Tous l’arsenal de protestation citoyenne ont été utilisé pour que les amendements à l’Independent Broadcasting Authority (IBA) Act ne soient pas promulgués. Cependant, ce projet de loi a reçu, le 2 décembre 2021, l’assentiment du président de la République, Prithvirajsing Roopun. Il avait été adopté, le 30 novembre 2021, sans amendement par l’Assemblée nationale. Quel recours a-t-on pour contester cette loi ?
Pour Me Dev Ramano, :la divulgation des sources d’un journaliste (section 18 A de cette loi), la périodicité du permis de la radiodiffusion, la constitution de l’Independent Broadcasting Review Panel, les pénalités administratives exorbitantes et la section 22(4) concernant les sanctions contestées en Cour sont anticonstitutionnelles. Et elles vont à l’encontre de la section 12 de notre Constitution : le droit à la liberté d’expression ».
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Me Ramano évoque l’article 10 de l’European Convention on Human Rights, qui fait état du ‘right to freedom of expression’. « This right shall include freedom to hold opinions and to receive and impart information and ideas without interference by public authority and regardless of frontiers ». Et, cet article va dans le même alignement que la section 12 de notre Constitution.
Il soutient qu’il y a eu plusieurs décisions entourant la liberté d’expression et qui ont été prononcées par l’European Court of Human Rights. Elle avait interprété l’article 10 concernant la source d’un journaliste :
« Having regard to the importance of the protection of journalistic sources for press freedom in a democratic society and the potentially chilling effect an order of source disclosure has on the exercise of that freedom, an inteference cannot be compatible with Article 10, unless it is justified by an overriding requirement in public interest ».
Ainsi, il a été aussi souligné que la liberté d’expression est vaste et que les restrictions très minimes. Pour qu’il y ait une restriction, dit l’homme de loi, « il faut que l’intérêt public prime ».
Les options pour procéder vers une bataille juridique à Maurice
Option 1
Selon Me Ramano, il y a deux options. Primo, si une loi est votée, obtient l’assentiment du président de la République et est promulguée, on peut, sous la Supreme Court (Constitutional Relief) Rules 2000 (GN No. 105 of 2000), émise par le Chef Juge sous la section 17(4) de la Constitution, loger une plainte constitutionnelle dans un délai de trois mois.
La Cour, poursuit l’avocat, devra trancher sur la constitutionalité de la provision de cette loi. Est-ce que la loi organique est inconsistante en relation avec les principes fondamentaux de notre Constitution ? Si oui, dit Me Ramano, elle serait déclarée nulle. Au cas contraire, elle sera maintenue.
Et si le délai de trois mois est dépassé ? Il y a toujours la possibilité de loger la plainte constitutionnelle. Pour cela, il faut justifier le retard avec des arguments motivés avant que la Cour n’accède à la requête de loger la plainte constitutionnelle. Souhaitons que toute tentative de contestation à ce niveau soit faite dans le délai prescrit.
Option 2
Secundo, explique Me Ramano, si un individu est pris en contravention sous l’IBA Act et est traduit devant une cour de justice, il peut trouver « une avenue de remède ». À ce niveau, le partie poursuivie peut évoquer la nature anticonstitutionnelle de la provision légale sous laquelle elle est inquiétée. Cette avenue est nommément appelée « par voie des faits ». Le magistrat peut ainsi référer ce point litigieux à la Cour suprême pour que celle-ci tranche sur la constitutionalité de l’élément en question.
« Et là, on peut attendre longtemps avant qu’une telle éventualité ne se présente et qu’une telle initiative ne soit prise ! Entre-temps, l’IBA Act resterait paisiblement dans nos livres de lois ! », dit Me Ramano.
L’opposition ira devant la justice
L’opposition ira devant la justice. Les amendements à l’Independent Broadcasting Authority (IBA) Act ont été promulgués, car le président de la République a déjà donné son assentiment durant la semaine.
Jeudi dernier, le Bureau Politique du Mouvement militant mauricien (MMM) s’est réuni pour discuter, entre autres, de la marche à suivre, suivant la promulgation de la loi.
