manager dans une entreprise privée, nous raconte son enfance, son adolescence, et son parcours politique aux côtés du Mouvement militant mauricien (MMM).

« Je suis née à la rue Vélore, à Plaine-Verte, et j’ai vécu jusqu’à mes quatre ans aux Salines, où j’ai fait mon ‘bilo’ avec Monsieur Edwin. Ensuite, mon enfance s’est déroulée aux Dockers Flats à Baie-du-Tombeau. J’habitais le Block P5, et les Chagossiens occupaient les Blocks F, G, H, I, et J. Il y avait 23 blocs de 9 appartements, soit 129 appartements au total », nous dit-elle d’un ton posé.

Son parcours scolaire a débuté à l’école du gouvernement de Baie-du-Tombeau, puis au collège Bhujoharry pour ses études secondaires, « par choix », précise-t-elle. Après son Higher School Certificate, avec l’anglais, le français et l’économie comme matières principales, elle a pris un « break ». « J’ai été enseignante et j’ai eu une petite parenthèse chez Mauvilac comme commerciale et Executive administrative. » Elle poursuit ses études avec une licence en économie et gestion, suivie d’un diplôme en management administratif. De 1985 à 1988, elle est conseillère municipale à Port-Louis.

C’est avec le sourire qu’Arianne Navarre-Marie, que Paul Bérenger considère comme sa « sœur », évoque son cheminement politique. D’ailleurs, avec le leader du MMM, elle est la seule à avoir participé à toutes les élections générales depuis 1982. « J’ai été la plus jeune candidate du MMM lors des législatives de 1982, et j’ai été témoin du tout premier 60-0. Ensuite, il y en a eu un autre en 1995, et le troisième en 2024. Il n’y a que Paul Bérenger et moi qui avons vécu ces événements », explique-t-elle.

Et le dernier 60-0 en 2024, était-il prévisible, alors que l’Alliance Lepep croyait en une victoire ? « Lors du meeting de Curepipe le 3 novembre dernier de l’Alliance du Changement, j’avais dit dans mon discours que je sentais qu’un 60-0 se profilait. Sur le terrain, on ressentait un ras-le-bol, une colère. Et c’est ce qui est arrivé. »

Dans son bureau au ministère de l’Égalité des genres et du bien-être de la famille, au Newton Tower, « li koumadir enn zanfan lakaz ». La raison en est simple : elle a occupé ce poste entre 2000 et 2005 avec le même portefeuille. 

Arianne Navarre-Marie, habillée d’un ensemble deux-pièces – jupe noire et blouse à motifs assortis – paraît à l’aise. « Je connais tous les rouages de ce ministère, ses faiblesses et ses points forts. Il y a tellement à faire ici, tout est une priorité. Ne me demandez pas par où commencer, il y a du pain sur la planche », nous confie-t-elle.

Les officiers défilent, elle enchaîne les réunions sans fin. Après une journée marathon, elle doit encore se rendre voir ses mandants dans la circonscription n°1. « Il est important d’entendre leurs doléances et d’apporter des solutions », affirme-t-elle.

Au sein de ce ministère, l’atmosphère est détendue, presque familiale. Il y a un équilibre entre hommes et femmes fonctionnaires. Et il faut dire que la « maîtresse de maison » n’a pas besoin de hausser la voix, car ses officiers savent qu’Arianne Navarre-Marie est une vétérane. Elle connaît ce ministère comme si elle ne l’avait jamais quitté.

Passionnée de lecture, de biographies, d’histoires vécues, et de films historiques à la télévision, elle semble satisfaite d’un parcours parfois semé d’embûches, surtout compte tenu de ses origines modestes en tant que Chagossienne. Car dans la vie, il est possible de sortir de « zéro » pour atteindre les sommets. Tout dépend des efforts personnels. Et Arianne Navarre-Marie en est la preuve vivante. Elle a toujours eu cette détermination, cette « gnac » qui l’a propulsée là où elle est aujourd’hui.

« Je ressens une profonde douleur »

La ministre de l’Égalité des genres et du bien-être de la famille se dit attristée de la guerre de clans entre frères et sœurs chagossiens autour de l’accord sur l’archipel. « C’est avec une grande tristesse que je vois notre communauté chagossienne se diviser, alors que notre priorité devrait être de nous unir pour continuer notre combat. En tant que fille de Chagossiens, je ressens profondément cette douleur », partage-t-elle.

Elle rappelle que le gouvernement auquel elle appartient s’est toujours engagé en faveur de la communauté chagossienne. « Paul Bérenger, notre Premier ministre adjoint, a toujours milité pour cette cause et a toujours fait de ce dossier une priorité », souligne-t-elle. Et d’ajouter : « Je tiens à rassurer la communauté chagossienne que le gouvernement continuera à œuvrer pour l’avancement de notre communauté. »