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18 mois après la fermeture de l’usine Texto Ltd : des employées avec plus de 20 ans de service attendent leur indemnisation

Malgré un recours en justice, la situation ne se décante pas.

Ils étaient quelque 300 employés à bosser pour l’usine Texto Ltd. Presque deux ans après la fermeture de l’usine, ils attendent toujours d’être indemnisés pour leur temps de service. Parmi, des mères de famille ayant travaillé pour cette usine pendant plus de vingt ans. La rédaction a rencontré plusieurs de ces ex-employées.

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Elles ont bossé dur, certaines pendant vingt-quatre ans ou plus. La journée s’étendait souvent au-delà des heures normales. Le travail pouvait durer jusqu’à minuit. Personne ne souhaite voir son usine ou son entreprise fermer ses portes en plein mois de décembre. 

C’est ce qui est pourtant arrivé aux employés de Texto Ltd, une usine de textile basée à La Croisée Cité La Cure, Vallée-des-Prêtres, Port-Louis. Un bon nombre des ouvriers étaient des Bangladeshis, mais l’usine comptait pas mal de Mauriciennes aussi. En décembre prochain, cela fera deux ans que l’usine a subitement cessé ses opérations. Les ex-employées se plaignent de n’avoir pas été indemnisées pour leur temps de service. L’affaire a bien été portée devant la justice, mais depuis, elles n’ont eu aucune nouvelle encourageante.

La situation des ex-employées mauriciennes rencontrées par la rédaction.

SHANTI MUNGUR
Âge : 56 ans
Situation familiale : Mariée et mère de deux enfants. Son mari est malade et travaille de temps en temps.
Temps de service : 23 ans
Quand l’usine a fermé ses portes, elle touchait Rs 3 900 par quinzaine. Elle était machiniste.

BINODHA MURDAY
Âge :  52 ans
Situation familiale : Mariée et mère de trois enfants. Le benjamin habite avec elle.
Temps de service : 24 ans
Elle a commencé son service dans la section Packing quand l’usine ne comptait qu’un étage. « À l’époque, il y avait beaucoup de commandes », raconte-t-elle. « On travaillait souvent jusqu’à fort tard. » Elle ajoute qu’elle n’a pas trouvé du travail après la fermeture de l’usine.

JOËLLE NADEN
Âge : 38 ans
Situation familiale : Mariée et mère de deux enfants âgés de 6 et 1 an.
Temps de service : 19 ans
Elle était Quality Controller. À la fermeture de l’usine, elle a trouvé du travail dans une entreprise qui fabrique des sacs. Son mari travaille comme helper dans un entrepot. En 2017,  elle était déjà enceinte. Le fait de se retrouver au chômage a été une période très angoissante pour elle. Elle avait déjà un enfant et en attendait un autre.

CINDY BAPTISTE
Âge : 40 ans
Situation familiale : Mariée et mère d’un enfant âgé de 11 ans.
Temps de service : 19 ans
Elle était Store Clerk. Elle touchait environ Rs 8 000 par mois.

THÉRÈSE VASUDAVEN
Âge : 68 ans
Situation familiale : Veuve et mère de cinq enfants. Une de ses filles, qui est mariée mais sans enfant, habite avec son mari chez elle.
Temps de service : 17 ans
Elle était cleaner. Elle touchait Rs 3 500 par quinzaine. Depuis, elle reste à la maison.

KOLANTEE RAJKUMAR
Âge : 34 ans
Situation familiale : Mariée et mère d’un garçon de 11 ans.
Temps de service : 4 ans
Elle a exercé comme helper. Elle touchait environ Rs 2 000 par quinzaine. Son mari, qui est âgé de 45 ans, est malade.

VEENA JEETUN
Âge : 48 ans
Situation familiale : Mariée et mère de deux enfants âgés de 25 et 20 ans. 
Temps de service : 15 ans
Elle travaillait comme machiniste. Elle touchait Rs 3 000 chaque quinzaine, l’argent du transport inclus. Son mari est aide-maçon mais  travaille de temps en temps. Leur second enfant suit des cours qu’elle finance elle-même.

