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 Force majeure : quand l’imprévisible devient un enjeu légal

Me Urvashee Domun apporte un éclairage sur la force majeure et son importance dans le cadre d’un litige juridique.

Les changements climatiques représentent une menace grandissante, pouvant avoir des conséquences dévastatrices tant sur un pays que sur la vie d’une personne. Mais quand est-ce que la force majeure entre en jeu dans de tels cas ? Quelle est sa définition, son utilité et son importance dans le cadre d’un litige juridique ? Éclairage avec Me Urvashee Domun.

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Qu’est-ce que c’est la force majeure ?

La force majeure est un événement qui est hors de notre contrôle. Elle rend impossible l’exécution d’une obligation.

Quelle est sa notion ? 

La notion de force majeure est d’origine jurisprudentielle et impacte les obligations contractuelles, c’est-à-dire les parties liées à un contrat et les responsabilités délictuelles des personnes.

Quelles sont les incidences dans une joute juridique ? 

La force majeure constitue une clause essentielle dans les contrats, exonérant les parties impliquées de toute responsabilité légale découlant du non-respect de leurs obligations ou prestations contractuelles. En outre, elle dispense les parties concernées du paiement de dommages et intérêts. 

Toutefois, il incombe au débiteur de prouver que l’événement qualifié de force majeure a effectivement empêché l’exécution de ses obligations contractuelles, et non pas simplement compliqué ou rendu plus coûteux leur accomplissement. 

Prenons l’exemple d’un accident. Si le chauffeur prouve que le dommage a été causé par une force majeure extérieure hors de son contrôle, il ne sera pas tenu de dédommager l’autre partie qui a été lésée.

Qu’est-ce qu’il en est pour un contrat ? 

Selon les dispositions du Code civil, les conventions, une fois conclues, ont force de loi pour ceux qui les ont établies. Cela signifie qu’elles ne peuvent être révoquées qu’avec leur consentement mutuel ou pour les causes que la loi autorise. La force obligatoire du contrat suppose qu’aucune partie ne peut se délier de son engagement par sa seule volonté en dehors des éventuelles précisions du contrat. 

La force majeure alors est une des circonstances qui peuvent exonérer une partie contractante de ses obligations contractuelles. Elle ne sera donc pas tenue de verser des dommages et intérêts à l’autre partie si elle prouve que l’événement constitue un cas de force majeure ayant rendu impossible l’exécution de sa prestation conformément au contrat. 

À titre d’exemple, dans le cas d’un contrat de transport, si une compagnie aérienne est contrainte d’annuler ses vols en raison d’un cyclone, cela constitue un cas de force majeure. Par conséquent, le passager titulaire du billet n’aura pas droit à des dommages et intérêts en raison du non-respect de la prestation de la compagnie aérienne pour cause de cyclone.

Quid des pandémies ?

Dans le contexte de la pandémie de COVID-19, les mesures prises par les États pour lutter contre la propagation du virus, souvent imprévisible et restrictif, peuvent rendre l’exécution des obligations contractuelles impossible. Dans de telles circonstances exceptionnelles, la force majeure pourrait être invoquée pour exonérer les parties de toute responsabilité.

Prenons, par exemple, la situation où, en raison des restrictions de déplacement imposées par les autorités, le locataire se trouve dans l’impossibilité d’utiliser le local loué conformément au bail. Dans ce cas, il pourrait légitimement suspendre le paiement des loyers, sous réserve d’en informer préalablement le bailleur.

Qu’en est-il des conditions ? 

Dans l’affaire General Construction vs I. Cassam, la Cour suprême a statué que la force majeure exonère une personne de toute responsabilité si trois critères essentiels sont remplis. Tout d’abord, l’événement ne pouvait pas raisonnablement être anticipé au moment de la conclusion du contrat. Ensuite, cet événement aurait été inévitable même avec des mesures appropriées de prévention. Enfin, il doit résulter d’une cause extérieure à la volonté du débiteur de l’obligation. Il n’existe pas de liste exhaustive d’événements classifiés comme des cas de force majeure car cela dépend des circonstances factuelles de chaque affaire.

Que dit nos lois sur la force majeure ? 

Ce sont les articles 1147 et 1148 du Code civil qui régissent la force majeure. « Le débiteur est condamné s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part », indique l’article 1147. 

Quant à l’article 1148, il dit ceci : « Il n’y a lieu à aucun dommages et intérêts lorsque, par suite d’une force majeure ou d’un cas fortuit, le débiteur a été empêché de donner ou de faire, ce à quoi il était obligé, ou a fait ce qui lui était interdit. » En somme, le débiteur de l’obligation n’est pas responsable (liable) lorsque sa prestation est empêchée par une force majeure et encore qu’il soit de bonne foi. 

Dans le cas des catastrophes naturelles ? 

Dans le contexte des catastrophes naturelles, telles que les cyclones, les inondations et autres, il est impératif que ces événements remplissent les critères requis pour être qualifiés de cas de force majeure. Il est également pertinent de noter que de nos jours, il est fréquent d’inclure des clauses de force majeure dans les contrats afin de limiter les responsabilités contractuelles. 

De plus, avec l’augmentation des phénomènes liés au changement climatique, comme les fortes pluies et les inondations devenant plus fréquentes, il est vivement recommandé de souscrire une assurance couvrant la force majeure, surtout pour les salariés qui doivent affronter les conditions météorologiques pour se rendre au travail.

Quelles sont les lacunes ? 

Je pense que la notion de force majeure est suffisamment établie. Il ne peut y avoir une liste exhaustive d’événements constituant la force majeure. Cela dépend des circonstances factuelles qui se présentent en Cour.

Que proposez-vous ?  

Je recommande que dans la mesure du possible, les parties contractantes incluent la répartition des responsabilités dans différents cas de figure, par exemple, incendies, cyclones et autres, afin que les parties ne soient pas lésées pour cause de force majeure ou encore pour limiter les responsabilités. 

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