- Certains points toujours en suspens
L’atterrissage d’Adrien Duval dans le fauteuil de Speaker de l’Assemblée nationale ce jeudi après-midi, sauf revirement de taille, est un cas concret, mais pas nécessairement décisif, menant à une coalition entre l’alliance gouvernementale et le PMSD. D’ailleurs, si la motion qui sera présentée par le Premier ministre, Pravind Jugnauth, au Parlement vers 16 heures, est adoptée par majorité simple, les deux députés de l’opposition, Xavier-Luc Duval et Patrice Armance, continueront à siéger dans l’opposition. Aucune demande ne sera faite pour un changement de place dans la Chambre.
Il revient que si les pourparlers ont déjà bien avancé entre le MSM et le PMSD, certains points sont encore en suspens, notamment au niveau du nombre de candidatures - le PMSD en souhaiterait 12, mais le MSM penche plutôt vers 8 -, mais aussi la place à accorder à Xavier-Luc Duval dans le gouvernement si cette alliance remporte les élections générales.
Tractations autour du no 2
Au niveau de la garde rapprochée du Premier ministre, certains estiment que Steven Obeegadoo, Premier ministre adjoint et No 2 du gouvernement depuis le départ du PMSD en décembre 2016 en guise de protestation contre la création d’une Prosecution Commission visant à mettre le Directeur des poursuites publiques sous tutelle, mérite amplement de rester à son poste.
Pour rappel, cette démission avait empêché le gouvernement d’avoir la majorité de ¾ requise pour faire passer le Prosecution Commission Bill.
« Steven Obeegadoo est resté alors que d’autres ont quitté le navire. Pendant toutes ces années, il a été d’un apport important au gouvernement », indique-t-on dans le cercle du chef du gouvernement.
Pour rappel, le 14 avril dernier, après des mois de négociations qui butaient sur la répartition des tickets, l’alliance PTr/MMM/PMSD avait volé en éclats. En toile de fond, les huit investitures proposées au PMSD. Du côté des Bleus, avec Adrien et Alexandre Duval comme meneurs, cette proposition était inacceptable.
Le 4 avril, lors de l’émission « Au cœur de l’info », sur Radio plus, Adrien Duval avait déclaré : « Huit tickets, c’est inacceptable car cela blesse notre dignité. » Et d’ajouter que le PMSD « ne peut laisser sur le banc de touche des députés qui, en 2016, ont fait le sacrifice ultime en démissionnant pour l’amour de leur pays et qui ont montré qu’ils ne sont pas à vendre et qu’ils méritent notre confiance ».
Un poste qu’il connaît déjà
Présider les travaux de l’Assemblée nationale n’est pas du domaine de l’inconnu pour Adrien Duval. Devenu avocat en 2014, il a été élu aux élections générales de décembre 2014. À la première séance parlementaire après ce scrutin, Adrien Duval est nommé Deputy Speaker à l’âge de seulement 24 ans, faisant de lui un des plus jeunes Deputy Speakers au monde à ce jour. De 2014 à 2016, jusqu’à la démission du PMSD du gouvernement, il aura eu l’occasion de s’installer à plusieurs reprises dans le fauteuil de Speaker, en assurant l’intérim en remplacement de Maya Hanoomanjee.
Adrien Duval comme Speaker huit jours après la sortie de Xavier-Luc Duval contre Phokeer
Huit jours de cela, le 10 juillet, Xavier-Luc Duval, qui était plutôt discret jusqu’ici, avait fait une sortie en règle contre celui qui occupait alors le poste de Speaker, Sooroojdev Phokeer.
Dans un message poste sur sa page Facebook, Xavier-Luc Duval a écrit : « Démocratie parlementaire. Le Speaker s’emporte et s’excite à la moindre provocation. Les députés de l’opposition se sentent opprimés et trouvent que l’espace démocratique au Parlement rétrécit de séance en séance. La situation devient insupportable. Il faut absolument trouver une solution. »
La solution est venue moins d’une semaine plus tard, c’est-à-dire le 16 juillet, avec la démission « surprise » de Sooroojdev Phokeer, officiellement pour des raisons de santé, et la très probable nomination d’Adrien Duval comme nouveau Speaker.
L’opposition ne soutiendra pas la candidature d’Adrien Duval
L’opposition PTr/MMM/Nouveaux Démocrates ne soutiendra pas la candidature d’Adrien Duval comme Speaker. Ceci n’entravera cependant pas sa nomination, si la motion est présentée au Parlement, jeudi, à la reprise des travaux à 16 heures, car une simple majorité est suffisante pour avaliser la nomination du Speaker.
« On ne pourra certainement pas avaliser une telle proposition », confirme un dirigeant de cette alliance. À 14 heures, les députés PTr/MMM/ND se rencontreront au bureau du leader de l’opposition pour décider de la marche à suivre. Arvin Boolell, leader de l’opposition, affirme que « si on doit donner notre vote, ce serait à notre ami Zahid Nazurally ». Ce dernier est le Deputy Speaker depuis fin 2019.
« La nomination du Speaker devrait se faire de manière consensuelle. Sa nomination permettrait au Parlement de retrouver ses lettres de noblesse. Puis, il n’y a plus que trois ou quatre séances avant la dissolution du Parlement qui, si ce n’est pas fait avant, sera dissous automatiquement le 21 novembre. Pourquoi agir de façon provocatrice ? Si le PMSD et le MSM veulent faire alliance, ils n’ont qu’à le faire après la dissolution. C’est leur droit », ajoute-t-il.
Le leader de l’opposition, Arvin Boolell, estime pour sa part que Zahid Nazurally est « le candidat consensuel ». « Si le Premier ministre choisit de ne pas aligner un candidat consensuel, il doit assumer ses responsabilités, surtout à la veille de la dissolution », a-t-il dit. Zahid Nazurally est le Deputy Speaker de l’Assemblée nationale. « Il mérite d’être élevé au titre de Speaker à la suite de la démission de Sooroojdev Phokeer », a soutenu Arvin Boolell.
Sur les éléments qui auraient pu jouer contre Zahid Nazurally, Arvin Boolell précise : « Il est une personne indépendante. À chaque fois qu’il était ‘in the chair’, il n’a pas fait de faveur et a toujours été impartial. »
Nando Bodha, député de Linion Moris, abonde dans le même sens. « Je ne serais pas à l’Assemblée au moment de la présentation de la motion pour l’élection, mais dans la rue pour manifester devant le Parlement », dit-il. Pour lui, « vu son parcours et le fait qu’il a fait honneur à son poste au fil des années, Zahid Nazurally devrait être un choix naturel ».
Nando Bodha insiste que « Sooroojdev Phokeer a été un déshonneur par rapport à l’institution qu’est le speakership. Le Leader of the House, Pravind Jugnauth, est totalement coupable, car Sooroojdev Phokeer n’aurait jamais pu se comporter de telle manière sans son approbation. Pour nous, Linion Moris, l’élection du Speaker ne devrait pas se faire de la façon qu’elle se fait maintenant, c’est-à-dire par le PM qui a la majorité et qui présente quelqu’un qui est approuvé par la majorité. La nomination aurait dû se faire dans le consensus entre majorité et opposition ».
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