Le mariage: cette corde sensible à se passer au cou

La vie à deux est synonyme d’émotions et de nouvelles expériences. Toutefois, elle marque aussi la fin d’une période, celle où l’on pouvait profiter de sa liberté et de son temps pour se faire plaisir. Or, si l’on brûle les étapes, l’on risque de voir la vie conjugale comme un fardeau. «J’ai l’impression de ne pas avoir profité de mon célibat », avoue Michael D., 22 ans. Comme lui, ils sont nombreux, notamment les jeunes, à s’engager pour la vie sans vraiment y réfléchir. Au fil du temps, engouffrés dans la vie conjugale et ses responsabilités, beaucoup voient leur mariage battre de l’aile et voient s’installer monotonie et frustration au sein de leur foyer. Certains experts estiment qu’il serait peut-être plus sage de prendre son temps avant de faire le grand saut pour ne pas avoir le regret d’être passé à côté des plus belles choses de la vie. Michael D. partage cet avic. Cela fait un an qu’il est marié et sa femme attend un enfant. « Êtes-vous déjà sorti sans savoir où vous allez ou encore ne pas rentrer à la maison carrément ? Une fois en couple, ce genre de choses ne font plus vraiment partie de votre agenda », lance-t-il. Le jeune homme nous confie être quelqu’un qui n’aime pas se fixer des limites. Pourtant, aujourd’hui, il en est bien obligé avec ses nouvelles responsabilités d’époux, et bientôt de père. « Avant, quand je sortais, je n’aimais pas me mettre la pression pour rentrer. Je ne regardais pas non plus le prix des choses que j’achetais. Or, aujourd’hui, je ne peux me permettre de faire toutes ces choses. Souvent, je suis frustré de ne pas pouvoir vivre à mon aise, mais je dois assumer mon choix. Quand on est célibataire, il faut en profiter pour faire les choses qu’on a toujours voulu faire et croquer la vie à pleine dent », conseille notre jeune marié. Michael D. nous confie qu’il adorerait voyager seul ou avec des amis. Avec ses nouvelles responsabilités, argue-t-il, il ne pense pas que ce serait possible. « J’aimerais avoir la chance de découvrir beaucoup de choses en voyageant. Le faire seul serait encore plus intéressant. Le fait de ne pas avoir des horaires à respecter, pas de comptes à rendre, mais juste la liberté de faire ce qu’on veut, quand on veut, serait génial », fait ressortir notre interlocuteur.

Se poser les bonnes questions

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"2992","attributes":{"class":"media-image wp-image-4230","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"400","height":"613","alt":"Marine Philibert"}}]] La psychologue Marine Philibert

/div> Pour éviter ce genre de ressentis après le mariage, il est crucial de pas être en couple pour les mauvaises raisons, c’est-à dire pour guérir une blessure narcissique, combler un manque infantile ou parce qu’on idéalise notre couple ou partenaire, fait ressortir la psychologue Marine Philibert. Elle insiste sur le fait qu’il faut se demander pour quelles raisons on a envie de se caser. « Est-ce que ce n’est pas trop précipité ? Est-ce que je vais être épanoui(e) et respecté(e) dans cette relation ? Est-ce que je le/la connais assez pour pouvoir lui faire confiance, lui parler de tout, envisager ma vie avec ? Est-ce que j’ai passé assez de temps avec elle/lui pour être sûr de pouvoir le/la supporter tous les jours et compter sur elle/lui lorsque ça ne va pas ? Il est important de se poser les bonnes questions avant de se lancer », conseille-t-elle. Elle est d’ailleurs rejointe dans ses propos par Priya Deelchand, Life Coach. Selon elle, certains se marient par amour, alors que d’autres le font à cause des facteurs sociaux. « Le taux de divorce est en hausse, car plusieurs se marient pour des raisons qu’il ne faut pas ! Les facteurs de société nous obligent à prendre des décisions sans penser aux conséquences. À Maurice, l’âge est un facteur déterminant quand il s’agit de se marier. La société s’attend à ce qu’on se marie au moins à la trentaine, sinon on a moins de chance de trouver un bon parti », explique-t-elle. La pression et l’attente de la famille nous poussent ainsi à nous caser, poursuit la Life Coach. « Certains le font parce que leurs pairs ont trouvé leur âme sœur. Or, cela peut être une décision qu’on peut regretter très vite. Il faut être prêt sur tous les plans avant d’entamer une relation sérieuse », conseille Priya Deelchand.

