Blog

Les leçons de Tchernobyl

Le monde commémore, cette année, le 30e anniversaire de la plus grande catastrophe nucléaire civile de tous les temps. En effet, le 26 avril 1986, suite à une sérieuse défaillance dans le système de contrôle suscitée par une négligence professionnelle à plusieurs niveaux, deux explosions du 4e réacteur font voler en éclats l’édifice de la centrale de Tchernobyl, dégageant une épaisse colonne de fumée radioactive dans l’atmosphère. Le combustible nucléaire va brûler pendant plus de 10 jours, rejetant des radioéléments équivalents à l’intensité d’au moins 200 bombes d’Hiroshima. Les éléments chimiques les plus lourds, notamment le strontium et le cérium, retombent dans les environs immédiats de la centrale, alors que les particules les plus légères, comme l’iode et le césium, forment un nuage qui contaminera, au gré des vents et des pluies, les trois quarts du continent européen, de la Russie à l’Irlande, en passant par la Scandinavie. En pleine guerre froide, Moscou tentera jusqu’au bout de cacher, puis de minimiser l’ampleur de la catastrophe, histoire de sauver la face devant la communauté internationale. Mais c’était peine perdue, car moins de 48 heures après l’explosion, la Suède avait tiré la sonnette d’alarme à propos d’une forte hausse de  radioactivité sur son territoire. C’est alors que les autorités soviétiques décideront d’évacuer 135 000 personnes du périmètre immédiat de la catastrophe. Par la suite, 600 000 soldats, pompiers et civils, dits « liquidateurs », y seront envoyés pour la construction d’un sarcophage autour du site dans le but de limiter les dégâts. Un bon nombre d’entre eux y laisseront la vie, alors que la grande majorité encore vivants aujourd’hui souffrent de divers dysfonctionnements pathologiques liés à l’exposition à la forte radioactivité. Les dirigeants occidentaux avaient toujours tendance à associer la catastrophe de Tchernobyl à la vétusté de la technologie soviétique, jusqu’à ce que Fukushima au Japon ne vienne, en 2011, raviver les douloureux souvenirs d’avril 1986. Un vaste débat s’est enclenché depuis en Europe à propos de l’avenir du nucléaire en tant que source d’énergie civile et aura certainement une influence non négligeable sur la présidentielle de l’an prochain en France. Même Angela Merkel avait subi des revers électoraux majeurs pour avoir décidé en 2010 de prolonger la durée d’exploitation de 17 réacteurs. Ce n’est que quelques mois de cela, sous la pression de l’opinion publique dans le sillage de la tragédie de Fukushima, que sept réacteurs ont été mis hors d’usage. En France, beaucoup a été dit sur la centrale vieillissante de Fessenheim en Alsace, mais elle est toujours en activité malgré les promesses du candidat socialiste François Hollande, durant la campagne présidentielle de mai 2012, concernant son démantèlement. Par ailleurs, même si en 30 ans, Tchernobyl a aidé à faire avancer la cause de la science, il n’a pu, en revanche, faire progresser la conscience humaine eu égard à l’urgence d’une consommation plus rationnelle de l’énergie. Idem pour la tragédie de British Petroleum, survenue le 20 avril 2010 au large des côtes de la Louisiane aux États-Unis lorsque, par manque de vigilance et de technologie efficace et adéquate pour contrer les conséquences de l’explosion d’une plate-forme pétrolière, plus de 8 millions de litres de brut s’étaient déversés dans le golfe du Mexique, provoquant une catastrophe écologique sans précédent dans cette région du globe. Hormis la mort d’un grand nombre de poissons, d’oiseaux et d’autres espèces animales – les écologistes avaient observé des centaines de carcasses de dauphin, dont une grande partie de nouveaux-nés, qui s’étaient échoués sur les plages d’Alabama –, les hydrocarbures décomposés remontent la chaîne alimentaire à partir des organismes marins qui les assimilent, entraînant l’empoisonnement d’autres organismes se trouvant au bout de cette chaîne. Nous courons tête baissée derrière la croissance et les profits à tout prix. Or, il est temps de changer notre fusil d’épaule et de songer à un système de développement économique plus sain, durable, soutenable, mais surtout moins énergivore. Bien que le nucléaire ne soit point concerné par le phénomène du réchauffement climatique, les différentes catastrophes survenues jusqu’ici démontrent que nous ne maîtrisons pas tous les tenants et aboutissants d’une technologie dont nous avons encore du mal à nous défaire.
Publicité
 

Notre service WhatsApp. Vous êtes témoins d`un événement d`actualité ou d`une scène insolite? Envoyez-nous vos photos ou vidéos sur le 5 259 82 00 !