Le Mouvement militant mauricien (MMM) ira seul aux prochaines élections générales n’étant pas prêt à s’allier au Parti travailliste dirigé par Navin Ramgoolam ou au Mouvement socialiste militant de Pravind Jugnauth. Le parti se présentera sous le leadership de Paul Bérenger. C’est ce qui ressort de l’interview accordée à Le Dimanche-L’Hebdo par son secrétaire général, Ajay Gunness.
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Paul Bérenger a annoncé que le MMM ira seul aux prochaines élections. Est-il sérieux ?
Le MMM est plus que sérieux en disant qu’il ira seul aux prochaines élections générales et cela pour deux raisons. D’abord, il n’est pas question que le parti travaille avec Navin Ramgoolam. Ensuite, tout sépare le MMM du MSM car ce parti fait pire que ce qu’a fait Navin Ramgoolam. Le MMM est la seule alternative crédible pour nettoyer et redresser le pays.
Êtes-vous enthousiaste ?
Je suis à 200 % enthousiaste comme tous les membres du bureau politique et des autres instances du parti. C’est une décision de notre assemblée des délégués, une décision qui vient de la base.
«Après tous les scandales de Navin Ramgoolam et avec toutes ses casseroles, il est hors de question pour le MMM de s’approcher de lui.»
Êtes-vous conscient que votre traversée du désert risque de se prolonger, après deux défaites électorales successives – 2010 et 2014 -, si le MMM se présente seul?
Je n’appellerai pas cela une traversée du désert. Même dans l’opposition, le MMM apporte beaucoup au pays. En 2010, le parti s’est présenté seul aux élections. Si sir Anerood Jugnauth n’était pas venu à la rescousse de Navin Ramgoolam, c’est le MMM qui aurait remporté ces élections. L’écart entre le MMM et l’alliance MSM-PTr-PMSD n’était que de 4 à 5 %. En 2014, la population n’a finalement pas compris que le MMM voulait kick Navin Ramgoolam up et nettoyer le pays. Nous avons subi les dommages collatéraux parce que la population avait si marre de Navin Ramgoolam et de son comportement. À ce jour, du moins, on voit mal comment le MSM de Pravind Jugnauth et le Parti travailliste de Navin Ramgoolam pourraient contracter une alliance. Selon moi, le MMM ne compte pas se présenter en alliance avec le PTr encore moins avec le MSM. Pourquoi pas une élection à quatre avec le Parti mauricien social-démocrate(PMSD) qui annonce également son intention d’affronter l’électorat seul au prochain scrutin national.
J’espère que ce parti ne va pas changer d’avis. Dans un match à quatre, le MMM a d’excellentes chances de remporter la victoire.
Ne sentez-vous pas une certaine réticence de la part de l’électorat, surtout rural, à confier le fauteuil de Premier ministre à Paul Bérenger?
Pas du tout. C’est tout simplement un slogan véhiculé par les adversaires de Paul Bérenger. Contrairement au deal papa-piti, l’alliance MMM-MSM avait aux élections de 2000, présenté Paul Bérenger comme Premier ministre dans un ‘Prime ministership sharing’. C’était fait ouvertement et non en catimini comme cela a été le cas par la présente majorité gouvernementale. L’électorat s’était alors prononcé en toute connaissance de cause en faveur du tandem Anerood Jugnauth-Paul Bérenger. Et comme chef du gouvernement Bérenger a fait honneur au pays avec plusieurs réalisations à son actif.
Le président de la Hindu House, Viren Ramdhun, avance que ce sont les circonscriptions rurales qui façonnent la majorité gouvernementale à chaque élection générale. Qu’en pense-vous ?