MARZIANA HUSHNOO
Âge : 35 ans
Situation familiale : Mariée et mère d’un garçon âgé de 11 ans.
Temps de service : 16 ans
Elle était dans la section Packing. Elle touchait Rs 3 000 par quinzaine, tout inclus.
Son mari est soudeur, mais travaille à temps partiel, c’est-à-dire quand il y a du travail. « J’ai souvent travaillé la nuit, mais cet argent, je ne l’ai jamais eu », déclare-t-elle.

SAHABULIA NAILA
Âge : 44 ans
Situation de famille : Mariée et mère de deux enfants.
Temps de service : 10 ans
Elle était machiniste et touchait Rs 245 par jour, transport inclus.

HEMA JEETIUN
Âge : 42 ans
Situation de famille : Mariée et mère de deux enfants.
Temps de service : 15 ans
Machiniste, elle touchait Rs 2 200 par quinzaine. Sa fille s’est mariée, mais elle finance les cours de son fils, qui vit avec elle. Son mari est chauffeur de bus.

SHIRIN SHEIK CASSIM
Âge : la cinquantaine
Situation de famille : séparée de son mari.
Temps de service : 10 ans.
Elle était label checker. Elle touchait Rs 2 200 par quinzaine. Sa fille aînée est mariée, mais la seconde habite avec elle et ne travaille pas.

MUNITA RAMIAL
Âge : 36 ans
Situation de famille : Elle vit séparée de son mari. Elle n’a pas d’enfant.
Temps de service : 14 ans
Elle était helper/checker. Salaire : Rs 2 200 par quinzaine. Elle vit toute seule dans une maison qu’elle loue. En fait, elle vit dans une pièce unique contre un loyer de Rs 2 000. Cependant, la maison n’est pas pourvue en eau et pour ses besoins, elle doit se rendre chez sa mère, qui habite à quelques mètres de son toit.

Leevy Frivet : « Avec quoi payer le temps de service ? »

Où en est-on avec le dossier Texto Ltd ? Un premier appel au Bureau du travail de Port-Louis nous a dirigé vers le département légal, celui des procureurs de la cour industrielle. On nous a appris que l’usine avait été confiée à un administrateur, Huns Bhavesh Biltoo, qui était basé au Level 4, à Saint James Court. Il est le seul apte à nous donner les dernières nouvelles. Toutefois, il demeure injoignable dans un premier temps.

Les ex-employés de Texto Ltd sont représentés par le syndicaliste Atma Shanto. Lors d’une conversation téléphonique avec la rédaction, celui-ci a déploré « l’opacité » qui entoure toute cette affaire. « L’usine Texto Ltd a été placée sous administration judiciaire l’an dernier. Ce qui veut dire que les assets de l’usine doivent être vendus pour honorer ce qui est dû aux employés. Malheureusement, personne ne sait où on en est avec le dossier. Les employés, comme moi-même, sont dans le flou », a-t-il déclaré. Il a ajouté n’avoir jamais dialogué avec l’administrateur en question.

Soulignons que le lundi 15 juillet, les ex-employés de Texto Ltd ont eu une rencontre avec le Bureau du travail, à laquelle était aussi présent Atma Shanto. Comme cela n’a rien décanté, le syndicaliste a demandé une rencontre avec le ministre du Travail. Il n’a pas encore obtenu de réponse.

Ce qui agace surtout le syndicaliste, c’est la réponse de l’administrateur, qui a juste déclaré que « les procédures de liquidation ne sont pas encore terminées ». « Procédures pas terminées encore ? Depuis 2016 ? Ce n’est pas normal tout cela », a déclaré Atma Shanto.

Tout en mentionnant la Insolvency Act, Atma Shanto a déclaré que, si la situation ne se décantait pas, il comptait organiser une manifestation dans les prochains jours devant le ministère du Travail.

Leevy Frivet, attaché de presse du ministère du Travail, a déclaré que Atma Shanto demande que les ex-employés de Texto Ltd reçoivent « la même compensation que ceux de l’usine Palma ». Pour lui, cette demande « n’est pas recevable ». « L’usine a été déclarée en banqueroute. Avec quoi payer le temps de service aux employés ? Le seul moyen est de vendre les assets de l’usine. Mais on n’arrive pas à trouver preneur », a-t-il avancé.

  • LDMG

 

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