Le secteur bancaire peut souffler. Moody’s n’a pas touché à la notation des principales banques du pays. Pour les banquiers, c’est un signe positif. Ils ont bon espoir que le pays retrouve son statut de Baa2 l’année prochaine.
Le SEMDEX, principal indice boursier, a perdu 1,25 %, vendredi, entraîné par la dégringolade des actions bancaires. En effet, les titres MCBG (MCB Group) et SBMH (SBM Holdings) ont perdu 3,41 % et 1,1 % respectivement.
Un recul qui s’explique par les craintes que Moody’s revoit à la baisse sa notation dans le secteur bancaire. Cela, après avoir abaissé la note souveraine du pays, de Baa2 à Baa3, positionnant ainsi les obligations d’État à un cran de la catégorie spéculative (Junk Bonds). Cela impliquera que le pays perdra alors son Investment Grade. Ce qui serait hautement préjudiciable pour le secteur financier bancaire et non bancaire. La décision de Moody’s de laisser inchangée la notation des trois principales banques commerciales du pays, à savoir MCB, SBM et Absa Bank, va certainement alléger la pression.
« La confirmation de la notation de ces trois banques reflète la résilience de leur profil financier malgré un environnement opérationnel de plus en plus difficile. Bien que les risques liés aux actifs des banques restent élevés, à des degrés divers, les banques conservent une forte liquidité et de solides tampons de capital. Nous nous attendons à ce que leur rentabilité rebondisse après la pandémie », indique Moody’s Investors Service dans un document publié vendredi.
L’agence de notation ajoute que « si la reprise économique post-pandémie reste fragile, à la suite de la guerre en Ukraine qui entraînera une hausse de l'inflation et une baisse des taux de croissance mondiaux, nous pensons que toute détérioration de la qualité des actifs des banques mauriciennes sera gérable grâce à des mesures de soutien ciblées ».
Bases solides et rentables
Dans le secteur bancaire, on accueille favorablement ce maintien. Mathieu Mandeng, CEO de Standard Chartered Mauritius, dit ne pas être surpris. « D’abord, les bases de ces banques sont solides, bien capitalisées, liquides et rentables. Ce qui justifie que la notation a été maintenue », avance-t-il.
Thierry Vallet, Founder Executive, General Manager et CEO par intérim d’AfrAsia Bank, abonde dans le même sens. « Le maintien de la notation de nos banques vient confirmer la solidité de notre système bancaire. Le bilan de nos banques reste solide, avec un fort niveau de liquidité. De plus, les résultats financiers du dernier trimestre démontrent une bonne progression au niveau de la profitabilité », fait-il ressortir.
Ces facteurs, poursuit Thierry Vallet, justifient donc la note des banques malgré l’abaissement de la notation du pays de Baa2 à Baa3. De plus, précise-t-il, Moody’s a rappelé que les perspectives du secteur bancaire demeurent stables. « Ce qui laisse espérer que l’année prochaine, on pourra revenir au niveau de Baa2 », laisse-t-il entendre.
Mathieu Mandeng est également optimiste. Pour lui, il y a deux aspects positifs à retenir malgré l’abaissement de la note souveraine du pays. D’abord, Maurice est le seul International Financial Centre (IFC) d’Afrique reconnu comme Investment Grade. Ensuite, les perspectives restent stables.
« Il n’y avait que cinq pays africains sur 54 qui détenaient le statut d’Investment Grade, soit l’Afrique du Sud, le Maroc, le Botswana, la Namibie et Maurice. Aujourd’hui, il n’y a que Maurice et le Botswana qui détiennent ce statut. À savoir que le Botswana n’est pas un IFC, contrairement à Maurice et six autres centres financiers internationaux en Afrique (Casablanca, Cape Town, Johannesburg, Nairobi, Kigali, Lagos). On est donc le seul pays en Afrique à être un centre financier et à détenir un Investment Grade », souligne-t-il.
Selon Mathieu Mandeng, il est désormais important que le pays travaille sur deux fronts : continuer ses efforts pour contenir la dette et la rendre plus soutenable et améliorer le taux de croissance. « Il faut savoir que nous ne sommes pas encore au niveau d’avant la Covid-19, car nous avons été affectés par des chocs exogènes liés à la pandémie. Cependant, les indicateurs évoluent dans le bon sens. »
Le CEO de Standard Chartered Mauritius dit ainsi « avoir bon espoir que dans un avenir raisonnable, nous allons revenir à notre niveau d’avant, mais nous devons tous travailler ensemble, le gouvernement, le secteur privé et les autres acteurs collaborateurs ».
Ces facteurs qui pourraient entraîner une hausse ou une baisse de notation
- Toute pression à la hausse sur les notations des banques mauriciennes est limitée, étant donné l’environnement opérationnel difficile.
- Les notes des banques mauriciennes pourraient être abaissées si leurs paramètres financiers s’affaiblissent au-delà de ceux des pairs mondiaux que Moody’s évalue de manière similaire.
La création de la MIC a aidé à protéger les banques locales, selon Moody’s
Moody’s est revenue sur la création de la Mauritius Investment Corporation (MIC), un Special Purpose Vehicle entièrement détenu par la Banque de Maurice et financé à hauteur de 2 milliards de dollars de réserves internationales. « La création de la MIC a permis de soutenir la stabilité financière en fournissant des fonds aux entreprises d’importance systémique. Elle a ainsi protégé les banques locales d’une forte poussée de détérioration de la qualité des actifs, ce qui est positif pour le système bancaire », soutient Moody’s. L’agence de notation ajoute, cependant, que la MIC expose à son tour le bilan de la Banque centrale à un risque de crédit accru.
Maurice demeure une juridiction stable selon la MBA
Par le biais d’un communiqué, la Mauritius Bankers Association (MBA) soutient que malgré le changement de notation, Maurice reste le seul centre financier international de qualité en Afrique. « Les banques mauriciennes restent stables, très liquides, avec des niveaux de capitalisation et des tampons confortables, et ont fait preuve d’une résilience soutenue depuis la période pré-Covid. De même, les perspectives stables démontrent que Maurice est une juridiction stable pour les investissements nationaux et transfrontaliers », ajoute-t-elle.
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