Entre l’arrestation d’opposants politiques et les guéguerres au sein de l’opposition, en passant par une démission choc, l’actualité politique mauricienne en 2022 a été très tumultueuse.
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Unité de l’opposition aux forceps v/s le mercato politique du GM
L’année 2022 aura une fois de plus démontré que la politique à Maurice, c’est comme à Hollywood ou à Bollywood. Les rebondissements, les feuilletons interminables, les personnages qui se succèdent sont les ingrédients qui alimentent « la vie politique mauricienne ». Si un consensus a finalement été dégagé au sein de l’opposition parlementaire et extraparlementaire, dans une certaine mesure, sur l’importance d’avoir une plateforme commune pour sortir le Mouvement socialiste militant (MSM) du pouvoir, les égos des leaders, les revendications premierministérielles ainsi que « l’accommodement » de tous les acteurs rendent les choses très compliquées.
Le cas de Nando Bodha, leader du Rassemblement mauricien (RM), illustre bien cet état des choses. Propulsé à un moment comme potentiel Premier ministre par les dirigeants de l’Entente de l’Espoir, il a, au courant de l’année, été relégué, requinqué et, tout dernièrement, oublié dans le discours de fin d’année de Paul Bérenger. Le leader du Mouvement militant mauricien (MMM) est en train de jeter son dévolu sur une alliance avec le Parti travailliste (PTr) et le Parti mauricien social démocrate (PMSD).
Nando Bodha a lui commencé à jouer la carte d’une alliance extraparlementaire avec le Reform Party de Roshi Bhadain et de Linion Pep Morisien (LPM) du tandem Dev Sunassy/ Rama Valayden.
Le gouvernement a également été très actif sur le plan politique en 2022. Étant dans une logique de consolidation, c’est vers les maillons faibles de l’opposition, que le Mouvement socialiste militant (MSM) est en train d’ouvrir ses bras. Dans les coulisses du parti, on affirme que la direction du MSM n’a pas la tête à une alliance avec un parti politique et préfère procéder au débauchage de membres des différents partis de l’opposition. C’est de cette manière que nous avons témoigné de rumeurs persistantes autour d’un départ du député rouge, Osman Mahomed et, tout récemment, du député du MMM, Aadil Ameer Meea. Selon l’historien et observateur politique, Jocelyn Chan Low, « le pays est dans une campagne électorale permanente et cela va se faire plus ressentir au fur et à mesure que nous nous rapprocherons d’une échéance électorale », dit-il. L’historien soutient que les alliances ont depuis toujours été indissociables de la politique en raison du système électoral de First Past The Post (FPTP), bien qu’il note de plus en plus, « une lassitude des Mauriciens vis-à-vis de ces jeux d’alliance ».
En ce qu’il s’agit du gouvernement, Jocelyn Chan Low avance que les exercices de débauchage menés par le MSM fait partie d’une stratégie de communication. « Le gouvernement veut miser sur un ‘feel good factor’ dans le pays, tout en voulant prouver à la population qu’il y a une opposition complètement affaiblie », fait-il part.
Rapport de l’enquête judiciaire sur l’assassinat de Kistnen : la polémique
Bien qu’il y ait eu une tentative pour discréditer l’authenticité du rapport sur l’enquête judiciaire autour de l’assassinat de l’ex-activiste du MSM, Soopramanien Kistnen, les conclusions du document, qui ont été révélées par Le Défi Media Group, demeurent accablantes. Les conclusions de la magistrate confirment les implications politiques de cette affaire au plus haut niveau. « Le rapport judiciaire est, pour moi, l’événement le plus important en termes de dérive sociétale. Le contenu du rapport démontre qu’une ligne rouge a été traversée en termes de ramifications politiques et mafieuses », avance Ashok Subron, du parti de gauche, Rezistans ek Alternativ.
