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Anil Currimjee, président de Business Mauritius : «le ministre du Travail n’a pas le pouvoir de faire ce qu’il a fait»

Anil Currimjee, président de Business Mauritius, réagit aux critiques du ministre du Travail, Soodesh Callichurn, concernant les sanctions potentielles sur les entreprises qui ne réajustent pas les salaires. Dans cet entretien, il souligne l’importance de la légalité dans les processus de rémunération et la nécessité de solutions collaboratives avec le gouvernement. Il a également affirmé que Business Mauritius reste apolitique et se concentre sur le bien-être de ses membres.

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Lors d’une conférence de presse tenue le mardi 24 septembre, le ministre du Travail, Soodesh Callichurn, a été très critique envers Business Mauritius et a déclaré que des sanctions sévères seront prises contre les entreprises qui ne réajustent pas les salaires. Quelle est votre réaction ?

C’est avec beaucoup de tristesse que nous prenons note de la déclaration du ministre. Je tiens à souligner que depuis la conférence de presse du ministère du Travail du 9 août, nous avons commencé à parler aux divers membres du gouvernement. Nous avons eu plusieurs rencontres où nous avons été clairs sur notre prise de position concernant la relativité salariale. Nous n’avons jamais évoqué la question du montant. Nous avons plutôt parlé des principes, des contradictions, des aspects légaux, ainsi que de nos craintes concernant ce qui n’est pas légal. Nous avons toujours maintenu la même ligne. Lorsque les Remuneration Orders ont été « gazetted » le vendredi 13 septembre, Business Mauritius les a reçus le mardi 17 septembre. Ce même jour, nous avons émis une note de réserve en disant que cela nous inquiète. Par ailleurs, nous avons travaillé pendant des jours, même les week-ends, et avons reçu des avis de nos conseillers juridiques indiquant que les RO circulés par le ministère ne sont pas légaux. En tant qu’organisation, nous avons le devoir d’informer nos membres correctement. Si nous avons des conseils qui nous disent que quelque chose n’est pas légal, nous sommes obligés d’informer nos membres. Si nous avions dit à nos membres que tout est bon, nous aurions perdu notre crédibilité. Ce n’est pas une question de vouloir payer ou non, mais plutôt une question de principe. Nous ne pouvons pas agir dans l’illégalité, et nous avons été clairs à ce sujet depuis le début.

Ce n’est pas une question de vouloir payer ou non, mais plutôt une question de principe"

Cependant, le ministre du Travail a fait comprendre que l’avis du State Law Office a été sollicité et que tout a été fait dans la légalité. Alors, sur quels points vos conseillers se basent-ils pour dire que les RO sont illégaux ?

Je ne vais pas entrer dans tous les détails, mais je peux donner un exemple. D’abord, nos conseillers légaux nous disent que les recommandations ont été faites sous la section 106 de l’Employment Relations Act. Cependant, nos conseillers affirment que le ministre du Travail n’a pas le pouvoir de faire ce qu’il a fait sous cette section. Imaginez si nous restons tranquilles, ce serait grave. Quelque part, si nous ne contestons pas cette décision, cela veut dire que nous acceptons le fait que le ministre est au-dessus de la loi. Par ailleurs, les conseils nous disent que si le ministre souhaite apporter des recommandations sur les salaires, il doit se baser sur les sections 91 à 95. Mais s’il veut agir dans ces sections, un processus doit être effectué à travers des institutions comme le National Remuneration Board (NRB) et d’autres. Mais cela n’a pas été fait. C’est la raison pour laquelle nous estimons que les nouveaux RO ne sont pas légaux.

Pourtant, le ministre a déclaré qu’il y avait un comité technique sur lequel Business Mauritius était partie prenante et que le patronat était d’accord sur les montants ainsi que sur les modalités de paiement...

Nous avons travaillé ensemble sur un rapport sur la relativité salariale. Mais ce que le ministre a annoncé le 9 août dernier n’a rien à voir avec ce rapport. De notre côté, nous avons maintenu le même discours en disant qu’il y a un problème avec la décision du ministre et qu’il faut le résoudre. Nous n’avons jamais dit que nous étions d’accord avec les nouvelles grilles salariales. Nous avons été consistants à chaque fois.

Maintenant, quelle est la suite ? Quels sont les prochains pas de Business Mauritius ?

Depuis le début, lorsque nous parlions aux autorités et aux institutions, nous ne partagions pas seulement nos craintes avec eux, mais également des solutions. Nous croyons que nous pouvons parvenir à des solutions si nous travaillons en collaboration avec le gouvernement pour arriver à des mesures qui sont légales. Nous voulons nous assurer que tout a été fait de manière transparente et légale. Donc, nous allons continuer à discuter, et j’espère que nous arriverons à une conclusion assez rapide.

Business Mauritius envisage-t-il d’aller vers une injonction si le ministère maintient les règlements tels qu’ils sont ?

Je suis optimiste et je suis sûr que nous allons trouver une solution.

Business Mauritius est toujours restée apolitique"

Le ministre a également déclaré que certains membres de BM sont proches de l’opposition et qu’ils ont un « hidden agenda », surtout à l’approche des élections générales. Vos commentaires ?

Cela m’attriste énormément. Business Mauritius est une institution qui existe depuis des années et est toujours restée apolitique. Les représentants du conseil d’administration ne se sont jamais ingérés dans la politique. Depuis l’annonce sur la relativité salariale, nous n’avons jamais changé notre position. Tout ce que nous demandons est de trouver une solution qui ne crée pas de mauvais précédents. Ainsi, la question d’être proche de la politique ne se pose pas.

Soodesh Callichurn affirme que certaines entreprises ont déjà fait le nécessaire pour augmenter les salaires. Confirmez-vous cela, et est-ce qu’elles sont membres de Business Mauritius ?

Je sais que certaines entreprises ont réajusté, mais je ne suis pas au courant si elles sont membres de Business Mauritius. Je profite de cette occasion pour parler de la philosophie de la rémunération auprès de la majorité de nos membres. Quand le salaire minimum a été récemment annoncé, nous n’avons jamais été contre. D’ailleurs, j’estime que c’est une bonne chose, car cela aidera l’économie à progresser. Par ailleurs, avec l’inflation qui a grimpé suite aux conséquences de la Covid-19 et de la guerre en Ukraine, le secteur privé a été le premier à fournir des « bons alimentaires » à ses employés, car nous sommes conscients de leur bien-être. À cette époque, beaucoup d’entreprises avaient augmenté les salaires jusqu’à Rs 15 000, qui est devenu le salaire minimum par la suite. Donc, pour nous, ce n’est pas une question de vouloir payer ou non, mais plutôt que les procédures doivent être correctement respectées. Aujourd’hui, cela concerne les salaires, mais demain cela pourrait concerner des permis, entre autres. Il est bon de faire ressortir aussi que la plupart des entreprises dans le secteur privé récompensent les employés beaucoup plus que le salaire minimum, non seulement en termes de salaires mais également en termes de bénéfices.

La Confédération des travailleurs des secteurs public et privé (CTSP) brandit la menace d’une grève si Business Mauritius maintient sa position. Cela vous préoccupe-t-il ?

C’est dommage d’avoir des menaces de grève. Tout ce que nous demandons, c’est que tous les changements soient effectués de manière légale. Le secteur privé ne peut pas avancer sans les employés, et le pays ne peut pas progresser sans le secteur privé. Nous devons donc travailler tous ensemble avec les institutions, le gouvernement et les employés.
 

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