Rakesh Gooljaury avait reçu des menaces de l’assistant-commissaire de police Heman Jangi, deux jours avant qu’il ne change de version dans l’affaire Roches-Noires. C’est ce qu’a déclaré l’homme d’affaires, lors du procès de Navin Ramgoolam, Rampersad Sooroojebally et Dev Jokhoo en Cour intermédiaire, jeudi 13 juillet 2017.
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Le contre-interrogatoire de Rakesh Gooljaury par Me Gavin Glover, Senior Counsel, a fini par révéler que le principal témoin de la poursuite avait reçu un appel de l’assistant-commissaire de police (ACP) Heman Jangi, le 9 janvier 2015. Le haut-gradé avait menacé de procéder à son arrestation s’il ne témoignait pas dans l’affaire Roches-Noires.
Un appel catalyseur, car deux jours plus tard, soit le dimanche 11 janvier 2015, Rakesh Gooljaury se rend au Central Criminal Investigation Department (CCID) en compagnie de son avocat Sanjeev Teeluckdharry. Il dit être rongé par les mensonges qu’il a débités dans sa première déposition à la police, le 3 juillet 2011, au campement de Navin Ramgoolam, à Roches-Noires.
L’ex-Premier ministre Navin Ramgoolam est accusé d’entente délictueuse dans le sillage de l’enquête sur le cambriolage de son bungalow à Roches-Noires dans la nuit du 2 au 3 juillet 2011. Dev Jokhoo et Rampersad Sooroojebally sont inculpés sous ce même chef d’accusation. Ils plaident non coupables.
Me Gavin Glover (GG) : Vous dites dans votre déposition au CCID le 11 janvier 2015 que vous avez décidé de dire la vérité dans l’affaire Roches-Noires après avoir pris connaissance de certains articles dans les journaux ?
Rakesh Gooljaury (RG) : Oui, dans l’édition de Week-End du 11 janvier 2015 et aussi sur Radio Plus. J’étais inquiet car je craignais que la police ne m’arrête. Je n’ai pas lu l’article paru dans l’hebdomadaire, mais uniquement le titre en une.
GG : Mais la une de Week-End ne fait pas mention d’une quelconque arrestation ?
RG : J’ai reçu un appel de l’ACP Heman Jangi, le vendredi 9 janvier 2015. Il a menacé de m’arrêter si je ne témoignais pas dans l’affaire Roches-Noires.
GG : Avez-vous évoqué les menaces de l’ACP Heman Jangi avec vos avocats ?
RG : Oui, j’ai téléphoné à Me Siddartha Hawoldar. Il n’était pas à Maurice. Il m’a dit qu’il ne peut me représenter vu qu’il a été l’avocat de Navin Ramgoolam après décembre 2014. Ma compagne est une très bonne amie de l’épouse de Me Sanjeev Teeluckdharry. J’ai alors retenu ses services. J’ai dit à Me Teeluckdharry de s’occuper de cette affaire. Je lui ai fait part de mon intention de dire la vérité sur le vol perpétré au campement de Navin Ramgoolam dans la nuit du 2 au 3 juillet 2011. Me Sanjeev Teeluckdharry m’a dit qu’il allait faire le nécessaire et que je devais me rendre au CCID vers 17 heures le même jour.
GG : Vous étiez un grand ami de Navin Ramgoolam ?
RG : Oui, il est toujours mon ami.
GG : Vous vous rendez au CCID sachant bien que la police peut à tout moment vous arrêter ?
RG : Oui. L’ACP Heman Jangi m’a dit qu’il allait me convoquer en cas de besoin. Il a même parlé de la possibilité de fournir une caution.
Le contre-interrogatoire de Me Gavin Glover a révélé que Rakesh Gooljaury n’a jamais été arrêté dans l’affaire Roches-Noires bien qu’il ait été poursuivi en cour intermédiaire sous une accusation de « effecting public mischief ».
«Navin Ramgoolam s’est blessé en protégeant Nandanee Soornack»
Lors de son interrogatoire par Me Mohana Naidu, Senior Assistant Director of Public Prosecutions , Rakesh Gooljaury est revenu sur la soirée passée au campement de Navin Ramgoolam le 2 juillet 2011 et sur l’agression de ce dernier par un individu qui l’épiait alors qu’il partageait un moment intime avec Nandanee Soornack.
Me Mohana Naidu (MN) : Qu’avez-vous dit dans votre déposition au CCID le 11 janvier 2015 ?
Rakesh Gooljaury (RG) : J’ai dit la vérité. J’avais menti dans ma déposition le 3 juillet 2011. La veille, mon ex-épouse et moi avons été invités par Nandanee Soornack et par Navin Ramgoolam à une soirée au campement de l’ancien PM à Roches-Noires. Après le dîner on a dansé. On est ensuite rentré vers 00 h 30. Tous les invités étaient partis et il ne restait que Navin Ramgoolam et Nandanee Soornack au campement.
Vers deux heures du matin, j’ai reçu un appel de Nandanee Soornack. Elle était en larmes et troublée. Elle m’a dit de revenir au campement immédiatement. Je l’ai fait.
Quand je suis arrivé, Navin Ramgoolam était dans le salon. Ses cheveux étaient « chiffonnés ». Nandanee Soornack a dit qu’un voleur a agressé Navin Ramgoolam avec un tournevis. Cinq à 10 minutes plus tard, Rampersad Sooroojebally et Dev Jokhoo sont arrivés.
Nandanee Soornack nous a raconté qu’elle était au lit avec Navin Ramgoolam et qu’un jeune homme de 25-26 ans les épiait. Il portait un short blanc et était torse nu. Il a, par la suite, fait irruption dans la chambre en passant par la fenêtre. Il s’est jeté sur elle, mais Navin Ramgoolam l’a défendue. C’est ainsi que l’ancien Premier ministre s’est blessé.
Nandanee Soornack a aussi dit que c’est elle qui a calmé le voleur et lui a donné une somme de Rs 20 000 pour qu’il parte.
MN : Que s’est-il passé par la suite ?
RG : Navin Ramgoolam et les deux hauts gradés de la police m’ont demandé de rapporter un cas de vol à la police. J’ai hésité, mais comme il s’agissait du Premier ministre et comme les deux hauts gradés m’ont donné la garantie que je ne risquais rien, alors j’ai accepté. J’ai, par la suite, déposé Nandanee Soornack et Navin Ramgoolam à leur domicile respectif. Ce dernier m’a remis les clés du campement pour que j’y revienne le même jour. Il était alors vers 3 h 00 du matin.
Navin Ramgoolam est représenté par sir Hamid Moollan (Queen’s Counsel), Me Gavin Glover (Senior Counsel) et Shaukat Oozeer. Narghis Bundhun (Senior Counsel) défend Rampersad Sooroojebally. Dev Jokhoo a retenu les services de Mes Mooloo Gujadhur et Kevin Lukeeram. Le contre-interrogatoire de Rakesh Gooljaury se poursuivra le 31 juillet 2017.
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