Quand on parle des présidents comme Ramdhun ou Dulthumun, je me dis que ce sont des girouettes politiques. Hier, ils soutenaient Navin Ramgoolam et cette proximité était critiquée par Pravind Jugnauth. Présentement, ils chantent les louanges de Pravind Jugnauth. Il est cependant triste de constater qu’on a un jeune Premier ministre qui partage la même plate-forme que Viren Ramdhun et qui sourit lorsque ce dernier se met à tenir des propos passéistes, communautaristes. Cela m’a tout l’air d’être un sourire complice. Il me plaît de souligner que dans l’ensemble, les réactions des internautes face aux propos de Viren Ramdhun ont été salutaires. Les gens récusent un tel comportement.
Nous sommes à plus de deux ans de la prochaine échéance électorale, à quoi cela sert-il de dresser, dès maintenant, la liste de candidats et de désigner les membres d’un Shadow Cabinet ?
Qu’est-ce qui vous permet de dire que les élections sont dans deux ans. Nous au MMM, nous pensons que ‘anything can happen at anytime’. Avec tous les scandales qui ne cessent d’éclater, je suis d’avis qu’il y aura des rebondissements dans les jours à venir. Le MMM se prépare activement pour les élections générales.
«Je me demande si une ‘Soornack bis’ ne se profilerait pas à l’aéroport.»
N’êtes-vous pas en train de rêver puisque l’alliance MSM-Muvman liberater dispose d’une majorité confortable au parlement ?
C’est vrai que numériquement l’alliance MSM-ML dispose d’une majorité confortable. Cependant, il ne faut pas oublier qu’en 1982, l’alliance MMM/Parti socialiste mauricien avait obtenu 60-0 et que ce fut la cassure après neuf mois. En 2010, l’alliance MSM-PTr-PMSD avait aussi éclaté après deux ans et demi dans le sillage de l’affaire Medpoint. Et en 2016, l’alliance MSM-PMSD-ML a également été fissurée très vite. Plus les jours passent, plus ceux qui sont actuellement au gouvernement se rendront compte que le navire est en train de prendre eau et nombreux sont ceux qui vont songer à fuir comme des rats.
Est-ce que Paul Bérenger n’est pas en train d’isoler le MMM en fuyant Navin Ramgoolam comme de la peste, en critiquant souvent Xavier-Luc Duval et en tirant à boulets rouges sur les Jugnauth ?
Au contraire. Le MMM est dans l’opposition et fait son travail d’opposition. Après tous les scandales de Navin Ramgoolam et avec toutes ses casseroles, il est hors de question pour le MMM de s’approcher de lui. C’est quelque chose qu’approuvent les militants et la population. En ce qu’il s’agit de Xavier-Luc Duval, c’est bien qu’il apprenne c’est quoi l’opposition. Il ne faut surtout pas oublier que pendant plusieurs années, le PMSD a été partie prenante des abus commis sous le régime Ramgoolam et pendant deux ans sous le gouvernement soit disant lepep. Pour ne citer qu’un exemple, je pense que le PMSD ne peut se dédouaner dans l’affaire BAI. Quand le MMM faisait son travail d’opposition, Xavier-Luc Duval prenait la défense de ce groupe.
Et il a donné un coup de main à l’actuel gouvernement pour enterrer la BAI. Idem pour Betamax. Sous le gouvernement de Navin Ramgoolam, il a défendu le dossier Betamax et en compagnie des Jugnauth, il a fait couler le navire. Il ne faut pas oublier son penchant de noceur pendant cette dernière décennie. Puis, pensez-vous que le MMM se croise les bras avec l’indécent deal papa-piti qui n’a pas été plébiscité par l’électorat et qui est une atteinte à la démocratie ? Croyez-vous que le MMM fera de cadeau à la famille Jugnauth, à la lumière de nombreux scandales de ces deux dernières années ? À commencer par ce qui est connu comme l’affaire bal kouler, les nominations scandaleuses, le ministre de l’or et tant d’autres. Le MMM ne peut rester tranquille. On ne s’isole pas, mais on dénonce.
