Des politiciens et économistes se disent inquiets que Maurice ne devienne le prochain Sri Lanka, un pays au bord de la banqueroute. Dans une note comparative, les autorités mauriciennes font ressortir que c’est loin d’être le cas.
«La situation est extrêmement grave ! Maurice est bien parti pour devenir comme le Sri Lanka ». C’est la crainte exprimée récemment par Arvin Boolell, chef de file du Parti travailliste au Parlement. Et il est loin d’être le seul à tirer la sonnette d’alarme en ayant recours à la même comparaison. Même des économistes, à l’instar de Rama Sithanen ou encore de Kevin Teeroovengadum, ont récemment mis en garde contre le danger que Maurice soit plongé dans une situation socioéconomique similaire à celle du Sri Lanka si des solutions ne sont pas rapidement trouvées.
Or, au gouvernement, on insiste que cette comparaison n’est pas justifiée. Dans une note comparative sur la situation économique à Maurice et au Sri Lanka, le gouvernement donne une série de raisons, chiffres à l’appui, pourquoi l’amalgame entre les deux pays n’a pas sa raison d’être.
« Le Sri Lanka est confronté à sa pire récession économique depuis son indépendance. Ses réserves internationales ont considérablement diminué et il existe une grave pénurie de devises étrangères. Sa dette publique a dépassé les 100 % du PIB et le gouvernement risque de ne pas respecter ses obligations en matière de remboursement de ses dettes. À Maurice, nous sommes loin de nous trouver dans une situation similaire », fait-on ressortir dans cette note. Le gouvernement mauricien, est-il écrit, a pris un certain nombre de mesures pour atténuer l’impact négatif de la pandémie et du conflit Russie-Ukraine. « Une comparaison des principaux indicateurs macroéconomiques montre clairement que la situation économique de Maurice s’améliore, contrairement à celle du Sri Lanka. Et elle devrait encore s’améliorer à moyen terme », y soutient-on.
Comparaison des indicateurs macroéconomiques
Croissance
Alors que la croissance du Sri Lanka devrait être affectée négativement en 2022 par l’impact de la pénurie de devises étrangères, l’économie mauricienne devrait enregistrer une forte reprise avec un million de touristes, affirme le gouvernement. De même, les déséquilibres macroéconomiques au Sri Lanka affecteront négativement les activités économiques et la confiance des entreprises. « Alors qu’à Maurice, les investissements du secteur privé sont en hausse et les dépenses de consommation des ménages se redressent », indique-t-on dans la note.
Inflation
Si les deux pays font face à des pressions inflationnistes, la dévaluation récente de la roupie srilankaise de plus de 50 % ajoute une pression supplémentaire sur les prix intérieurs au Sri Lanka, fait-on ressortir. Le taux d’inflation en 2022 devrait atteindre les deux chiffres, soit 10,5 %. « En revanche, l’augmentation du taux d’inflation à Maurice est contenue par les diverses mesures prises : l’extension de la subvention sur les prix de sept catégories de produits essentiels ; le paiement de la compensation salariale en janvier ; ou encore le maintien de la subvention sur le gaz, la farine et le riz, au coût de Rs 4 milliards », explique-t-on dans la note.
Dette publique
La dette publique du Sri Lanka est actuellement proche des 120 % du PIB. En revanche, la dette publique à Maurice est sur une trajectoire descendante, souligne-t-on. Elle est passée de 96,2% du PIB en juin 2021 à 94,3% en septembre 2021 et 89,5 % en décembre 2021. « Le ratio d’endettement devrait être ramené à moins de 80 % d’ici fin juin 2022 », prévoit le gouvernement. Autre constat : près de 40 % de la dette du gouvernement central du Sri Lanka est d’origine étrangère. Cependant, à Maurice, seulement 22 % de la dette publique provient de sources extérieures. « Ainsi, Maurice est confronté à des risques de taux de change bien moins importants que le Sri Lanka. Ajouté à cela, quelque 48 % de la dette publique sont libellés en euros. Or, la roupie s’est appréciée d’environ 2,3 % par rapport à l’euro entre juin 2021 et mars 2022. Ce qui réduit le poids de la dette », souligne-t-on. De même, poursuit le gouvernement, la totalité de la dette extérieure du gouvernement mauricien provient soit d’institutions multilatérales, soit de pays bilatéraux, et ce à des taux concessionnels. « En revanche, au Sri Lanka, environ 60 % de la dette extérieure provient de sources commerciales levées sur les marchés internationaux des capitaux, ce qui implique des taux d’intérêt plus élevés », fait-on ressortir.
Réserves
Les réserves internationales de Maurice ont augmenté pour atteindre 8,1 milliards de dollars à fin mars 2022. Ce qui représente environ 17 mois d’importations. « En revanche, en raison de l’importance du service de la dette extérieure et de son inaccessibilité aux marchés de capitaux internationaux, les réserves internationales brutes du Sri Lanka ont diminué, passant de 7,6 milliards de dollars à fin 2019 à un niveau dangereusement bas de 2,3 milliards de dollars à la fin de février 2022. Ce qui ne représente que 1,3 mois d’importations », compare le gouvernement mauricien.
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