Selon les dernières données publiées par Statistics Mauritius, le vieillissement de la population atteindra des proportions significatives d’ici 2060. Environ quatre personnes sur dix auront 60 ans ou plus dans les décennies à venir. Cette tendance démographique soulève des préoccupations quant aux problèmes de santé liés à la vieillesse, en particulier la hausse de la prévalence de la démence.
La démence. Cette condition, caractérisée par la détérioration progressive de la mémoire, des fonctions cognitives et de l’autonomie, affecte principalement les personnes âgées. Avec le vieillissement de la population à Maurice, la prévalence de cette maladie complexe est destinée à augmenter, ce qui nécessitera une préparation adéquate des autorités.
Selon le Dr Irfaan Daureeawoo, gériatre spécialisé dans la maladie de Parkinson et les mouvements anormaux, il ne faut surtout pas se voiler la face avec cette problématique qui se profile. « Certes, avec le vieillissement de la population, la longévité augmente. Toutefois, cela s’applique aussi aux maladies chroniques et à la démence. Celle-ci ne doit pas être taboue ou stigmatisée. Au contraire, il faut une prise en charge adéquate », explique le professionnel de santé.
Il poursuit que la démence inclut des troubles neurologiques progressifs, une condition qui provoque une détresse gigantesque, tant psychologique, sociale que financière à la fois pour les patients, leurs familles et leurs soignants. « Ce syndrome est marqué par un déclin cognitif progressif. Il est associé à une dégradation des capacités fonctionnelles et dans de nombreux cas, un changement comportemental et psychologique. Dans le monde, environ 55 millions de personnes sont atteintes de démence et près de 10 millions de nouveaux cas sont recensés chaque année », précise-t-il.
Septième cause de mortalité
Le Dr Irfaan Daureeawoo souligne que la démence est une préoccupation mondiale, et ce bien qu’elle soit observée le plus souvent dans les pays les plus développés où l’espérance de vie est plus avancée. « L’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que la démence est la septième cause de mortalité dans le monde et qu’elle représente une des principales causes d’invalidité et de dépendance chez les personnes âgées », souligne-t-il.
Il ajoute qu’il existe plusieurs sous-types de démence, mais les cinq plus communs sont les suivants : la maladie d’Alzheimer, la démence vasculaire, la démence à corps de Lewy, la démence fronto-temporale et la démence mixte. Le terme ‘démence’ englobe de nombreuses maladies qui affaiblissent la mémoire, la pensée et la capacité à réaliser des tâches quotidiennes.
Le syndrome démentiel a un impact économique, physique, psychologique et social non seulement sur les patients mais aussi sur les aidants, les familles et la société en général. « Malheureusement, on note souvent des stigmatisations vu que la pathologie est mal comprise, ce qui entraîne des entraves dans le diagnostic et les soins », dit le gériatre.
Il avance que prendre en charge les besoins des personnes atteintes de maladies neurologiques commence par former, mettre l’accent sur la compréhension, sensibiliser et accentuer la lutte contre la stigmatisation et la discrimination. « Elles agissent comme des obstacles à la recherche en matière de soins de santé. La prévention des troubles neurologiques compte énormément sur la promotion et le développement de la santé cérébrale optimale maintenue durant toute la vie », précise le spécialiste.
Diagnostic
Le médecin explique qu’une prise en charge complète et une approche holistique sont adoptées par le médecin généraliste expertisé en démence, le neurologue, le psychiatre ou le gériatre. « Le médecin pratique une anamnèse complète du patient, incluant des troubles mentaux, des problèmes cognitifs et une évaluation fonctionnelle. Les patients sont ensuite redirigés vers des centres de la mémoire pour des évaluations approfondies, par exemple des tests sanguins et une IRM pour visualiser la structure du cerveau », indique notre interlocuteur.
Facteurs de risque
Quelques facteurs augmentent le risque démentiel et plusieurs sont modifiables, dont la prévention :
- L’âge (la pathologie étant la plus recensée chez les personnes de plus de 65 ans) Risque vasculaire cérébral, d’où la nécessité de la prévention
- L’hypertension artérielle
- Diabète
- Surcharge pondérale
- Tabagisme
- Un excès d’alcool consommé
- Manque d’activité physique
- Dépression
- Isolement social
Type commun de démence
La maladie d’Alzheimer
La maladie d’Alzheimer représente 60 % à 80 % des cas. Elle est causée par des changements structurels du cerveau. Des avancées scientifiques sont en cours en termes de diagnostic, incluant un diagnostic clinique mais aussi en utilisant des biomarqueurs et des techniques d’imagerie.
