Législatives 2024

Xavier-Luc Duval : «Un mois de cela, mo pas ti pu dire ou pour certain ki ti pou ena l’alliance avec le MSM»

Xavier-Luc Duval était l’invité de Nawaz Noorbux dans l’émission « Au Cœur de la Campagne », vendredi. C’était la première grande sortie médiatique du leader du PMSD depuis qu’il a concrétisé une alliance avec le MSM. Ci-dessous l’essentiel de l’entretien. L'intégralité peut être visionnée sur les plateformes numériques du Défi Media Group.

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Après votre séparation du bloc PTr-MMM, il était évident, sans être politologue ou astrologue, que vous vous dirigiez vers une alliance avec le MSM. Pourquoi alors avoir maintenu pendant des semaines qu'aucune alliance n'était en préparation ? 
Il y a une différence entre être en train de se marier et être déjà marié, tout comme entre se fiancer et être déjà fiancé. Le système électoral en place nous contraint à envisager des alliances si nous voulons contribuer au développement du pays. Ce n'est d'ailleurs pas la première fois qu'un parti d'opposition se joint à un gouvernement. Lorsque la situation est devenue difficile avec le PTr et le MMM, l'option MSM est apparue. Cependant, cela ne s'est pas fait sans réflexion. Nous avons eu des discussions approfondies avec Pravind Jugnauth et ses partenaires concernant le programme. Le nombre d’investitures n'était pas notre priorité ; ce qui compte, c'est l'influence du parti au Parlement. Ainsi, affirmer qu'il y avait une alliance avant notre annonce officielle est faux. 

Adrien Duval a été nommé Speaker et vous avez juré sur la tête de votre fils qu’il n’y a aucune condition attachée à cette nomination... 
Adrien se porte toujours bien. Je suis un homme pieux et j'ai fait un serment sur la tête de mon fils. Je n'ai rien à cacher. Adrien avait initialement reçu une proposition à laquelle il n'était pas intéressé, mais il a fini par changer d'avis. 

Pourquoi n’avez-vous pas dit qu’il y avait des pourparlers avec le MSM ? 
Je dis la vérité, il n’y avait aucune condition attachée. Je refais le serment sur la tête de mon fils. Il n’y avait aucune condition, je dis la pure vérité. Le MSM voulait changer de Speaker parce que « li pe fane » et qu’il réagissait souvent sous provocation. Vous pouvez demander à Pravind Jugnauth à quel moment cela s’est produit. Il y a un mois, je n’avais aucune idée qu’il y aurait une alliance avec le MSM. 

Ainsi, Pravind Jugnauth décide, un beau jour, de nommer Adrien Duval comme Speaker. C’était une stratégie bien établie... 
Il n’y avait rien. Si j’étais musulman, j’aurais juré sur le Coran. 

C’est difficile à croire quand même... 
Si, selon votre manière de voir les choses ou votre système, cela vous semble difficile à croire, je n’y peux rien. Je dis la vérité. J’ai 30 ans de carrière comme député. Ceux qui me connaissent savent que je ne suis pas un menteur 

On se souvient des critiques acerbes de Pravind Jugnauth envers Adrien Duval alors que vous étiez leader de l’opposition. Puis, il le nomme Speaker... 
J’ai été leader de l’opposition pendant six ans. On ne peut pas tirer des conclusions d’une situation de 15 secondes et en faire une vérité. Il y a toujours eu un respect mutuel. J’ai accompli mon rôle de leader de l’opposition sans complaisance. D'ailleurs, je n'étais pas censé occuper ce poste. Lorsque M. Bérenger a insulté M. Boolell, ce dernier a démissionné et n'a pas souhaité reprendre la fonction. C’est un poste à risque, tant pour vous que pour votre famille. Peut-être que si j’avais été plus indulgent dans mes actions, je n’aurais pas rencontré autant de problèmes. Mais c’est quand vous faites bien votre travail que les difficultés surgissent. 

Adrien Duval a présidé quelques séances, et certaines critiques font état du fait qu'il bénéficierait d'une pension à vie… 
Rs 20 000 ! Le salaire minimum. Adrien a cinq ans de députation derrière lui. Pensez-vous qu’un avocat se serait donné autant de mal pour Rs 20 000, qui plus sont taxables ? Je ne crois pas que quelqu’un d’autre l’aurait fait. Je suis convaincu qu’il sera élu, et cette polémique disparaîtra. 

