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Allégations de trafic d’influence et pots-de-vin : l’Icac enquête sur l’éventuelle implication du ministre Gobin

Rajanah Dhaliah a été inculpé de trafic d’influence jeudi devant le tribunal de Port-Louis.
  • Rajanah Dhaliah bientôt de retour au Réduit Triangle

Le « High Profile Case » portant sur le délit présumé de pot-de-vin entourant l’octroi d’un permis de bail pour un terrain de chasse à Grand-Bassin a connu un développement majeur. Après six mois d’investigations, les enquêteurs de l’Independent Commission Against Corruption (Icac) ont procédé à une deuxième arrestation, jeudi. Il s’agit de celle du député de la majorité gouvernementale et ancien PPS Rajanah Dhaliah. 

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L’élu de la circonscription n° 7 (Piton/Rivière-du-Rempart) a été inculpé de trafic d’influence devant le tribunal de Port-Louis avant d’être libéré sous caution (voir encadré). Il lui est reproché d’avoir sollicité une somme de Rs 4 millions à un dénommé Ajay Kumar Jeetoo afin d’user de son influence pour faciliter l’octroi, par le ministère de l’Agro-industrie et de la sécurité alimentaire, d’un bail à The Eco Deer Park Association pour un terrain d’une superficie de 250,76 hectares à Grand-Bassin pour des activités de chasse et de pêche. 

Il nous revient qu’il a fait valoir son droit au silence sur certaines questions majeures relatives à ce dossier. Rajanah Dhaliah devra très prochainement retourner au Réduit Triangle pour la suite de son interrogatoire.

D’autre part, l’Icac poursuit son enquête pour déterminer si le ministre Maneesh Gobin serait impliqué dans cette affaire. À ce stade, l’Attorney General n’a pas encore été auditionné. Se référant à un article paru dans Le Défi Plus, samedi, qui indique que « l’Icac dit n’avoir rien d’incriminant contre Maneesh Gobin jusqu’à présent », la Commission anticorruption a tenu à préciser, samedi, qu’elle n’a jamais communiqué une telle information à quiconque. 

En mai dernier, Rajesh Ramnarain, ancien président du Sugar Investment Trust (SIT) et Principal Inspector au Registrar of Associations, avait été appréhendé par l’Icac dans le cadre de cette affaire. Il avait été libéré après avoir fourni une caution de Rs 100 000 et signé une reconnaissance de dette d’un montant de Rs 350 000.

L’enquête de l’Icac porte sur une réclamation présumée de la somme de Rs 3,2 millions pour faciliter l’obtention du bail d’un terrain à Grand-Bassin à The Eco Deer Park Association. La Commission anticorruption s’était intéressée à ce terrain de chasse après avoir eu vent de l’organisation de soirées privées sur place par une agence d’événementiel appelée le Fellone Crew, proche de Jean-Hubert Celerine, alias Franklin. L’un des gérants de ce terrain de chasse, Shaan Kumar Choolun, alias Mithun, avait été arrêté par l’Icac pour délit présumé de blanchiment d’argent.

Par la suite, l’Icac s’est appuyée sur les révélations de Keegan Etwaroo et du whistleblower Ajay Jeetoo, qui ont exposé en détail les modalités entourant le paiement de la somme de Rs 3,2 millions. Les deux dénonciateurs ont confirmé que c’est grâce à ce paiement qu’ils ont obtenu un terrain de 250 hectares à Dayot et Mangin, Grand-Bassin, connu sous le nom de « chassé » Etwaroo.

Callichurn : « Laissons les institutions faire leur travail »

Lors de la conférence de presse du MSM, samedi, Soodesh Callichurn est revenu sur l’arrestation de l’ancien PPS Rajanah Dhaliah. Il affirme avoir pleinement confiance dans les institutions. Selon lui, l’Icac a pris le temps nécessaire pour mener son enquête avant de procéder à son arrestation. 
« Le PPS Dhaliah a été convoqué et a donné sa version des faits. D’après ce que nous avons vu, l’Icac a considéré qu’il y a des éléments qui ont contribué à son arrestation et à sa libération sous caution à la suite d’une accusation provisoire. Laissons l’enquête suivre son cours, et par la suite, nous verrons s’il y a matière à poursuites », déclare-t-il. 

Il déplore également les « palabres » des observateurs et des opposants politiques qui soutiennent que le ministre Maneesh Gobin devrait également être arrêté. « Je crois que ces personnes ne peuvent se substituer aux institutions qui mènent une enquête. Elles sont les mieux placées pour connaître les éléments nécessaires pour convoquer une personne en suivant les procédures appropriées », réplique Soodesh Callichurn.