« Ce rapport comprend également des mobiles politiques et financiers qui touchent directement le Premier ministre et le vice-Premier ministre », ajoute-t-il. Par ailleurs, bien qu’Ashok Subron dit saluer l’initiative du Directeur des poursuites publiques d’avoir initié une enquête judiciaire, il regrette cependant que Satyajit Boolell n’ait pas rendu le rapport public avant qu’il ne parte à la retraite.
Démission de Sherry Singh : le sniffing
La démission de Sherry Singh du poste de Chief Executive Officer (CEO) de Mauritius Telecom en juin aura provoqué un tremblement de terre au gouvernement et aura été une véritable arme politique pour l’opposition. Sherry Singh n’aura pas tardé à sortir l’artillerie lourde avec l’affaire de ‘sniffing’, accusant le gouvernement d’avoir donné accès à une délégation indienne pour extraire des informations sur des câbles sous-marins à la Landing Station de Baie-du-Jacotet. Des actions politiques, avec l’opposition parlementaire et extraparlementaire, s’en étaient suivies, accusant le gouvernement de trahison.
Le Premier ministre, Pravind Jugnauth a, quant à lui, fait valoir la sécurité nationale, d’où la raison d’avoir donné accès à une équipe indienne afin de faire un ‘survey’. Quelques mois plus tard, plus un mot sur l’affaire, ce qui donne un des actionnaires minoritaires de MT, Rajen Valayden, des raisons de croire que « la démission de Sherry Singh était loin d’être une offensive contre le gouvernement. C’est une stratégie de défense : la fuite en avant. Depuis 2016, l’itinéraire de Mauritius Telecom était tout tracé. Avec projets bidons et des pratiques scandaleuses, la compagnie fonçait droit dans le mur. Sherry Singh a choisi son moment et un narratif des plus séduisants pour un peuple accro à Netflix », dit-il.
Controverse autour de l’arrestation de l’activiste Bruneau Laurette
La création de la Police Head Quarters Special Striking Team (PHQ SST) afin d’enquêter en parallèle sur les cas de drogue avec l’Anti-Drug Smuggling Unit (Adsu) aura créé l’événement à Maurice avec des conséquences sur l’intégrité de la force policière. La PHQ SST s’est très vite imposée sur le terrain politique avec l’arrestation, en premier lieu, de l’avocat et proche du Parti travailliste (PTr), Akil Bissessur, et en deuxième lieu, de l’activiste Bruneau Laurette, dont les prises de position anti-gouvernement sont connues de tous.
Si le premier nommé a pu retrouver la liberté conditionnelle, Bruneau Laurette devra, pour sa part, passer le Nouvel an en détention, faisant face à une accusation de possession et de trafic de haschich. Outre le fait qu’Akil Bissessur et Bruneau Laurette soient tous deux des adversaires politiques du gouvernement, les deux ont sans cesse clamé leur innocence en accusant la PHQ SST d’avoir fomenté un coup contre eux. Les résultats du Forensic Science Laboratory (FSL) ont révélé l’absence d’ADN sur les drogues saisies chez Akil Bissessur et chez Bruneau Laurette, jetant ainsi un doute sur l’intégrité de ces enquêtes.
Le chargé de cours à l’Université de Maurice (UoM), Rajen Narsinghen, qui accorde une attention particulière aux Droits de l’homme, fait ressortir que la police est en droit d’enquêter sur n’importe qui aussi longtemps qu’il y a des « reasonable suspicions ». Il souligne ainsi que l’absence d’ADN sur les drogues saisies chez Akil Bissessur et Bruneau Laurette jettent « un sérieux discrédit » sur la PHQ SST, d’autant, dit-il que la force policière a, en 2022, projeté une très mauvaise image avec les cas de torture, « sans compter que les images visualisées chez Wayne Attock démontrent clairement qu’il y a eu ‘planting’. Si ces images étaient fausses, il y aurait eu sanction ». D’ajouter que la police ne peut être « above the law ».
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