« Un seul être vous manque, et tout est dépeuplé. » Cette citation d’Alphonse de Lamartine prend tout son sens, en cette période de fêtes, pour les familles endeuillées. Pour elles, la magie de Noël est obscurcie par le poids de la perte d’un être cher, survenue à la veille des festivités. Voici leurs témoignages.
La période des fêtes est une étape éprouvante pour les familles endeuillées après la perte d’un être cher. Si Noël résonne habituellement avec l’effervescence des célébrations et la chaleur des retrouvailles, pour certains Mauriciens, il revêt une teinte plus sombre.
C’est le cas des parents de la petite Saivaani Revati Aunatooa, cruellement arrachée à la vie à tout juste 10 ans, le 22 novembre 2022 à la suite d’une opération de l’appendicite à l’hôpital Dr A. G. Jeetoo. L’autopsie a conclu à une « aspiration pneumonia ». Une tragédie qui a engendré la suspension immédiate d’un médecin et de deux infirmières.
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Mais pour la famille de la fillette, la plaie demeure béante plus d’un an après. Rajcoomar Aunatooa partage l’indicible douleur qu’il endure depuis la perte de sa benjamine. « La vie n’est plus la même depuis la mort de notre enfant. C’est une épreuve très difficile pour ma femme et moi. Nos deux filles aînées de 19 et 21 ans, qui considéraient Saivaani comme leur petite poupée, ressentent la même douleur. Elles prenaient soin de leur petite sœur et depuis son départ, tout a changé. Un vide persiste », confie le policier résidant à St-Pierre.
Chaque jour qui passe est marqué par le souvenir de Saivaani pour la famille Aunatooa. « Nous avions tant de rêves pour notre fillette. La perdre à l’âge de 10 ans est extrêmement douloureux. Nous ne voulons pas que d’autres parents traversent la même épreuve. Notre vie est incomplète sans elle », souligne-t-il.
Noël, pour la deuxième année consécutive, est creux pour la famille, après le vide insurmontable laissé par la fillette. « Nous avions tout planifié. Elle devait passer ses examens de Grade 5 et simultanément le PSAC. Nous envisagions d’acheter ses fournitures scolaires et ses cadeaux. Nos rêves se sont effondrés », dit-il. La veille de Noël, poursuit-il, ils se sont rendus au cimetière. « Pour Noël, ses sœurs ont décoré un arbre en son honneur au cimetière. Saivaani nous manque tous les jours, encore plus pendant les fêtes », lance son père avec émotion.
Absence
Cette période festive, qui devrait être synonyme de joie partagée en famille, est devenu pour Richarno T., un moment poignant marqué par l’absence de ses parents. Cet employé du secteur privé, âgé d’une quarantaine d’années, a toujours partagé un lien d’amour indéfectible avec ses parents.
Cependant, l’année dernière, il a perdu sa mère et cette année, son père, quelques mois avant Noël. « Même si mes proches ne m’ont pas laissé tout seul et que j’ai réveillonné avec eux, le fait de passer Noël sans maman et papa laisse un vide énorme dans mon cœur. Peu de gens comprennent cela. Le fait de faire les préparatifs seul et de décorer le sapin seul est déprimant, voire pathétique », confie-t-il. Mais il se dit heureux qu’en soirée, il a eu la chance d’être aux côtés de son parrain et de sa famille. « Des proches, dont Rano, Sabrina, Axel et Alizia, m’ont redonné le sourire. Ils ont été la touche magique de mon Noël en cette année 2023 », raconte-t-il.
S’il y en a une pour qui Noël n’est plus le même, c’est Samantha, 33 ans, la sœur d’Anthony Rosalba. Cet homme qui aimait la vie est mort à l’âge de 31 ans. Ce jeune habitant de Bois-Marchand a été tué dans un accident de la route à Ripailles le 4 juillet dernier. Il était à bord d’un véhicule en compagnie de trois autres jeunes habitant Bois-Marchand.
Marquée par l’absence de son benjamin, Samantha vivait avec lui à Bois-Marchand. « C’est triste. Je lui ai rendu visite au cimetière. Je ne peux rien faire de plus. La vie continue même si c’est douloureux », confie-t-elle.
Cette douleur, Agnès Jean et son époux Clarel la connaissent bien. Pour ces habitants de Roche-Bois, Noël a un goût amer depuis la mort de leur fils Clarino Edouard, qui était âgé de tout juste neuf ans. Le garçonnet, qui était atteint de trisomie 21, a momentanément quitté le domicile pour se retrouver sur la route, où il a été heurté par un scooter piloté par un adolescent de 15 ans. C’était le 23 novembre 2023.
Une date à marquer d’une pierre noire pour les parents du petit garçon. L’absence de Clarino Edouard, qui était affectueusement surnommé Nono, est encore plus douloureuse pour ses parents pendant la période des fêtes.
Le couple raconte qu’à cette période de l’année, il allait faire du shopping à Port-Louis avec ses enfants. « Nous achetions leurs vêtements pour les fêtes. Nous avions déjà prévu de lui offrir une motocyclette électrique pour Noël », indique la mère de famille avec tristesse.
« Ce n’est pas facile pour moi. Nono était un enfant gâté. Il était affectueux et apportait de la joie dans notre famille », ajoute-t-elle avec émotion. Clarel, le père du garçon, partage la même douleur. « Je n’ai ni la force, ni le courage de faire quoi que ce soit. Chaque matin, je pleure en me réveillant. Nous avons un enfant de trois ans qui le réclame. Nous ne savons plus quoi lui répondre », confie-t-il.
La solitude
La distance peut, elle aussi, contribué à apporter un goût amer aux festivités. Emma, âgée d’une quarantaine d’années, traverse une période de Noël particulièrement difficile cette année. Après avoir partagé 18 ans de sa vie avec sa fille en tant que parent divorcé, elles ont passé Noël séparément cette année. « Les émotions sont fortes, accentuées par le fait que sa fille poursuit ses études en France. Bien que la saison festive soit censée être joyeuse, Noël est empreint d’un immense vide. Les billets étant chers en cette période, je n’ai pas pu partir lui rendre visite ou la faire venir », raconte-t-elle.
Emma affiche toutefois un sentiment de gratitude. « Mon père était très malade cette année. Mais il a réussi à célébrer un autre Noël. Je suis reconnaissante de ce cadeau que me fait la vie », déclare-t-elle.
La quadragénaire a pu passer Noël avec ses parents pendant quelques heures, même si elle a travaillé les 24 et 25 décembre. « Cela m’aide à surmonter ma solitude. Heureusement qu’aujourd’hui, malgré la distance, les réseaux sociaux nous permettent de rester connectées », explique-t-elle.
Mère et fille ont pu se parler pour le soir du réveillon. Elles ont pu échanger des photos et même faire des appels vidéo, ce qui leur a apporté une lueur de réconfort en cette période difficile.
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