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Accidents mortels dus à la conduite en état d’ivresse : les sentences jugées peu sévères

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Plusieurs accidents mortels sont enregistrés chaque année sur nos routes. Les causes de ces homicides involontaires sont : la conduite en état d’ivresse, l’excès de vitesse et l’imprudence. Toutefois, les sentences qui sont prononcées pour les coupables interpellent. 

Me Robin Appaya.
Me Robin Appaya.

Pas plus tard qu’en début de semaine, un jugement est tombé devant la cour intermédiaire. Un médecin a été jugé coupable d’avoir percuté un motocycliste, à Lower Vale, le 12 janvier 2014, alors qu’il conduisait sous l’effet de l’alcool. Il avait un taux élevé d’alcoolémie dans le sang, soit 105 milligrammes d’alcool pour 100 millilitres de sang. 

Il a été condamné à une amende de Rs 50 000 et a vu son permis de conduire être suspendu pour trois ans. 

Le Défi Plus passe en revue les différentes sentences rendues dans des cas d’accidents mortels provoqués par l’alcool au volant. Une dizaine de jugements a été analysés. Dans la majorité des cas, les chauffeurs ont été condamnés à une amende. Les peines de prison ont été converties en travaux communautaires dans certains cas et les permis de conduire ont été suspendus. 

Par exemple, il y a le cas d’un homme âgé de 24 ans qui avait été condamné à deux mois d’emprisonnement et à une amende de Rs 10 000 devant la cour intermédiaire. Il avait été jugé coupable d’homicide involontaire par imprudence et pour conduite en état d’ivresse. 

Cet habitant de Grand-Baie était impliqué dans un accident de la route, le 22 mars 2014, sur la route principale de la localité. Il avait renversé un motocycliste de 43 ans qui est mort. Le taux d’alcoolémie de l’accusé était de 66 milligrammes.

Il faut modifier la loi pour que ceux qui sont coupables de morts d’hommes aillent en prison."

Il y a aussi le cas d’un habitant de Sébastopol, qui a été condamné à trois ans de prison, le 20 août 2020, devant la cour intermédiaire pour homicide involontaire par imprudence. Il avait percuté une voiture, le 11 juin 2013 à Bel-Etang, causant la mort de quatre personnes, dont un adolescent de onze ans et blessant quatre autres. L’accusé avait été testé positif à l’alcootest. Le rapport avait clairement fait ressortir que l’accusé avait 80 milligrammes d’alcool dans 100 millilitres de sang le jour fatidique.

Déception

Ce sont là des cas, parmi tant de cas d’accidents mortels avec cause principale, la conduite en état d’ivresse. Ce qui ne manque pas d’interpeller. Marianne Sarah, présidente de l’Association Sarah ne cache pas sa déception. Impliquée dans un accident de la route avec son frère qui a eu moins de chance et qui a rendu l’âme, la survivante a créé cette association en vue d’aider et d’encadrer d’autres rescapés d’accidents de la route. 

Manoj Rajkoomar.
Manoj Rajkoomar.

« Chaque peine et jugement est différent dépendant du délit. Toutefois, les sentences ne sont pas assez sévères pour la conduite en état d’ivresse causant mort d’homme », s’insurge cette dernière. Ce qui n’a pas un effet dissuasif surtout sur les jeunes et les nouveaux conducteurs selon elle. 

Me Robin Appaya, avocat et vice-président de Prévention routière avant tout (PRAT), trouve interpellant les récentes sentences. « Si une personne est jugée coupable deux fois pour conduite en état d’ivresse, elle va directement en prison. Il n’y a pas de conversion en travaux communautaires. Par contre, lorsqu’un chauffeur consomme de l’alcool et qu’il est impliqué dans un accident mortel, c’est une amende ou bien des travaux communautaires. Il y a un problème quelque part », fait-il observer. 

Sentencing Guidelines

Il est d’avis qu’il faut modifier la loi pour que des personnes qui sont coupables de morts d’hommes alors qu’elles conduisaient en état d’ivresse aillent en prison. « Le magistrat a la discrétion entre une peine minimum ou maximum dans ce genre de cas. Contrairement à d’autres pays comme l’Angleterre, on n’a pas des 'Sentencing Guidelines'. On ne peut pas laisser une trop large discrétion aux magistrats dans ce genre de cas », estime le vice-président de PRAT. 

Selon lui, des juristes doivent compiler toutes les données et venir avec des 'guidelines' que les magistrats pourront prendre en considération pour chaque type de délits. 

Trop de temps

Manoj Rajkoomar, secrétaire de la fédération des moniteurs des auto-écoles, pour sa part, est d’avis que les sentences ne doivent pas tarder quand un chauffeur qui conduisait en état d’ivresse est reconnu coupable d’un accident fatal. 

« Il y a des sentences qui tombent après plusieurs années. Ce qui fait que les coupables sont oubliés. Il faut que les peines tombent dans un bref délai pour que les gens prennent conscience de la gravité du délit et que cela décourage d’autres personnes », indique notre interlocuteur. 

Me Urvashi Bissoondyal.
Me Urvashi Bissoondyal.

Il cite l’exemple du voleur de letchis chez l’ex-commissaire de police, dont le verdict est tombé le même jour et qui est resté dans les annales. Ce qui devrait être aussi le cas pour les accidents mortels avec pour cause l’alcool au volant, estime-t-il. 

Selon lui, les sentences, soit des amendes ou des travaux communautaires n’ont pas vraiment un effet dissuasif. « Il faut des sentences plus sévères. Cependant, il y a des procureurs qui ne bouclent pas leurs dossiers comme il se doit, alors que les magistrats se basent dessus pour prononcer leurs sentences. Des avocats profitent de ces failles pour sauver la peau de leur client accusé d’homicide involontaire en état d’ivresse », lance Manoj Rajkoomar. 

Contrôles rigoureux et réguliers

Me Urvashi Bissoondyal, avocate et membre exécutif de l’Association Sarah, a également été impliquée dans un accident de la route. « À cause de l’imprudence d’un chauffeur, j’ai eu une fracture de la colonne vertébrale. Je n’ai pu travailler pendant plusieurs mois. J’ai dû réapprendre à marcher », relate l’avocate. 

Concernant les sentences, « les magistrats ont le devoir de donner des jugements selon les lois. Ils prennent en compte les mitigating et aggravating circumstances avant de se prononcer », explique-t-elle. Elle ajoute aussi que d’autres facteurs sont aussi pris en considération, notamment l’âge et si une personne a un casier judiciaire vierge, entre autres.

Cependant, Me Urvashi Bissoondyal pense qu’il faut des contrôles policiers pour décourager des personnes à prendre le volant en état d’ivresse. « Il faut des contrôles plus rigoureux et réguliers. Il faut aussi sensibiliser les gens, car ce n’est pas possible d’avoir autant de morts sur nos routes dans un petit pays comme Maurice », estime-t-elle.

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