On a l’impression que le MMM souffre d’un manque d’initiative étant devancé par le PTr avec une motion de blâme contre la Speaker, par le MP avec une motion contre l’augmentation du prix du carburant et par le PMSD qui fait du biscuit Hanoomanjee son chou gras…
Le MMM ne fait pas de la politique à la légère. Nous travaillons nos dossiers en profondeur. Pour la motion contre la Speaker, Shakeel Mohamed aurait dû consulter le leader de l’opposition. Si c’est ce dernier qui avait déposé la motion, elle aurait eu plus de poids et de priorité à l’Assemblée nationale. Concernant la Motion of Disallowance contre l’augmentation du prix du carburant, la coïncidence veut que le MMM et le MP aient pris la même décision dans leurs instances respectives. Et les deux ont déposé leur motion. À l’initiative du MMM, Reza Uteem a été délégué pour se concerter avec Alan Ganoo sur le modus operandi. Nous travaillons de plus sur de gros scandales comme l’affaire Alvaro, la privatisation de la Central Water Authority, le Build Mauritius Fund et tant d’autres. Le MMM travaille ses dossiers sans verser dans le sensationnalisme. Le MMM est et reste une opposition constructive.
Ne craignez-vous pas que ce soit le déluge après Paul Bérenger, car il n’y a pas de plan de succession pour le poste de leader ?
Pourquoi souhaitez-vous que Paul Bérenger s’en aille d’aussitôt ? Il est là pour encore très longtemps parce qu’il a la capacité et c’est lui qui dirigera le MMM lors des prochaines élections. Il ne faut pas que le retrait de Paul Bérenger devienne une obsession. Il est et restera un politicien hors pair qui fait la fierté du pays et du MMM. De toute façon, soyez rassuré, le MMM dispose d’une équipe d’hommes et de femmes compétents et saura décider de la relève le moment venu.
Comment le MMM s’apprête-t-il à aborder la rentrée parlementaire ?
Dans un Fighting mood. Surtout quand on aura en face de nous un Premier ministre qui n’a pas de mandat populaire. On ne va lui faire aucun cadeau. Le MMM prépare une série de dossiers sur des scandales qu’il compte dénoncer à la rentrée parlementaire.
Une opposition parlementaire soudée est-elle envisageable?
Nous avons toujours prônée une opposition parlementaire unie. On n’a pas de problème à accorder nos violons au parlement. Mais il n’est pas question de rapprochement ou de collaboration en dehors du parlement. Il est souhaitable qu’on dénonce le gouvernement au parlement en parlant d’une seule voix.
Pensez-vous que l’affaire de biscuits fournis à la boutique hors taxe de l’aéroport aura des répercussions sur la Speaker ?
Depuis sa nomination, la Speaker a failli à plusieurs reprises. Je pense qu’elle ne connaît pas son rôle et ne sait pas conserver son indépendance. Souvenez-vous, qu’elle avait en décembre, participé à un dîner politique à la Clarisse House sous prétexte que c’était un dîner familial. Il y a eu les factures de l’hôpital Apollo Bramwell. Quand la presse a dénoncé des factures impayées de certains politiciens, elle s’est empressée à régler les siennes. Maintenant, il y a la saga biscuits. Il y a des zones d’ombres qui restent à élucider. Je me demande si une ‘Soornack bis’ ne se profilerait pas à l’aéroport.
Pour terminer, est-il vrai que vous allez quitter la circonscription rurale No 10 pour la circonscription urbaine du No 16 ?
En tant que secrétaire général du parti, je suis appelé à être en contact dans les 20 circonscriptions du pays. C’est vrai que j’ai été candidat à cinq reprises à Montagne-Blanche/GRSE. C’est vrai aussi que j’habite le no.16. Et que je donne un coup de main dans cette circonscription. Mais ne vous inquiétez pas, lors des élections générales, vous saurez qui sera dans telle ou telle circonscription.
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