Live News

Affidavit juré à La Bastille, Phœnix : les troublantes déclarations de Vishal Shibchurn sur la mort de Kistnen

Vishal Shibchurn dit avoir été menacé de mort par deux hauts gradés de la police.
  • Rs 25 M pour liquider l’ex-agent du MSM

De la prison de Phœnix (La Bastille), le détenu Vishal Shibchurn, âgé de 50 ans, a juré un affidavit, le mercredi 31 juillet 2024. Il cite plusieurs personnalités dans le document et affirme que Rs 25 millions avaient été promises pour l’assassinat de Soopramanien Kistnen. 

Publicité

Le détenu Vishal Shibchurn, résident de St-Hubert, affirme détenir des informations « fiables » concernant l’identité des coupables et ceux ayant « orchestré le meurtre » de Soopramanien Kistnen. Ce dernier, ancien activiste du Mouvement Socialiste Militant (MSM) dans la circonscription no 8 (Quartier-Militaire/Moka), avait été retrouvé mort le 18 octobre 2020 dans un champ de canne à Moka. Le mercredi 31 juillet 2024, Vishal Shibchurn a juré un affidavit depuis la prison de La Bastille, rédigé par son avoué, Me Pazhany Rangasamy. Le détenu dit espérer que la justice prévaudra et que les coupables seront démasqués et traduits en justice.

Dans l’affidavit de Vishal Shibchurn, plusieurs personnalités publiques sont mentionnées, dont l’ancien ministre du Commerce, Yogida Sawmynaden. L’habitant de St-Hubert affirme que le meurtre de l’ex-agent politique serait le fruit d’un complot de « haut niveau » et que la somme convenue pour ce crime était de Rs 25 millions. Le quinquagénaire précise d’emblée qu’il n’est pas impliqué dans cette affaire.

Tout aurait commencé, selon Vishal Shibchurn, en octobre 2020, avec un appel téléphonique de son « ami proche », le défunt Manan Fakhoo, tué le 21 janvier 2021 à Beau-Bassin. Il explique que le dénommé Fakoo lui avait demandé de l’aide « sans préciser l’objet de cette demande ».

Selon Vishal Shibchurn, Manan Fakoo lui aurait cependant révélé qu’il était en présence de six autres personnes, dont les noms sont cités dans le document. L’ancien pompier précise qu’il n’a pas rejoint le point de rendez-vous à Blue Bay.

Plus tard, après avoir réussi à joindre Manan Fakoo au téléphone, Vishal Shibchurn aurait tenté de le confronter en lui demandant : « Dir mwa pa to mem deryer la mor sa azan MSM dan Moka la ? » Selon le détenu, Manan Fakoo aurait paniqué, mettant fin à la conversation et devenant injoignable. Quelques jours après, lors d’une rencontre avec son « ami proche », ce dernier lui aurait « avoué » avoir « supervisé le meurtre », qui aurait été commis par d’autres personnes.

Rs 1 million aux meurtriers

En décembre 2020, Vishal Shibchurn affirme avoir reçu un appel d’un émissaire de Yogida Sawmynaden, lui demandant de se rencontrer. Quarante-cinq minutes plus tard, deux hommes se seraient présentés à sa ferme hydroponique, notamment celui qui l’avait appelé et un individu se présentant comme un policier.

Cet habitant de St-Hubert affirme qu’au cours d’une réunion avec Manan Fakoo et un proche collaborateur du gouvernement, ce dernier aurait révélé que seule une première tranche de Rs 1 million avait été versée aux meurtriers. Manan Fakoo, agissant comme intermédiaire, subissait une pression croissante de la part des « présumés meurtriers » pour obtenir le solde. Le collaborateur aurait assuré qu’une haute personnalité politique garantirait le paiement du montant dû.

Vishal Shibchurn affirme avoir entendu le collaborateur du gouvernement reprocher à Manan Fakhoo la manière « non professionnelle » dont le corps de Soopramanien Kistnen avait été calciné. Manan Fakoo aurait alors révélé que des équipements de protection individuelle contre la COVID-19 avaient été utilisés pour commettre le crime afin de ne laisser aucune trace.

Plus tard, Manan Fakoo a été assassiné par balles à son tour, selon Vishal Shibchurn, pour « l’empêcher de divulguer des informations sensibles ». L’ex-pompier soutient avoir tenté de dénoncer cette affaire à plusieurs reprises, mais par peur pour sa sécurité et celle de sa famille, il est resté silencieux. En novembre 2021, il a envoyé des lettres au Commissaire de police, Anil Kumar Dip. Lors d’une rencontre avec un ancien haut gradé de la police et un inspecteur, le détenu allègue avoir été menacé de mort. La conversation aurait eu lieu en présence d’un officier de la prison, qui a aussi été averti de ne pas révéler la nature de la discussion.

Yogida Sawmynaden : « Se enn koup monte »

L’ancien ministre du Commerce crie au complot. Il est intervenu sur les ondes de Radio Plus après que son nom a été cité dans l’affidavit de Vishal Shibchurn. « Se enn konplo, enn kou monte. Mo pa mem konn li, zame mone zwenn personn. Zot pe rakont tou kalite zistwar, less zot rakonte », dira Yogida Sawmynaden. Il met « ninport ki o defi pou vinn dir ki linn rankontre Vishal Shibchurn ou enn lot dimounn ». Selon lui, « eleksion pre. Tousala se pou devie latansion e ampes ban anketer fer zot travay ». Yogida Sawmynaden ajoute : « Je suis l’homme à abattre au numéro 8. Less zot kontign zot konplo ».