Le seul recours pour contrer cette législation qui, selon l’opposition, porte atteinte à la liberté d’expression, c’est la contestation devant la justice. Jeudi, les discussions étaient portées sur le rassemblement des avocats des trois principaux partis de l’opposition : MMM, Parti travailliste et Parti mauricien social-démocrate (PMSD). Les hommes de loi se pencheront sur une plainte à déposer devant la Cour Suprême pour contester des clauses de l’IBA Act.
Le sujet abordé ce samedi par la Plateforme de l’espoir
Par la même occasion, les amendements à l’IBA Act seront évoqués ce samedi lors de la conférence de presse de la Plateforme de l’espoir. D’ailleurs, les partis de l’opposition se sont ralliés à la cause de la Plateforme pour la liberté d’expression. L’ensemble de l’opposition parlementaire et extraparlementaire s’oppose à cette loi et conteste les mesures gouvernementales.
Le président de la République vivement critiqué
Pradeep Roopun, président de la République, a été vivement critiqué, et par le Parti travailliste, et par la plateforme pour la liberté d’expression. Cela, lors de leur conférence de presse respective, vendredi.
Arvin Boolell affirme que Pradeep Roopun a failli dans sa tâche. « Un président digne de ce nom, ne peut être un paillasson, un ‘rubber stamp’. Il ne peut tolérer et encourager les impairs qu’il y a dans des institutions dites indépendantes. »
Le chef de file du Parti travailliste rappelle que « la présidence est une institution. Le président ne peut pas être à la merci et à la solde de la tyrannie du pouvoir et être l’arme de l’exécutif. Malheureusement, le président a laissé la présidence tomber ».
Au niveau de la plateforme pour la liberté d’expression, c’est place à la mobilisation. Ce samedi, à midi pile, deux équipes de 11 personnes seront devant la présidence.
« Nous serons en face de la présidence afin de démontrer notre dégoût envers l’actuel président. Il est inadmissible qu’un président n’assume pas ses pouvoirs constitutionnels. Il n’est pas possible qu’un président démontre clairement qu’il n’est qu’un ‘rubber stamp’. Si vous avez du respect pour le président de la République, c’est que vous n’avez pas de respect pour vous-même. Nous devons faire en sorte d’abolir la pension du président ».
Traitement express
Comme une lettre à la poste ! Alors que les amendements à l’IBA Act font l’objet d’une grosse polémique au niveau de la population, l’exécutif et le président lui ont réservé un traitement express. Le président de la République, Pradeep Roopun, a donné son assentiment à l’IBA (Amendment) Bill, le mercredi 1er décembre, adopté mardi au Parlement par une majorité simple. Le même jour, le texte de loi a été ‘gazetted’ dans le Government Gazette pour lui donner force de loi. Depuis le 1er décembre, les amendements sont donc en vigueur. Cela, en dépit des demandes faites auprès du président de la République par diverses ONG, dont Reporters sans frontières, mais aussi l’ancien président de la République, Cassam Uteem. Le but était pour qu’il ne signe pas le texte et le renvoie au Parlement, afin de pouvoir éventuellement apporter des changements suggérés par divers quartiers.
Pouvoir et forces de l’ordre : Opération ‘Anti-Govt Slogans’ par la police du Sud
Mercredi 1er décembre, au lendemain du vote sans amendement de l’Independent Broadcasting Authority (IBA) Act à l’Assemblée nationale, une patrouille a été mise sur pied par la police de l’Eastern Division. Il a été demandé à l’équipe de la Criminal Investigation Division, épaulée par les éléments du Field Intelligence Office, de l’Emergency Rescue Service et de la Divisional Support Unit, de procéder à une patrouille dans le Sud de l’île. Cela, à la recherche d’affiches ou de bannières « illégales ». Cependant, aucune affiche ou banderole n’a été retrouvée. L’opération était surnommée ‘Patrol Illegal Posters/Anti- Govt Slogans’ par la police du Sud.
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