Pourquoi cela n’a pas marché entre le tandem Ramgoolam/Bérenger et vous ? 
On aurait dû me décerner une médaille pour la route faite avec M. Bérenger. Nous avions commencé un ménage à trois avec Ramgoolam, mais il (Paul Bérenger) voulait que Navin Ramgoolam cède sa place à Arvin Boolell. Cela n'a pas fonctionné. Je suis resté, et Roshi Bhadain nous a rejoints avant de partir après un an. Nando Bodha, qui avait démissionné du gouvernement, s'est également allié à M. Bérenger. Il était alors le « diamant » de M. Bérenger, mais lui aussi est parti. Pendant tout ce temps, je suis resté. Il est extrêmement difficile. Bien que je sois quelqu'un de calme et de tolérant, travailler avec M. Bérenger est loin d'être facile. 

Votre problème était Bérenger et non pas Ramgoolam ? 
Beaucoup plus Bérenger. 

Navin Ramgoolam avait dit qu’il ne voulait pas que vous fassiez partie de l’alliance... 
Je ne veux pas les critiquer. 

Votre crédibilité en avait pris un coup… 
Je n’ai pas fait manger de gâteau à sir Anerood Jugnauth pour ensuite contracter une alliance. J’ai été ministre des Finances sous Navin Ramgoolam, j'ai travaillé sans relâche. Je n’étais même pas au courant que Navin Ramgoolam avait rencontré Paul Bérenger à plusieurs reprises pour discuter d’une alliance. Quelle crédibilité peuvent-ils avoir ? Il ne faut pas considérer les paroles de Bérenger comme une vérité absolue. 

Tout comme la vôtre... 
Vous pouvez demander à M. Bhadain et à M. Bodha, même à Navin Ramgoolam. J’étais en colère. Les gens me disaient : « Ki fer mo figir pa bon ? » 

Votre ‘body language’ révélait qu’il y avait un problème… 
Je ne pouvais plus continuer. J'ai tenu. Mon souhait était d'accéder à la Présidence, mais Navin Ramgoolam tenait à ce que je fasse partie du Cabinet. C'est ma part de vérité. Je n'ai jamais eu de problème avec Bhadain, et Bodha est un bon ami. Ce n’est pas moi qui suis la cause de leur départ de l'alliance. 

Était-ce dû au nombre de tickets ? 
Surtout parce que le placement des candidats changeait de jour en jour. 

On peut comprendre que travailler avec Paul Bérenger n'était pas possible pour vous, mais comment expliquer votre décision de rejoindre le MSM, que vous avez sévèrement critiqué auparavant ? 
Kan ou lider lopozision se pa pou may likou Pravind Jugnauth toulezour. Le leader de l'opposition joue un rôle crucial, étant la voix la plus forte au Parlement. Son rôle est de chercher la grosse bête et la petite bête. Le leader de l'opposition doit rester vigilant. Monn fer mo travay. 

Vous avez dénoncé des maldonnes. Et maintenant vous allez les cautionner ? 
Si Navin Ramgoolam était Premier ministre et que j’étais leader de l’opposition, j’aurais agi de la même manière. Je n'hésiterais pas à critiquer les problèmes. Auriez-vous préféré que je sois comme Paul Bérenger, « dormi dormi » pendant cinq ans, sans poser de questions et en faisant deux ou trois discours ? Si je devais reprendre mon rôle de leader de l’opposition, je le ferais sans hésitation. C’est un poste constitutionnel, et j’ai accompli mon devoir, même si le Speaker « inn blok blok mwa ». 

Le PMSD au gouvernement, est-ce que tout va changer ? Y aura-t-il une meilleure gouvernance ? 
Je continuerai à faire mon travail honnêtement. J’ai mes convictions. 

Vous avez adressé deux PNQ à Steven Obeegadoo concernant le terrain pour la communauté tamoule. Quelle est votre position maintenant ? 
Je comprends qu'il y a un enjeu sentimental. Je pense que le gouvernement a formulé une offre en réponse à mes PNQ. 

Il y a toujours un mécontentement, sans oublier des incidents et arrestations... 
Je ne suis pas là pour défendre le gouvernement sur ce dossier. 

