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Private prosecution : un pouvoir accordé au citoyen 

Le pandit Vivay Kanum Pursun, Me Siddharta Hawoldar, Le PPS Rajanah Ravi Dhaliah, L’Attorney General Maneesh Gobin et Me Ashley Hurhangee.

Le lundi 5 juin, la contestation de l’Attorney General Maneesh Gobin et du Parliamentary Private Secretary Rajanah Ravi Dhaliah à l’encontre de la « private prosecution » contre eux se poursuivra devant la Cour suprême. En attendant une décision de justice, deux avocats apportent des éclaircissements sur cette procédure.

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L’Attorney General (AG) Maneesh Gobin et le Parliamentary Private Secretary (PPS) Rajanah Ravi Dhaliah contestent la private prosecution intentée contre eux par le pandit Vivay Kanum Pursun (voir encadré). Le lundi 22 mai, la Cour suprême a examiné leur contestation et a renvoyé l’audience au lundi 5 juin. Cependant, la question demeure : qu’est-ce que la procédure de private prosecution ?

L’avocat Ashley Hurhangee explique qu’une private prosecution est un outil disponible pour les citoyens. « C’est un pouvoir accordé aux citoyens pour obtenir justice », confirme son confrère, Me Siddharta Hawoldar. Ce dernier est d’ailleurs d’avis que les private prosecutions doivent faire partie intégrante de notre système juridique. 

Cependant, il y a certains critères à remplir. Selon l’article 4 du Criminal Procedure Act (CPA), la personne qui souhaite déposer une private prosecution doit démontrer qu’elle a été lésée (aggrieved party) dans l’affaire. Me Ashley Hurhangee souligne que ce type de poursuite est engagé lorsque le bureau du Directeur des poursuites publiques (DPP) refuse de poursuivre l’affaire au pénal. Dans ce cas, la personne lésée peut opter pour une private prosecution.

De son côté, Me Siddharta Hawoldar mentionne une décision historique de la Cour suprême, qui a établi le critère de la personne lésée (aggrieved party) pour une private prosecution. Il fait notamment référence à un jugement rendu dans l’affaire Nizam Edath-Tally contre l’ancien ministre Michael Glover, le 20 octobre 1994.

Une private prosecution peut être déposée devant un tribunal de district. Cependant, pour celles présentées à la cour intermédiaire ou à la Cour suprême, l’approbation du DPP est requise. Me Ashley Hurhangee précise également que le DPP n’est pas tenu de rendre compte de ses décisions prises dans l’exercice de ses fonctions. Les deux avocats s’accordent à dire que les poursuites pénales relèvent exclusivement du pouvoir du DPP. « Selon l’article 72 de notre Constitution, il est le seul autorisé à engager des poursuites pénales contre un citoyen. Il peut également reprendre une poursuite privée à son compte et aux frais de l’État », fait comprendre Me Ashley Hurhangee.

Toujours est-il que Me Siddhartha Hawoldar est d’avis qu’il faudrait permettre à une private prosecution ayant un intérêt public de se poursuivre. « Mon opinion personnelle est qu’il faudrait assouplir les lois afin de permettre à une private prosecution présentant un intérêt public de progresser. Le but de notre système pénal est avant tout de protéger les citoyens », affirme-t-il.

Dans la même veine, il estime qu’il faut également autoriser les recours d’intérêt public (public interest litigation). « Les recours d’intérêt public sont un concept répandu en Inde et en Angleterre. À Maurice, c’est compliqué, car la personne qui porte le recours en cour doit prouver qu’elle est personnellement lésée par la décision », fait-il remarquer.

Il n’empêche, poursuit Me Siddhartha Hawoldar, qu’il faut faire la distinction entre les affaires d’intérêt public et celles qui sont portées de manière abusive. « Si pour chaque problème de voisinage, un citoyen devait engager une private prosecution, cela surchargerait le système judiciaire et les cours de justice », explique-t-il.

Pour sa part, Me Ashley Hurhanghee rappelle qu’un seul cas de private prosecution, ayant abouti à la condamnation d’un ministre, remonte à 1975. Il s’agit de l’affaire d’Alex Rima, poursuivi devant la cour de district pour vol de clés à l’encontre d’une dame. Le ministre a été reconnu coupable et condamné à payer une amende. Il n’en demeure pas moins que, selon l’homme de loi, cette procédure semble être devenue la « nouvelle mode pour jeter de la boue sur des politiciens ».

L’affaire Maneesh Gobin en bref 

C’est le pandit Vivay Kanum Pursun qui a déposé une private prosecution contre l’AG Maneesh Gobin et le PPS Rajanah Ravi Dhaliah. Il accuse le ministre et le PPS d’avoir agi de concert, le 12 septembre 2020, pour attribuer les terres de l’État à Dayot et Mangin, d’une superficie de 250,76 hectares, à Eco Deer Park Association, en échange d’un pot-de-vin de Rs 3,5 millions. La private prosecution a été suspendue par ordre de la Cour suprême à la suite d’une motion déposée par l’AG. Le PPS a également présenté une contestation. Les deux motions sont en cours d’examen.

 

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