Les conditions de la remise en liberté de l’ex-PPS Dhaliah

Au tribunal de Port-Louis jeudi, la police n’a pas objecté à la libération sous caution de l’ex-PPS. Rajanah Dhaliah a dû s’acquitter d’une caution de Rs 100 000 et signer une reconnaissance de dette de Rs 1 million. Selon les conditions imposées par la magistrate Shavina Jugnauth, il ne doit en aucun cas, que ce soit directement ou indirectement, être en contact avec les témoins dans cette affaire.

Une peine maximale de dix ans de prison 

En cas d’un verdict de culpabilité, en vertu de l’article 10(5) du Prevention of Corruption Act 2002 concernant le délit de trafic d’influence, Rajanah Dahliah encourt une peine maximale de dix ans d’emprisonnement.  

Quel sort pour les députés arrêtés ?

Le cas de Rajanah Dhaliah est loin d’être un cas unique. Au cours des 15 dernières années, plusieurs autres députés ont dû quitter leur fonction de ministre ou de PPS après avoir été arrêtés ou condamnés pour leur implication présumée dans des affaires illicites. Toutefois, soit il n’y a pas eu de suite, soit ils ont été blanchis par la justice.

Le cas le plus connu est sans doute celui qui concerne l’actuel Premier ministre Pravind Jugnauth lui-même. Le 1er juillet 2015, il soumet sa démission en tant que ministre de la Technologie, de la communication et de l’innovation. Le lendemain, il sera condamné à une peine de 12 mois d’emprisonnement pour conflit d’intérêts dans l’affaire MedPoint. Le 25 mai 2016, il sera acquitté par la Cour suprême. L’affaire sera ensuite portée devant le Privy Council par le Directeur des poursuites publiques. Alors qu’il est déjà Premier ministre, Pravind Jugnauth sera blanchi par le Privy Council, le 25 février 2019.

Le 22 juillet 2011, Maya Hanoomanjee, alors ministre de la Santé, a été arrêtée dans le cadre de l’affaire MedPoint et a dû démissionner de son poste. Cette arrestation a entraîné le départ du MSM du gouvernement de coalition avec le PTr et le PMSD, le 26 juillet 2011.

Début avril 2013, le DPP, Me Satyajit Boolell, a annoncé dans un communiqué qu’il n’y avait pas suffisamment de preuves contre l’ancienne ministre de la Santé. De 2014 à 2019, Maya Hanoomanjee a officié comme Speaker de l’Assemblée nationale. Après les élections de 2019, elle est devenue ambassadrice de Maurice en Inde. Elle a démissionné le 6 septembre 2022 pour des raisons personnelles.

Le 26 juin 2013, Yatin Varma a été arrêté et inculpé provisoirement d’entrave à la justice. Il était accusé par Florent Jeannot d’agression à la suite d’un accident de la route. Celui-ci alléguait qu’il avait ensuite reçu des propositions financières pour retirer sa plainte pour agressions physiques.

Quelques jours plus tôt, le 18 juin 2013, Yatin Varma avait dû soumettre sa démission en tant qu’Attorney General du gouvernement PTr-PMSD. Finalement, Yatin Varma a été blanchi par le tribunal de Rose-Hill, le 10 juillet 2014.

Toujours dans cette même affaire, Reza Issack, alors PPS, a été arrêté le 20 juin 2013 car, selon les allégations de Florent Jeannot, l’élu travailliste était présent lors des discussions pour un arrangement financier. Il a donc dû démissionner de son poste de PPS. Cependant, Reza Issack a toujours nié les accusations. En avril 2014, il a été totalement blanchi par le DPP et a réintégré son poste de PPS pour les circonscriptions n° 19 et n° 20. En revanche, Florent Jeannot a été condamné à une amende de Rs 3 000 pour conduite dangereuse dans cette affaire.

En mars 2016, Raj Dayal a été contraint de démissionner de son poste de ministre de l’Environnement dans le cadre de l’affaire « bal kouler », sur ordre de sir Anerood Jugnauth, alors Premier ministre. Il a été poursuivi pour « bribery by public official » en vertu du Prevention of Corruption Act. Il était reproché à Raj Dayal d’avoir sollicité un pot-de-vin pour l’achat de 50 « bal kouler » destinés aux célébrations de la fête de Holi, en échange d’un permis EIA pour un morcellement à Gros-Cailloux.

Il est décédé le 19 décembre 2021, avant la conclusion de son procès, pour lequel il a toujours clamé son innocence.

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