Vous maintenez que le terrain de Réduit sera alloué à M. Gopee ? 
Je n’ai pas suivi le dossier après. J’ai vu des choses qui indiquent que ce sera le cas. Je pense que l’offre est honnête et raisonnable. 

Qu’en est-il de la ‘shopping list’ du PMSD avant de conclure l’alliance ? 
Ce n’est pas vrai. Il ne faut pas tout croire. Il y a peut-être deux choses, mais la liste n’est pas vraie. 

Êtes-vous toujours en faveur d’un retour du MTC au Champ-de-Mars ? 
Oui, je suis toujours en faveur de cette idée. C’est mon vœu. Il y avait un rapport à l’époque. Tout n’était pas parfait, mais le MTC avait su maintenir un certain niveau. Je ne suis pas au courant des négociations en cours. Je pense que c’est par le dialogue et la volonté de bien faire que nous pourrons trouver une solution. 

Vous maintenez que la PTP est « ban amater » ? 
Je le maintiens ! J’ai dit que c’est un bidonville. Je n’ai pas changé d’avis sur ce point. 

Le PMSD bénéficie-t-il du soutien financier et logistique de Jean Michel Lee Shim ? 
Pas un demi-sou. 

Vous étiez contre la nomination de Navin Beekarry à la FCC. Qu’en est-il? 
Il y a une affaire en Cour. Je vous dis un secret. Le verdict sera final. Le gouvernement ne fera pas appel. 

Et le Commissaire de police Dip ? 
Il va à la retraite. Laissez-le partir tranquillement ! 

Concernant l'affaire Kistnen, vous aviez affirmé que tant que le MSM est au pouvoir, la vérité ne sera jamais révélée... 
Si vous prenez tout ce que j’ai dit avant, ce sera des spaghettis à la bolognaise. Le Premier ministre a répondu. 

Un revirement de veste... 
Il y a eu des évolutions. Shakeel Mohamed a posé une PNQ à ce propos. Le rapport d’autopsie a été envoyé en France. Je ne sais pas qui a tué M. Kistnen, mais je ne peux pas imaginer qu'un politicien puisse commettre un acte aussi horrible. 

Ne pensez-vous pas qu'il y a un dégoût face à cette situation, surtout en ce qui concerne cette alliance après toutes les dénonciations ? N'avez-vous pas peur d'un vote sanction ? 
Nous sommes toujours dans une démocratie, et les gens sont libres. J'espère néanmoins qu'ils ne décideront pas de me sanctionner. Je veux juste qu’une équipe compétente épaule une autre pour faire avancer les choses. 

Après tout ce que vous avez dénoncé contre le MSM pendant des années, n’avez-vous pas peur d’un vote sanction contre vous ? 
Nous sommes dans une démocratie et les gens sont libres de prendre leur décision, mais j’espère qu’ils ne me sanctionneront pas. J’ai toujours donné mon maximum en tant que ministre, ayant dirigé huit ministères, et aussi en tant que leader de l’opposition. J’ai eu ces responsabilités parce que je fais mon travail, et je pense que les gens veulent une équipe qui sait faire le travail comme il se doit. La majorité de la population a obtenu des avantages et s’inquiète peut-être de savoir si ces avantages vont continuer. Pourquoi lorsqu’on s’associe avec le gouvernement, on est vu comme « enn vander ». Mais pourquoi ne dit-on pas la même chose lorsqu’il s’agit de l’opposition ? Paul Bérenger m’a beaucoup critiqué, cela remonte à l’époque de mon père. J’ai déjà combattu contre lui, et c’était mille fois pire. Pourtant, rien n’a été dit quand j’étais à la même table que lui pour travailler pendant trois ans. La politique à Maurice demande des concessions. 

Est-ce qu’en octobre 2024 vous avez la même crédibilité ? 
Je ne sais pas ce qu’il y a dans le cœur des gens. J’ai 66 ans et peut-être que c’est ma dernière élection. Je veux réaliser des choses extraordinaires pour le pays dans les cinq prochaines années. Certains me croiront, d’autres pas. J’espère qu’après 35 ans en politique, les gens ne penseront pas que je le fais pour moi. Oui, il y a des avantages à être Premier ministre adjoint, mais savez-vous combien de problèmes il y a ? Un ministre des Finances, par exemple, travaille 24/7. J’aime ma vie actuelle, mais l’échéance approche et il faut penser à l’avenir. Ce qui servira l’électorat du PMSD, c’est de pouvoir mettre en place certaines choses qui nous tiennent à cœur dans un prochain gouvernement. 