Enquête judiciaire

Le tribunal avait réclamé une investigations approfondies

Le corps calciné de Soopramanien Kistnen a été retrouvé dans un champ de canne à Telfair, Moka, le 18 octobre 2020. Une enquête judiciaire, menée devant le tribunal de Moka, a conclu à un acte malveillant (foul play). Le tribunal avait suggéré des pistes pour une enquête approfondie, notamment l’allocation des contrats publics, de même que les fameux « Kistnen Papers », un document qui aurait attesté des dépenses électorales dans la circonscription numéro 8 (Quartier-Militaire/Moka). 

Le tribunal devait, par ailleurs, décrier l’enquête policière initiale dans l’affaire qui avait conclu à un suicide. L’enquête judiciaire a été présidée par l’ancienne magistrate Vidya Mungroo-Jugurnath. Les travaux avaient pris fin le 2 septembre 2021. Pas moins de 60 témoins avaient été entendus : Yogida Sawmynaden, Simla Kistnen, le veuve de Soopramanien Kistnen, Vinay Appanah et Deepak Bonomally, entre autres.

La crédibilité du détenu remise en cause par les Casernes centrales

L’affidavit juré par Vishal Shibchurn, faisant état d’un complot visant à liquider Soopramanien Kistnen, fera l’objet d’une enquête des Casernes centrales. Dans ce document juré par le détenu Shibchurn, des allégations ont été faite contre certaines VVIP, personnalités politiques et autres individus gravitant dans ce milieu et leurs proches. 

Mention est aussi faite à propos d’individus en détention et d’un récidiviste, tué par balle il y a quelque temps. Aux Casernes centrales, on affirme que certains points de l’affidavit seront passés au crible. Certaines personnes mentionnées, surtout celles en détention, pourraient être auditionnées à la lumière de ce document juré par le détenu Shibchurn.

Nos sources aux Casernes centrales confient que Vishal Shibchurn a déjà été entendu par le Central Criminal Investigation Department (CCID) dans le passé. Il avait fourni des informations entourant la mort de Soopramanien Kistnen. Ces propos avaient été vérifiés et s’étaient avérés infondés. 

D’ailleurs, même dans d’autres High Profile Cases, nos sources font état de dépositions de Vishal Shibchurn faites à titre d’informateur ou de témoin. Cependant, il n’avait pu étayer ses propos par des éléments concrets. « Boukou kitsoz linn dir lors case Fakhoo me pann kapav verifie. La ousi li pe evok enn dimounn mor e li inpe difisil », concèdent des enquêteurs chevronnés.

Me Rangasamy : « Vishal Shibchurn inn pran enn risk » 

Me Pazhany Rangasamy, avoué de Vishal Shibchurn, a déclaré que son client a fait plusieurs dénonciations dans son affidavit. « Li ‘on remand’ dans prison, linn pran enn risk pou li fer sa lafidavit-la, linn al an detay », a réagi l’avoué sur les ondes de Radio Plus. Il a souligné que cet affidavit a été servi au Commissaire de police, au Premier ministre et au Directeur des poursuites publiques (DPP). Selon lui, son client a exprimé des remords. « Li ti pou ena remor konsians si li pa dir piblik seki li kone (...) ». 

Me Rangasamy dira que Vishal Shibchurn demande aux autorités de prendre des mesures appropriées à la lumière de ses dénonciations.  A noter l’avoué est membre du PTr et cette démarche est diversement commentée.

What’s next ?

Une déposition formelle de Shibchurn ? 

Vishal Shibchurn devrait être appelé à consigner une déposition formelle pour soutenir les éléments avancés dans son affidavit. À la lumière de ces éléments, la police devrait alors procéder à l’interpellation des protagonistes mentionnés par le détenu. « Li bizin vinn donn enn depozision formel pou eksplike, lerla lapolis pou fer so lanket. Me si aster dan enn depozision, pe vinn dir fos kitsoz, li riske arete pou ‘swearing false affidavit’. »

Simla Kistnen : « Pre pou fer kat an, mo konfian laverite pou eklate »

La veuve de Soopramanien Kistnen attend que justice soit rendue. « J’espère que la vérité triomphera bientôt. Mo trouv ena enn ta non ki mansione. Pre pou fer kat an, mo konfian laverite pou eklate ».

Vishal Shibchurn - L’enfant terrible du Sud

Vishal Shibchurn est soupçonné d’être le leader du groupe surnommé « Gang du Sud ». Début février 2024, il est accusé de séquestration et d’agression aux côtés de son fils Mayur. Considéré comme l’enfant terrible du Sud, il est également membre du groupe socioculturel Hindu Shakti Senna. Il serait lié à plusieurs attaques, dont l’agression d’Aslam Noursing, qui a eu les poignets sectionnés, ainsi qu’à divers délits de possession et de menaces avec une arme à feu.

En 2017, Vishal Shibchurn est recruté comme sapeur-pompier, mais il se retrouve rapidement impliqué dans une affaire de dégradations matérielles. Il est alors suspendu de ses fonctions et n’a jamais réintégré le service. La même année, il est arrêté pour un cambriolage à la State Bank of Mauritius (SBM) de Port-Louis, où Rs 4 M avaient été volées. Lors de son arrestation à St-Hubert, une perquisition permet à la police de découvrir un fusil, des munitions, des bijoux et 36 plants de cannabis.

En novembre 2022, Vishal Shibchurn, son fils Mayur, et Indrajeet Bhaugeerutty sont arrêtés pour possession de drogue, avec 170 grammes de haschisch. Six mois plus tard, le dossier d’enquête disparaît mystérieusement. En novembre 2023, une hôtesse de l’air de 19 ans l’accuse de commentaires injurieux, sexuels et menaçants sur ses photos Facebook.

 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !