L’exercice d’Express of interest, lancé le 23 septembre dernier par le gouvernement mauricien pour le projet de la nouvelle carte d’identité, est déjà source de controverses. En effet, plusieurs compagnies souhaitent participer à la réalisation du projet et ont transmis leurs appréhensions au bureau du Premier ministre. C’est plus précisément autour d’une caractéristique du projet que de sérieuses réserves ont été émises. Cela, concerne plus précisément l’utilisation d’une imprimante dotée d’un « laser of engraving color » pour le développement de la nouvelle carte d’identité.
Publicité
Selon Loganaden Velvindron, un des fondateurs de la société Cyberstom.mu, cette technologie permet de réaliser des impressions qui ne laisseront aucun défaut sur la carte d’identité. « Le développement de la nouvelle carte d’identité nécessitera l’impression de certains circuits. Il s’agit d’un exercice très délicat », fait ressortir l’expert en cyber sécurité.
Les points de discorde autour d’une telle technologie, qui ont d’ailleurs été soulevés auprès du Prime Minister’s Office (PMO), portent d’abord sur le coût. « Printing costs are significantly higher, we would recommend the use of well-approved printing techniques unless budget allows for different approaches », fait ressortir un des éventuels soumissionnaires.
Technologie coûteuse
Abondant dans le même sens, Loganaden Velvindron confirme qu’il s’agit d’une technologie très coûteuse bien qu’il souligne le fait que ce soit un gage de qualité. « L’acquisition d’une imprimante coûte en général entre 1 000 et 2 000 dollars. Et comme dans ce cas précis, l’État mauricien veut obtenir 800 000 nouvelles cartes probablement dans un délai précis, une compagnie souhaitant réaliser le projet devra être équipée de plusieurs de ces imprimantes », explique-t-il.
Autre réserve émise : le fait qu’il s’agit d’une technologie nouvelle et que peu de pays ont jusqu’ici eu recours à ce type d’équipement. Un des potentiels soumissionnaires a ainsi fait ressortir qu’il n’y a qu’une seule compagnie au monde qui dispose d’une telle technologie. Et dans un souci d’ouvrir l’exercice « to a normal concurrence scenario », une requête a été formulée auprès du bureau du Premier ministre pour avoir recours à d’autres options. « Étant une compagnie qui dispose dans le domaine de turn-key solutions et pour avoir assuré la livraison de cartes sécurisées partout à travers le monde, nous ne serons pas en mesure de participer à l’élaboration d’un tel projet et c’est aussi le cas pour plusieurs autres compagnies », a fait part un des éventuels soumissionnaires.
D’autres voix se sont élevées sur le fait que l’utilisation de technologie va essentiellement profiter à une minorité d’entreprises alors que la majorité des compagnies du secteur seront désavantagées. Sans compter que d’autres potentiels soumissionnaires sont d’avis que l’utilisation d’une telle technologie ne garantit pas nécessairement davantage de sécurité autour de la nouvelle carte d’identité. Plusieurs de ces compagnies sont de ce fait d’avis qu’elles sont en mesure de proposer une nouvelle carte d’identité sécurisée sans pour autant utiliser la technologie exigée par le gouvernement.
Données sensibles
Cependant, les arguments avancés par ces potentiels soumissionnaires ne font pas l’unanimité auprès de Didier Samfat, consultant en matière de cyber sécurité. « Il s’agit d’une technologie qui a déjà été utilisée dans des pays, tels que le Burkina Faso, l’Estonie ou encore le Cameroun. Donc, cela démontre que d’autres pays à travers le monde ont déjà fait confiance à ce type de technologie et qu’elle a déjà fait ses preuves », soutient-il. Ce dernier dit comprendre que le gouvernement mauricien veuille opter pour une technologie nouvelle, car le développement de nouvelles cartes d’identité ne peut se faire avec des technologies obsolètes.
Didier Samfat explique que là où il faut faire preuve de prudence, c’est concernant la protection, des données des détenteurs de la nouvelle carte d’identité. « Il s’agit de données sensibles et il ne faut surtout pas que ces informations soient utilisées par des organismes autres que le gouvernement », ajoute-t-il. C’est donc dans cette optique qu’il plaide pour la création d’une autorité indépendante qui pourra certifier que les signatures numériques soient totalement protégées.
Le Défi Plus a souhaité obtenir des explications auprès du ministère de la Technologie de la Communication et de l’innovation sur cette technologie qui est en train de soulever des interrogations. Toutefois, un préposé du ministère nous a indiqué que rien ne sera divulgué pour le moment. Au niveau du bureau du Premier ministre, l’on reste sur la position de départ et tout semble indiquer qu’aucun n’amendement ne sera apporté.
Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !