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Amputée des deux pieds - Venita Purbhoo : «Marcher à nouveau est comme une seconde naissance»

Venita Purbhoo s’est fait amputer des deux pieds en l’espace de deux ans.
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Venita Purbhoo, 44 ans, est mère de trois enfants, dont une fille aînée de 24 ans et deux fils de 23 et 20 ans respectivement. Elle a divorcé en 2010 et élève seule ses enfants. Il y a trois ans, Venita avait ses deux pieds. Un jour, tout a basculé. Elle s’est fait amputer jusqu’aux genoux. Aujourd’hui, après deux mois de rééducation en Inde, elle arrive enfin à marcher et à mener un semblant de vie normale. 

Venita Purbhoo
Venita Purbhoo peut désormais remarcher, grâce à sa rééducation.

Tout commence il y a vingt ans. Alors qu’elle est enceinte de son dernier-né, Venita Purbhoo apprend qu’elle a un diabète de grossesse. « Le médecin m’avait dit que ça allait passer après l’accouchement. Or, deux ans après l’accouchement, les symptômes ont persisté. Mais je ne me doutais pas que qu’ils étaient attribuables au diabète. À l’hôpital, le médecin m’a alors dit que j’étais cent pour cent diabétique », partage-t-elle. 

En mai 2016, Venita reçoit un coup de massue. On lui annonce qu’elle doit se faire amputer du pied gauche. L’intervention a lieu à l’hôpital SSRN de Pamplemousses. Après l’amputation, Venita reçoit une prothèse du ministère de la Santé. Cependant, celle-ci n’est pas adaptée, car elle lui fait souffrir. « La prothèse ne convenait pas à ma morphologie. Elle était inconfortable. J’ai même fait une chute. La prothèse n’améliorait pas ma condition. À vrai dire, elle ne me servait à rien. Du coup, je me suis retrouvée au lit, dépendante et sans aucune mobilité », confie Venita. 

Après ce problème de prothèse, la Global Rainbow Foundation lui en offre une nouvelle. Venita peut marcher à nouveau et arrive à être plus autonome. « Même si je n’avais qu’un pied, je me considérais heureuse d’être toujours autonome. J’avais à nouveau l’espoir de reprendre ma vie en main et de travailler. » 

En 2018, à la suite d’enflures et d’une douleur insupportable au pied droite, Venita fait des va-et-vient à l’hôpital. « J’ai même subi une radiographie où aucune anomalie n’a été décelée. On m’a dit que ces enflures étaient tout simplement dues au poids de mon corps. On m’a même assuré qu’il n’y avait pas de risque que mon deuxième pied soit amputé. Mais quand je me suis fait ausculter dans une clinique, je suis tombée des nues. » On lui annonce qu’il est trop tard, que les os de son pied sont usés et qu’elle va devoir se faire amputer à nouveau. « J’étais assommée, car le diagnostic de l’hôpital et celui de la clinique étaient complètement différents. » Refusant de l’accepter, elle se rend dans une autre clinique pour demander un second avis médical. Le verdict est sans appel : le diagnostic coïncide avec celui du précédent médecin. « J’ai fini par accepter mon sort. Je souffrais énormément. Je me suis fait amputer du pied gauche à l’hôpital en octobre 2018 », raconte-t-elle, la gorge serrée. 

Sa vie bascule

La vie de Venita bascule. Elle est alitée pendant quatre mois. Des mois qui riment avec enfer pour la mère de famille. « Ces quatre mois étaient longs et pénibles. J’étais extrêmement dépendante de mes proches. Je devais attendre qu’on me donne un verre d’eau, qu’on me fasse à manger et qu’on me lave. C’était extrêmement difficile pour moi de dépendre des autres. D’ailleurs, mon dernier fils de 23 ans a pris la décision de rester à la maison pour s’occuper de moi. » 

Battante de nature, Venita refuse de passer le restant de ses jours clouée sur un lit et dépendant uniquement de sa pension d’invalidité. Elle est décidée à se battre, mais se retrouve dans l’impasse. Les prothèses offertes par le ministère de la Santé sont inadaptées. Quant aux nombreuses demandes de financement qu’elle formule, elles restent sans réponse. Venita prend donc l’initiative d’exposer son problème sur les réseaux sociaux et dans les journaux pour lever des fonds. « Détrompez-vous. Je n’ai pas eu que des messages de sympathie. Je m’en suis pris plein la gueule avec les commentaires de certains internautes, mais j’ai persévéré. Grâce à l’énorme soutien des bénévoles et des Mauriciens généreux, j’ai pu recueillir Rs 350 000 », explique-t-elle. 

Planche de salut

Cet argent est une planche de salut pour Venita qui avait alors perdu tout espoir de pouvoir remarcher. Avec cette somme, elle s’acquitte de ses sessions de physiothérapie au centre Kusum Spine & Neuro Rehabillitation, à Vasant Kunj, New Delhi. Elle y reste pendant deux mois. « Les résultats de ma rééducation en Inde étaient surprenants. Avant, je ne pouvais pas faire de mouvements seule. Je ne pouvais même pas lever le bras. Mais au bout d’un mois et demi passé au centre, je pouvais enfin marcher, avec beaucoup de maladresse certes, car ma prothèse était neuve. Mais je pouvais enfin marcher seule ! » 

Ses médecins traitants, le Dr Virendra Vikram Singh et le Dr Kaushal Kishore, ont tout fait pour qu’elle ait une prothèse sur mesure durant sa progression lors des sessions de physiothérapie. « L’équipe du centre Kusum Spine & Neuro Rehabillitation a attendu que je sois capable de tenir mon corps en équilibre avant de fabriquer le moule de la prothèse. Aujourd’hui, je me sens beaucoup plus en sécurité avec ces nouvelles prothèses. Elles sont faites sur mesure sur recommandation de mes médecins traitants. De plus, elles sont stables, confortables et sécurisées, car elles sont faites à partir d’une matière spéciale, la fibre BV. Elles m’ont coûté cher, mais le confort et les possibilités qu’elles me donnent n’ont pas de prix. Je ne saurais comment remercier les Mauriciens qui m’ont aidée. Je leur en serai éternellement reconnaissante », exprime Venita. 

Depuis son retour de l’Inde, Venita entrevoit un avenir. Elle est épanouie et se projette déjà car, selon ses médecins, avec les exercices prescrits, elle pourra mener une vie normale. Son combat de tous les jours vers l’autonomie est déjà une victoire. « Avant de me rendre en Inde, j’avais perdu le sourire et tout espoir de pouvoir à nouveau marcher. Mais mes médecins en Inde m’ont redonné goût à la vie. Aujourd’hui, je peux presque tout faire sans dépendre des autres. Je prépare mes repas. Je prends mon bain. D’ailleurs, je pense remettre mon tricycle sur pied pour vendre des rôtis. Je suis confiante de regagner tout ce que j’ai perdu. Mais le simple fait de pouvoir marcher à nouveau est comme une deuxième naissance. Je vais saisir cette deuxième chance que m’offre la vie. » 

Demande aux services publics de santé 

Venita souligne que ce combat est non seulement le sien, mais aussi celui d’autres personnes dans la même situation qu’elle. Elle confie que le retour qu’elle a eu sur les vidéos qu’elle a postées sur son compte Facebook, durant sa rééducation en Inde, lui a réchauffé le cœur. « Beaucoup de personnes autrement capables comme moi ont repris espoir, lorsqu’ils ont vu que vivre sans jambes est certes difficile, mais pas impossible. Donc, je voudrais lancer un appel au gouvernement. Je suis reconnaissante pour la pension d’invalidité que je touche, mais offrir des prothèses sans aucun suivi n’arrange pas les choses. Ayant vécu l’expérience des centres de rééducation en Inde, je demanderais au gouvernement mauricien de songer à faire venir des physiothérapeutes à Maurice pour que d’autres personnes autrement capables puissent en profiter. Cela redonnera un sens à la vie de ceux qui ont baissé les bras », implore-t-elle.

 

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