Interview

Ram Nowzadick: «C’est la frustration généralisée dans les hôpitaux»

Ram Nowzadick

Souvent à couteaux tirés, les syndicats représentant les infirmiers (Nurses Union, Nursing Association et Senior Nursing Staff Association) ont fait front commun au sein de la Federation of Health Services Union pour défendre leurs droits et, semble-t-il, critiquer âprement le ministre de la Santé. Les frères ennemis sont réunis. À qui doit-on cette réconciliation ? C’est vrai que les syndicats représentant les infirmiers ont toujours été divisés. Cependant, nous avons réalisé que face à l’inertie du ministère de la Santé, il nous fallait mettre nos différends de côté pour mieux faire entendre notre voix. Après tout, l’union fait la force ! Notre fédération va se battre pour la profession et pour offrir un service de qualité à la population. [blockquote]«Anil Gayan devrait mettre son ego de côté ! Une approche plus humaine lui ferait le plus grand bien..»[/blockquote] Que reprochez-vous au ministre de la Santé ? Je connais Anil Gayan personnellement. Nous avions de très bonnes relations. J’ai un profond respect pour lui comme Senior Counsel, mais aussi pour son intelligence. Cependant, j’ai été très déçu par ses différentes prises de position depuis qu’il est ministre de la Santé. Il a pris plusieurs décisions de manière unilatérale. Il a presque fermé sa porte à tous les partenaires de la Santé, dont les syndicats et les ONG. Allez-vous, comme les ONG, réclamer la tête d’Anil Gayan ? La Federation of Health Services Union ne va pas réclamer sa démission. Nous pensons plutôt qu’il doit se ressaisir au plus vite et changer sa façon d’opérer. Il doit cesser d’agir de façon anti-démocratique. Même un ministre doit respecter les règles et les procédures. Il ne peut agir comme bon lui semble. Anil Gayan devrait mettre son ego de côté ! Une approche plus humaine lui ferait le plus grand bien. Il doit pouvoir agree to disagree. Je précise que l’homme ne nous intéresse pas. Je suis persuadé que le ministre Gayan est très mal conseillé sur plusieurs dossiers. Sans compter qu’il est très mal entouré au ministère. Un ministre ne peut être présent sur tous les fronts… À quoi servent les hauts cadres ? Je suis d’accord que le ministre ne peut tout faire. La Santé fait face à un sérieux problème actuellement. C’est la pire administration que ce ministère a connue. C’est maintenant que nous ressentons l’absence de Jaya Veerapen, l’ancienne Senior Chief Executive. Elle a laissé un grand vide. Elle avait une capacité d’écoute hors pair et réglait rapidement les problèmes. Auparavant, ce ministère était très dynamique. Depuis peu, il est plus lent qu’une tortue ! Les hauts cadres pratiquent une closed door policy. Toutes nos demandes sont restées lettre morte. Pourtant, les problèmes ne manquent pas dans le service hospitalier. Connaissez-vous la véritable raison derrière le retard de la publication du rapport du Pay Research Bureau ? C’est tout simplement le fait que plusieurs ministères, dont la Santé, se font prier pour aller déposer en compagnie des représentants syndicaux. Quels sont les problèmes qui demandent à être réglés en urgence ? Tous les membres du service hospitalier qui sont privés de leurs allocations, certains depuis un an, doivent être payés au plus vite. Il est surprenant que le ministère de la Santé ne soit pas au courant que dans les hôpitaux, les employés du département finances font un go-slow depuis qu’ils sont privés d’heures supplémentaires. C’est le chaos à la School of Nursing. 20 ans plus tôt, il y avait 22 enseignants pour 300 Student Nurses. Actuellement, il n’y en a que 5 pour 1 000 Student Nurses. Cela, sans compter les infirmiers qui suivent des cours de spécialisation. Ils sont 2 000 infirmiers, détenteurs d’un certificat, qui attendent l’obtention d’un diplôme après avoir suivi un Top-up Course. La Nursing Association a-t-elle toujours à cœur l’intérêt des patients ? Définitivement ! Nous n’avons jamais dérogé de cette mission. Pourquoi votre silence sur le fait que les médicaments de base sont distribués au compte-gouttes ? Nous n’avons pas gardé le silence sur ce problème. Je confirme qu’il existe. La mauvaise gestion du stock des médicaments en est la source. Sauf que, pour remédier à ce problème, le ministère de la Santé a décidé de demander aux infirmiers en salles de gérer leur propre stock de médicaments. Or, cela ne fait pas partie de leurs attributions ! Sans compter qu’il y a un manque de contrôle sur le stock de ces produits. Puis, en salle, les conditions de stockage ne sont pas idéales. Confirmez-vous qu’il y a une certaine frustration parmi les membres du personnel hospitalier ? C’est la frustration généralisée dans les hôpitaux. Toutes les catégories d’employés font face à des problèmes dans le cadre de leur travail. Ils se sentent délaissés, d’autant que personne n’est disposé à écouter leurs doléances. Savez-vous par exemple que les Hospital Care Attendants sont contraints de couvrir trois à quatre shifts d’affilée dans certains hôpitaux en raison d’un manque de personnel ? À l’hôpital Jeetoo, les infirmiers n’ont même pas de réfectoire. L’ironie dans l’histoire, c’est que le ministère de la Santé enfreint les dispositions de l’Occupational Safety and Health Act. Le problème relève-t-il d’une carence au niveau de la communication ? Sans doute ! Mais il paraît que le ministre de la Santé lui-même ne croit pas dans la communication. Pourtant, en tant que professionnel, il aurait dû réaliser l’importance de l’écoute. Vous maintenez votre marche pacifique prévue pour le 20 novembre ? Bien sûr ! Plus de 2 000 infirmiers vont descendre dans les rues de la capitale ce jour-là pour réclamer leurs droits. Je rassure la population que le service hospitalier ne sera point affecté, car ce sont les infirmiers en congé qui participeront à cette marche. L’objectif est d’envoyer un signal fort au ministère de la Santé.

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