Ameenah Gurib-Fakim : «On vit des moments très sombres de notre histoire»

Ameenah Gurib-Fakim La présidente remettant un exemplaire du livre à Ivan Collendavelloo.

On semble loin de l’épilogue. La crise au sommet de l’état, a pris une toute autre tournure le mercredi 7 mars avec le discours prononcé par la présidente de la République, Ameenah Gurib-Fakim à la State House à l’occasion du lancement d’un livre. La présidente semble en tout cas décidée d’y rester.

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« Nous sommes en train de vivre une période où l’état est en train de faire face à un procès à travers la presse. »

Il aura fallu attendre la fin du discours pour enfin connaître la position officielle de la présidente, Ameenah Gurib-Fakim, qui se trouve actuellement au cœur d’une crise au plus haut sommet de l’état. C’est au lendemain de la déclaration du Premier ministre, où il a déclaré être en désaccord avec la présidence, qu’Ameenah Gurib-Fakim est sortie de son mutisme.
Celle qui ne cesse de faire la une des journaux depuis plus d’une semaine, pour avoir utilisé une carte de crédit qui lui a été offerte par Planet Earth Instiute (PEI) est hier apparue tout sourire dans l’enceinte du château du Réduit à l’occasion du lancement du livre ‘From Le Réduit to the State House’ & ‘Du Réduit à la State House’.

Aucun signe d’irritation à son arrivée. C’est vers le No. 2 du gouvernement, Ivan Collendavelloo, celui à qui elle doit sa nomination au Réduit, que la présidente se dirige. Ivan Collendavelloo qui affiche aussi bonne mine lancera un « ça va » à Ameenah Gurib-Fakim. Les échanges de politesse terminées, place à la partie protocolaire. Invitée par la suite à prononcer son discours de circonstance, et c’est au bout de six minutes qu’Ameenah Gurib Fakim décide de contre-attaquer.

« Nous sommes en train de vivre des moments très sombres de notre histoire, où certaines personnes sont en train d’essayer de paralyser le fonctionnement de nos institutions en utilisant qu’une partie de la vérité », lance-t-elle. Le ton est donné. C’est devant une assistance concentrée, qu’Ameenah Gurib-Fakim insistera sur un point. « Je ne suis pas une politicienne mais une professionnelle qui appartient fièrement à la société civile. »

Abordant les 50 ans d’Indépendance que s’apprête à vivre le pays, la présidente dit regretter qu’on soit en train de remettre en question et douter de l’intégrité des gens et « de nos institutions ». Il aurait, selon elle, été préférable d’engager une réflexion sur le passé et l’avenir. « Nous sommes en train de vivre une période où l’état est en train de faire face à un procès à travers la presse. J’ai pendant une semaine entière été jugée et condamnée », a-t-elle fait part. « Quel a été mon crime? Lorsque j’ai pris mes fonctions j’ai dit dès le départ que je ferais les choses différemment. J’ai pris ces fonctions comme une scientifique et comme une entrepreneure et je me suis associée à différentes institutions, telles que Planet Earth Institute au nom de la science », a-t-elle tenu à souligner.

Concernant l’épineux dossier de la Platinium Card, la présidente avouera avoir obtenu une ‘Corporate Bank Card’, et dit avoir tout remboursé depuis mars 2017. « Je ne dois rien à personne. La question que je me pose est  pourquoi est-ce que tout sort maintenant. Pratiquement à la veille des 50 ans d’Indépendance de notre pays et à la veille de Journée internationale des femmes où l’on insiste sur la responsabilisation des femmes », a-t-elle affirmé. Et c’est sur un ton ferme, qu’Ameenah Gurib-Fakim a adressé ce message aux Mauriciens : « Il est temps de se mettre debout et nous faire entendre. »

Il s’agit en tout cas d’une épreuve qu’elle semble mal vivre, puisque la présidente dit ne pas souhaiter cela même pas à ses pires ennemis.  « Ce sont des moments qui portent atteinte à ma dignité de femme, de mère de famille et de la fille que je suis et du professionnel que je suis. » Elle conclura en déclarant avoir la conscience claire. « Je n’ai rien à me reprocher », dira-t-elle.


Des invités pas aussi solidaires que cela

La salle était pratiquement comble hier dans l’enceinte de la State House. Parmi les personnes qui composaient l’assistance, des membres des associations socioculturelles, des hauts fonctionnaires comme le commissaire électoral, Irfan Raman, des diplomates et des nominés politiques tels que Dick Ng Sui Wa. Si la présidente a, à la fin de son discours, eu droit à un long applaudissement en signe de soutien, ils étaient cependant très peu à vouloir parler ouvertement.

Les différents invités que nous avons souhaité approcher, nous ont faits comprendre qu’il s’agit d’un dossier trop sensible et préfèrent s’abstenir de tout commentaire. Le vice-président de la All Muslim Congress, Eraf Moedeen, a quant à lui déclaré que les récentes polémiques autour de la Présidence font partie « des hauts et des bas de la vie. Mais elle continue de faire honneur au pays », dit-il.

Ivan Collendavelloo : « C’est un grand plaisir d’être présent »

Alors qu’il s’était rendu à la State House, mardi en présence du Premier ministre, Pravind Jugnauth afin de discuter de la démission d’Ameenah Gurib Fakim, le No 2 du gouvernement était le seul membre du gouvernement à avoir répondu présent à l’invitation à l’occasion du lancement de ce livre. N’est-ce là pas un affront pour le Premier ministre ? « Ma présence s’explique simplement par le fait que je suis un féru de littérature. Je sais ce que ce livre contient. C’est un grand plaisir d’être présent.

C’est un monument d’histoire que nous avons devant nous », a-t-il répondu. Ivan Collendavelloo n’a cependant pas souhaité réagir au discours de la présidente et dit laisser cela aux journalistes. Cette présence d’Ivan Collendavelloo étonne à plusieurs niveaux. Le Prime Minister’s Office ne cache pas cet étonnement. Les collaborateurs du Premier ministre ne savaient, en effet, pas si Ivan Collendavelloo avait été invité.

« Elle est blessée et je la comprends »

S’il y a bien une personne qui ne s’est pas retenue pour soutenir la présidente, c’est bel et bien le vice-président de la République, Barlen Vyapoory. « Elle est blessée et il faut comprendre sa peine. Moi, je la comprends », nous a-t-il déclaré.


Platinum Card

C’est en octobre, novembre et décembre 2016 que la présidente de la République a effectué des dépenses à l’aide de la Platinum Card qui lui a été offerte par le Planet Earth Institute. C’est en mars 2017 qu’elle a finalement tout remboursé.

 

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