La campagne électorale s’intensifie et les discours deviennent de plus en plus virulents. Ce week-end, Roshi Bhadain a suscité l’indignation générale en tenant des propos jugés méprisants à l’égard d’une députée sortante. Des observateurs appellent les candidats à un retour à des échanges respectueux et constructifs, plutôt qu’à un recours à des invectives et des attaques personnelles.
À quelques jours des élections générales, les politiciens animent des réunions, font du porte-à-porte et tiennent des congrès. Toutefois, les discours politiques se font plus acerbes, donnant souvent lieu à des dérapages verbaux. Ce week-end, Roshi Bhadain, leader de l’Alliance de l’Espoir, a suscité l’indignation en s’en prenant verbalement à une députée sortante. Ses propos, relayés sur les réseaux sociaux, ont ranimé la question des limites à ne pas franchir en politique, un sujet qui semble traverser les décennies sans perdre de son actualité.
Bernard Saminaden, journaliste et observateur de longue date, a assisté à de nombreuses campagnes marquées par ces dérives verbales. « Les attaques personnelles sont fréquentes dans les campagnes électorales, comme en 1987, lorsque sir Anerood Jugnauth avait directement visé la santé de Simadree Virahsawmy », explique-t-il. « On se souvient également d’un candidat traité de ‘loup-garou’ par son opposant. » Ces exemples illustrent bien, selon lui, que la violence verbale n’est pas nouvelle.
Cependant, Bernard Saminaden tient à souligner qu’il existe des politiciens qui ont su rester dignes et défendre leurs idées avec dignité. Paul Bérenger, Cassam Uteem, et Jean-Claude de l’Estrac figurent parmi ceux qui, selon lui, n’ont jamais franchi la ligne rouge. « Des figures comme Harry Bauluck et Dev Virahsawmy ont su captiver leur public par l’humour et la maîtrise de la langue créole sans tomber dans la vulgarité », se remémore-t-il.
Pour Bernard Saminaden, le paysage politique se divise en deux catégories : ceux qui cultivent l’art du discours pour inspirer et ceux qui pensent engranger des voix en multipliant les provocations. « Le débat politique devrait s’élever au-dessus des attaques personnelles et des insinuations communales », affirme-t-il.
Il se dit attristé par les cas de dérapages de Dinesh Ramjuttun et plus récemment de Roshi Bhadain, qui nuisent à l’image des campagnes électorales. « Bien que la technologie moderne ait transformé le paysage, il y a encore ceux qui lancent des propos jugés en dessous de la ceinture. Ce qu’il faudrait, au contraire, ce sont des arguments solides et une réflexion profonde », évoque-t-il.
Selon lui, dans la campagne actuelle, il y a toujours des politiciens qui sont corrects. Il cite l’exemple de Farhad Aumeer. « C’est un bon orateur. Il va ‘to the point’ et il est très convaincant. Il sait captiver son audience sans tenir de propos grossiers », affirme Bernard Saminaden.
Pour Adi Teelock, citoyenne engagée, les dérapages verbaux de cette campagne, qu’ils soient à connotation religieuse, sexiste ou phallocrate, sont choquants. « Aucun de ces propos ne fait honneur à leurs auteurs. Ce n’est pas ce qu’on attend de ceux qui aspirent à nous gouverner », déclare-t-elle. Elle se dit particulièrement outrée par les remarques de Roshi Bhadain, qui, malgré son alliance se voulant alternative aux partis traditionnels dits traditionnels ou composés de « dinosaures », s’en prend violemment à une députée sortante lors d’un meeting.
« Déjà que Nando Bodha et lui, tous deux anciens ministres du MSM, soient présentés comme futurs Premiers ministres en cas de victoire a de quoi faire grincer des dents. Et maintenant, voilà que Roshi Bhadain adopte un langage méprisable envers les femmes. Face à une députée sortante qui s’exprime sur le plan politique, il a tenu, lors d’un meeting, des propos orduriers sur elle en tant que femme », s’indigne Adi Teelock.
Elle ajoute que sur Facebook, il a même récidivé en visant d’autres candidates de l’opposition. « J’ignore comment les membres de cette alliance, surtout les femmes, peuvent tolérer ce genre de propos venant de leur ‘shadow Prime Minister’ », s’insurge-t-elle.
Yvan Martial, journaliste et observateur, considère que le recours aux attaques personnelles reflète souvent une panique face à la peur de perdre. « En cherchant à retrouver une popularité coûte que coûte, ces politiciens franchissent parfois des lignes rouges et finissent par se creuser eux-mêmes un trou », commente-t-il.
S’il soutient que cette réaction est humaine, il fait néanmoins ressortir que ce phénomène n’est pas propre à Maurice. Il rappelle les tensions entre Donald Trump et Kamala Harris aux États-Unis. « À Maurice, des dérives similaires ne sont pas rares. Chaque citoyen a ses propres repères et doit décider s’il souhaite se laisser entraîner dans ce marécage de la politique », conclut Yvan Martial.
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