La démence vasculaire
La démence vasculaire est le deuxième type de démence le plus courant. La cause est liée par un manque de circulation en sang aux cellules nerveuses, principalement en raison d’accidents vasculaires cérébraux (AVC) ou de multiples accidents ischémiques transitoires (AIT), causant des zones de lésions cellulaires localisées dans le cerveau. La prévention vasculaire cérébrale est une des prises en charge les plus importantes, selon le gériatre.
La démence fronto-temporale
La démence fronto-temporale est liée à 10 % des cas de démence. Comparativement à la maladie d’Alzheimer, les patients affectés ont un début précoce. La démence fronto-temporale est associée quand les cellules nerveuses des lobes frontaux et/ou temporaux du cerveau meurent et que les voies qui relient les lobes changent.
La démence de Lewy
La démence de Lewy est causée par une accumulation anormale de protéines dans les cellules nerveuses (Lewy), interrompant les signaux nerveux. La démence de Lewy affecte principalement les zones du cerveau qui sont impliquées dans le processus de réflexion et de mouvement. Les patients affectés par ce type de démence ont souvent des symptômes parkinsoniens.
Signes et symptômes
« À un stade précoce de la maladie, seuls les troubles de la mémoire sont présents. Ces symptômes ne définissent pas un syndrome démentiel. On parle alors de ‘mild cognitive impairment’ ou d’un état pré-démentiel, qui marque le début d’un trouble de la mémoire isolée. À ce stade, les personnes ont toujours leurs fonctions et leur autonomie », déclare le Dr Irfaan Daureeawoo.
- De plus en plus oublieux et perdre régulièrement des choses.
- Perdre la notion du temps.
- S’égarer dans des lieux familiers, même chez soi.
- Ne pas se rappeler les noms de personnes familières ou des événements. Au stade avancé, ne pas se rappeler les personnes proches.
- Trouble de la communication. Le patient se répète souvent ou éprouve des difficultés à trouver les mots appropriés.
- Le besoin d’aide se prononce au fur et à mesure que la maladie progresse, que ce soit au niveau des soins d’hygiène ou des activités quotidiennes. À un stade avancé de la maladie, la dépendance est presque totale.
- Mobilité réduite et difficulté à maintenir un équilibre. C’est plus fréquent chez les patients atteints de démence vasculaire.
- Fluctuation des comportements, tels que la désinhibition, la perte d’intérêt social et la perte de perspicacité. Des troubles de l’humeur et de la parole ainsi que l’incontinence sont aussi fréquents.
- La démence de Lewy s’accompagne souvent d’hallucinations visuelles ou de désillusions. Les chutes sont également fréquentes.
Prévention
Le gériatre recommande une bonne hygiène de vie qui peut aider à diminuer le risque de démence et à en retarder les symptômes. Selon lui, une vie saine peut également prévenir d’autres maladies chroniques qui, vice versa, sont liées à une plus grande chance de développer un syndrome de démence.
- Prévenir le diabète, la dépression, l’hypertension et un taux de cholestérol élevé
- Avoir un poids idéal
- Prévenir la perte d’audition ou utiliser des prothèses auditives pour compenser cette perte d’audition. Des études ont démontré des résultats favorables après l’utilisation de protections auditives en cas de bruit excessif.
- Préserver une vie sociale et être entouré
- Prévenir les chutes et des facteurs favorisant les blessures à la tête
- Régulièrement mettre le cerveau au travail en apprenant de nouvelles choses et en entreprenant de nouvelles activités
- Garder une vie active et faire de l’exercice
- Prévenir l’excès d’alcool
- Avoir une alimentation saine et équilibrée
- En cas de dépression, il est important de se faire écouter et de se faire traiter.
- Éviter l’air pollué
- Maintenir une bonne hygiène de sommeil
- Se sevrer du tabac.
OMS et la démence
En 2017, l’OMS a lancé le Plan d’action mondial de santé publique contre la démence 2017-25. Il englobe sept mesures fondamentales :
- Une priorité de santé publique en ce qui concerne la démence
- Sensibilisation à la démence
- Réduction du risque de démence
- Diagnostic, traitement, soins et soutien au patient atteint de la démence
- Soutien aux soignants atteints de démence
- Systèmes d’information sur la démence
- Recherche sur la démence
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