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Réforme de l’orthographe du français: un exercice qui fait polémique

L’accent circonflexe disparait partiellement et environ 2 400 mots du lexique français sont simplifiés. Tels sont les changements annoncés, dans le cadre de la réforme de l’orthographe.Une démarche jugée ridicule par de nombreux internautes, mais nécessaire pour les linguistes. L’Académie française s’est dissociée de la réforme de l’orthographe. Qu’est-ce qu’une réforme de l’orthographe et en quoi cela nous concerne ?
Pour le Dr Issa Assgarally (photo), linguiste et chargé de cours à l’Open University of Mauritius, la réforme de l’orthographe est loin d’être une démarche anodine. Il explique qu’il faut avant toute chose comprendre de quoi il s’agit avant de tirer des conclusions. « Ce qu’on appelle la ‘réforme de l’orthographe’  est un ensemble de rectifications qui concerne 2 000 mots, c’est-à-dire environ 4 % du lexique du français. Ensuite cet ensemble est proposé par le Conseil supérieur de la langue française et non pas par l’Académie française bien que Maurice Druon, Secrétaire perpétuel de cette Académie, l’ait approuvé en 1990 », souligne le linguiste. De quelles rectifications parle-t-on ? Selon notre interlocuteur ces dernières servent à éliminer des anomalies (« événement », mais « avènement »), une incohérence (« un cure-dent », mais « un cure-ongles »), une hésitation (le pluriel des mots composés), pour tenir compte d’une évolution phonétique (l’accent circonflexe ne jouant le plus souvent aucun rôle phonétique) ou graphique (disparition du trait d’union dans « best-seller », « week-end » et « porte-feuille »). En somme, la réforme a pour but de faciliter l’apprentissage de l’orthographe. Selon le linguiste, tous les pays francophones sont concernés par cette réforme. « La presse écrite, les livres imprimés ou numériques, les textes scolaires qui viennent de France suivront sans doute les rectifications proposées dont l’entrée en vigueur aura lieu en juillet 2016 », dit-il.
[panel contents="Elle fait beaucoup parler d’elle, mais la réforme de l’orthographe demeure abstraite pour de nombreuses personnes. Ci-après quelques-uns des changements majeurs apportés à la nouvelle orthographe. Les numéraux composés sont systématiquement reliés par un trait d’union. (Exemple : Vingt et un est désormais écrit avec un trait soit vingt-et-un) L’accent circonflexe disparait sur les ‘i’ et les ‘u’. On le maintient néanmoins dans les terminaisons verbales du passé simple, du subjonctif et dans cinq cas d’ambigüité. (Exemple : coût – cout, entraîner – entrainer). Dans certains mots l’accent circonflexe est maintenu parce qu’il permet de distinguer les mots qui sont écrits pareils, mais qui ont une signification différente. (Exemple : du – dû, sur – sûr, jeune – jeûne)." label="La nouvelle orthographe" style="info" custom_class=""]
Les élèves seront-ils perturbés ? Peut-être pas par l’orthographe elle-même, répond le linguiste. « Ces derniers peuvent être confus, car ils trouveront une orthographe à l’école et une autre, avec des différences, dans les journaux et les livres, en particulier les textes de fiction. Idem pour les enseignants qui utilisent une orthographe et qui auront à enseigner une autre avec les rectifications. Sur le plan culturel, ceux qui ont recours quotidiennement à l’écrit tels que les journalistes, écrivains, etc. auront à faire des choix », précise le Dr Issa Assgarally. [row custom_class=""][/row]

