Un an après leur triomphe électoral, Navin Ramgoolam et Paul Bérenger peinent à masquer leurs désaccords. Les tensions au sein de l’Alliance du Changement menacent désormais l’équilibre gouvernemental.
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Presque un an, jour pour jour, après la victoire éclatante de l’Alliance du Changement aux élections générales du 10 novembre 2024, les relations entre le Premier ministre Navin Ramgoolam et le Premier ministre adjoint Paul Bérenger apparaissent singulièrement dégradées. Des efforts sont cependant entrepris des deux côtés pour faire évoluer les choses positivement. Le duo, qui avait fédéré une large majorité avec 65 sièges sur 67 à l’Assemblée nationale – 35 pour le PTr, 19 pour le MMM (dont un, Franco Quirin, qui siège désormais en indépendant), 3 pour Nouveaux Démocrates (ND) et 3 pour Rezistans ek Alternativ (ReA) –, peine désormais à masquer des divergences profondes. Plusieurs dossiers sensibles, dont l’affaire du milliardaire malgache Mamy Ravatomanga et la démission forcée du président d’Air Mauritius, Kishore Beegoo, illustrent ces frictions en coulisses, au risque de fragiliser la stabilité du gouvernement.
Il nous revient que l’affaire Ravatomanga, survenue à la mi-octobre, cristallise les plus récentes tensions. L’homme d’affaires malgache, proche de l’ancien président Andry Rajoelina, est arrivé à Maurice dans la nuit du 12 au 13 octobre 2025 à bord d’un jet privé, dans des circonstances rocambolesques. Soupçonné de blanchiment d’argent à grande échelle, impliquant des transferts financiers suspects entre Madagascar et Maurice, il a été placé en état d’arrestation le 24 octobre par la Financial Crimes Commission (FCC), l’organisme chargé de la lutte contre les crimes financiers. Plus de deux semaines après, Mamy Ravatomanga n’a toujours pas été formellement entendu par la commission. Hospitalisé dans une clinique privée pour des problèmes cardiaques confirmés par un contre-examen médical indépendant, il demeure sous détention provisoire (voir en page 5). Dans les couloirs, le dossier divise le gouvernement. Des sources évoquent un « lobby discret » opérant en coulisses en faveur de l’homme d’affaires, dont l
L’affaire n’est cependant pas isolée. Le 23 octobre, la coalition a frôlé la rupture sur fond de désaccord autour d’Air Mauritius, la compagnie nationale en pleine restructuration. Paul Bérenger réclamait depuis plusieurs semaines la tête de Kishore Beegoo, nommé président exécutif du conseil d’administration en janvier 2025. Frustré par la lenteur de Navin Ramgoolam à agir, et piqué par des attaques publiques de Kishore Beegoo – qui avait critiqué ouvertement l’ingérence politique dans une interview accordée à Business Magazine le 22 octobre –, le Premier ministre adjoint aurait, selon nos sources, posé un ultimatum clair. « Les points sur les i ont été mis », confie une source gouvernementale. Résultat : Kishore Beegoo a démissionné le jour même, invoquant dans un communiqué « des pressions politiques inacceptables » et son refus de « poser des actes répréhensibles ».
SIGNAUX D’ALERTE
Selon nos sources, des désaccords subsistent sur d’autres dossiers. Toutefois, des efforts sont entrepris pour trouver des terrains d’entente « dans l’intérêt supérieur du pays ». Au-delà de ces cas concrets, les observateurs notent une érosion progressive de la dynamique initiale de la coalition. Cette discrétion contraste avec l’amitié affichée depuis la campagne électorale par les deux leaders, qui multipliaient les apparitions complices lors de cérémonies officielles.
Ces derniers jours, lors de sorties publiques, les échanges se limitent. Une rupture ouverte, bien qu’improbable à court terme, pourrait plonger le gouvernement dans une instabilité, même si le PTr, soutenu par ND et ReA, maintiendrait une majorité relative. Si le MMM quittait la coalition, le gouvernement ne disposerait plus que de 41 sièges sur 70, soit environ 58 % des voix à l’hémicycle, conservant une majorité absolue mais affaiblie face à une opposition de 29 sièges. Pour l’heure, les deux leaders maintiennent une façade d’unité, mais les signaux d’alerte se multiplient. La bonne humeur affichée depuis la campagne électorale par les deux leaders, qui multipliaient les apparitions complices lors des cérémonies officielles, semble s’effriter. D’ailleurs, ces derniers temps, lors de sorties publiques, les échanges se limitent.
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