Que répondez-vous à ceux qui disent que vous avez fait ça pour vos enfants ? 
Adrien avait aussi eu un ticket de l’autre côté. Il est assez grand. Je vous dis comment ça s’est passé. Un après-midi, je reçois un appel, et lui aussi, pour faire une proposition. Le lendemain, je rencontre Pravind Jugnauth, et j’ai été impressionné. Il n’a imposé aucune condition. Quand je suis sorti de la réunion, j’étais content. Le lendemain, il a rencontré Adrien, en présence du Chief Whip et de l’Attorney General. La proposition de Speaker lui a été faite, encore une fois sans condition. 

Concernant l’éducation, dans un congrès, vous avez dit que les élèves ayant obtenu 3 credits au SC pourraient aller à l’université. Pouvez-vous nous expliquer ? 
La clé du succès d’un pays est l’éducation. Si j’en ai l’occasion, je vais consacrer les cinq prochaines années à ce secteur. Au PSAC, 25 % des élèves échouent, et selon la Banque mondiale, c’est trop. L’Extended Programme est un échec. Environ 3 000 élèves ont entre 3 et 4 credits au SC et peuvent entrer dans des filières techniques. Pour ceux qui ont 3 credits, on peut leur offrir un « foundation course » pour l’université. 

On bypasserait donc le HSC ? 
Oui. Beaucoup de jeunes font déjà ce « foundation course », mais cela coûte cher. Nous devons rendre cela accessible à tous. Je voudrais qu’un enfant puisse bénéficier d’un pupil equity fund pour financer, par exemple, des leçons privées. 

Vous serez le ministre de l’Éducation ? 
J’ai beaucoup de volonté. Mais vos informations ne sont pas bonnes. 

Les Finances, peut-être ? 
Encore une fois, vos informations ne sont pas correctes. Que ferait-on de M. Padayachy ? 

Où serez-vous alors ? 
On verra après les élections, cela dépendra des talents disponibles. C’est au Premier ministre de décider de ce qu’il fera. 

Sur la drogue, vous avez dit que Maurice est devenu un narco-État. Est-ce toujours votre opinion ? 
La prolifération de la drogue est énorme. Parfois, on utilise des mots pour provoquer une réaction. Sommes-nous la seule île à faire face à cela ? Les Seychelles, c’est encore pire. Les Maldives aussi ont un gros problème. Le gandia, vous le voyez, mais les drogues synthétiques, non. J’ai beaucoup apprécié le rapport Lam Shang Leen, et le gouvernement l’applique. 

Faut-il démanteler l’ADSU ? 
Le Premier ministre a dit que ce n’était pas le moment, mais il est important que nous ayons une équipe étrangère pour nous épauler. Nous avons déjà parlé avec le gouvernement indien et le gouvernement américain. Ce dernier n’est pas trop intéressé, mais peut-être qu’avec le deal sur les Chagos, ils seront davantage impliqués. C’est dans notre intérêt, et dans le leur. 

L’inégalité sociale a-t-elle augmenté ou pas ? 
Le simple fait d’offrir une pension de Rs 15 000 ou un salaire de Rs 20 000 aide les personnes en situation de pauvreté. Mais si nous voulons véritablement parler de lutte contre la pauvreté sur le long-terme, nous devons nous concentrer, entre autres, sur le logement. La construction de 8 000 maisons, c’est du jamais vu à Maurice. 

Mais vous aviez critiqué cela lorsque vous étiez leader de l’opposition, non ? 
C’était mon travail et mon devoir de critiquer et d’interpeller le gouvernement à ce sujet. 

Vous ne pouvez pas dire qu’hier ce ministre était catastrophique, et aujourd’hui le féliciter. Vous aviez beaucoup attaqué Steven Obeegadoo. 

J’ai toujours eu du respect pour Monsieur Obeegadoo. Mon travail comme leader de l’opposition était de l’interpeller, sans pour autant être agressif. Aujourd’hui, je reconnais que la construction de 8 000 maisons est un accomplissement impressionnant. Honnêtement, je pensais que cela n’allait pas être réalisé, mais il a prouvé le contraire. 

En parlant de l’alliance avec le MSM, combien de ministères vous attendent ? 
Cela, on verra plus tard.

 

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