Changements graduels

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/div> Du côté du Mauritius Institute of Education (MIE), on nous informe qu’une réforme de l’orthographe engendra certainement des changements au niveau du programme de l’enseignement de la grammaire et de l’orthographe dans les écoles à Maurice. Toutefois, comme le précise le Dr Vicram Ramharai, responsable du département de français au MIE, les changements se feront graduellement. « Il était temps que l’orthographe du français soit revue. Nous allons certainement en tenir compte. Mais il n’y a aucune obligation de l’utiliser. Il faut comprendre que la réforme n’a pas été imposée. Nous devons prendre en considération le choix qui existe », explique ce dernier. En ce qui concerne les manuels scolaires, le MIE soutient que l’orthographe traditionnelle sera maintenue. Toutefois, les discussions sont ouvertes sur ce sujet et une décision sera prise en conséquence, précise le Dr Vicram Ramharai. Mais qu’en est-il des examens nationaux et internationaux ? Les candidats seront-ils pénalisés au niveau de l’orthographe ? « Le jour où la nouvelle orthographe sera la règle, nous devrons revoir notre façon d’enseigner le contenu par rapport à l’orthographe. Pour l’instant, il n’y a aucune nécessité de remettre à jour notre programme d’étude ou remettre en question la formation des enseignants. Tous les ans, l’Académie française introduit de nouveaux mots dans le lexique français. Une fois que c’est entré dans le dictionnaire, il nous faut l’accepter », explique le responsable du département de français au MIE. Et d’ajouter que l’orthographe n’est pas quelque chose que l’on maîtrise en un jour, en un mois ou en une année. Cela prendra du temps. « C’est un long processus, mais nous devons commencer dès maintenant. Ce travail ne peut se faire uniquement au MIE. Le MES et Cambridge (pour les examens du School Certificate (SC) et du Higher School Certificate (HSC) doivent jouer leur rôle. Les médias ont aussi une part de responsabilité dans la sensibilisation de la société sur cette réforme. Le MIE seul ne peut assumer cette responsabilité », dit-il. Au niveau des écoles privées, utilisant le français comme médium d’enseignement, également il n’y aurait pas de grands changements. Par exemple, à l’école Paul et Virginie à Tamarin, la réforme de l’orthographe n’aurait aucune incidence sur le déroulement des classes de français selon Patryck Froissart, le chef de cet établissement. « Les manuels ne seront pas modifiés, car la réforme n’impose aucune graphie, mais au contraire considère les deux graphies comme non fautives. Elle aura ainsi un impact très limité, puisque la réforme était déjà partiellement appliquée. Les rectifications proposées en 1990 restent une référence, mais ne sauraient être imposées. Certaines d’entre elles entrent progressivement dans les ouvrages de référence (dictionnaires, manuels, etc.). Dans l’enseignement aucune des deux graphies (ancienne ou nouvelle) ne peut être tenue pour fautive », souligne ce dernier.

L’Académie française se dissocie de la réforme

Dans une interview publiée dans Le Figaro le samedi 13 février, la secrétaire de l’Académie française, Hélène Carrère précise que « La position de l’Académie française n’a jamais varié sur ce point : une opposition à toute réforme de l’orthographe, mais un accord conditionnel sur un nombre réduit de simplifications qui ne soient pas imposées par voie autoritaire et qui soient soumises à l’épreuve du temps. » Tout porte à croire que l’Académie française n’avait pas participé à cette réforme. Lors d’un atelier de travail en 1990, des experts dont des professeurs, des linguistes, des correcteurs, entre autres, avaient proposé des harmonisations lexicales, par exemple, l’ajout d’un ‘r’ dans ‘chariot’ pour être similaire à ‘charrette’ ainsi que l’élimination de l’accent circonflexe. La secrétaire attire l’attention sur une nuance dont elle dit être très importante. Elle souligne que c’est ce groupe de travail qui les avait formulées, et non l’Académie. L’historienne précise que l’Académie s’était prononcée sur des principes généraux – dont un nombre limité de rectifications d’incohérences ou d’anomalies graphiques. Par ailleurs, elle fait ressortir qu’avec un système éducatif qui est en déclin, au point où un élève sur cinq quitte l’école sans savoir lire, il est alors plus important d’offrir des facilités aux élèves au lieu de s’attarder sur la conservation ou la suppression de l’accent circonflexe.
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