Apprendre à se connaître d’abord

Marine Philibert ajoute qu’une personne doit être épanouie déjà en étant seule et bien dans sa peau, avant de pouvoir vivre avec quelqu’un d’autre, sinon la relation débutera sur de mauvaises bases. « Je dirai qu’on est prêt lorsqu’on se connaît, qu’on connaît l’autre réellement, qu’on arrive à parler de tout et qu’on a les mêmes valeurs. Il est aussi important d’avoir des projets et rêves communs, qui permettent de souder le couple et d’éviter l’ennui », avance-t-elle. Apprendre à se connaître est une façon de grandir tout en profitant pleinement de sa vie, ajoute pour sa part Priya Deelchand. « Chaque jour est une occasion pour se découvrir soi-même. On ne prend souvent pas le temps de comprendre sa personnalité, ses réactions et ses ressentis. Pourtant, c’est une expérience enrichissante, car si vous savez qui vous êtes réellement, il sera encore plus facile de comprendre l’autre », indique la Life Coach. Bon nombre de personnes ne réalisent pas que la vie à deux demande beaucoup de compromis, ajoute-t-elle. « Toutefois, il est aussi important de garder son identité et ne pas changer pour l’autre. On peut oser des sorties en solo, comme aller dans son restaurant préféré. Il est à noter que passer du temps avec soi-même nous permet de mieux nous connaître mais aussi à développer notre intelligence émotionnelle », explique-t-elle. Se connaître, c’est aussi découvrir sa sexualité… « C’est quelquefois tabou, mais il faut connaître ses préférences sexuelles et avoir des expériences aussi pour être sûrs de ce que l’on souhaite », précise Marine Philibert. La psychologue explique qu’au cas contraire, on risque de ne pas faire la différence entre le véritable amour et l’attachement. Ainsi, à force de se rapprocher de quelqu’un, on peut croire que c’est avec cette personne que l’on souhaite passer notre vie. « Il faut se dire que passer du bon temps avec une personne ne veut pas forcément dire qu’on regarde dans la même direction pour ce qui est de l’avenir ensemble. La sexualité fait partie du ciment du couple, parce qu’au fil des années on apprend à connaître l’autre, à savoir ce qu’il/elle aime ou n’aime pas, et comment le/la surprendre. Pour que tous ces points soient réunis, il faut une complicité importante pour pouvoir communiquer sur les sujets tels que les valeurs de chacun, les rêves, les ambitions, les désirs, la sexualité », conclut Marine Philibert.

Patrick Payette: « Il est important d’être financièrement indépendant »

Il est révolu le temps où seul le mari travaillait pour faire bouillir la marmite familiale. Aujourd’hui, il est du devoir des deux conjoints d’assumer les responsabilités financières. Patrick Payette, animateur du Cours de Préparation au Mariage, estime que l’aspect financier est très important au sein du couple. « Dans plusieurs couples, l’argent est la raison principale des discordes. Avant de se passer la corde au cou, il serait bien d’abord de décrocher son diplôme et un travail prometteur. Il ne s’agit pas des accomplissements académiques, mais songez à atteindre un objectif. L’indépendance financière renforce l’estime de soi et cela est important pour l’épanouissement personnel », indique-t-il. L’animateur ajoute qu’il conseille souvent aux personnes qui viennent le voir de passer le maximum de temps avec leur famille respective. Les choses ne sont plus les mêmes quand on est en couple. « On doit partager notre temps avec notre partenaire et parfois avec sa famille ou ses amis. Ce n’est pas que vous allez oublier votre famille, mais il faudra partager son temps libre avec beaucoup plus de personnes. Souvent, les couples se disputent à cause de leur belle-famille. L’un estimant toujours que l’autre est trop attaché à sa famille », martèle Patrick Payette. Il ajoute qu’il est aussi très important d’agir avec discernement. « Il faut peser le pour et le contre avant de se dire oui pour la vie. Il faut être prêt pour assumer les responsabilités d’un foyer et apprendre à être tolérant. L’amour ne suffit pas toujours pour se mettre en couple. Une relation amoureuse ne réside pas dans la difficulté, mais dans les valeurs soit la fidélité, l’entente et l’entraide, entre autres. Sinon, il sera difficile d’avancer ensemble », dit-il.

Témoignage

Rina Madoo, 31 ans: « Je ne veux pas être un fardeau pour mon conjoint »

Il faut apprendre à se débrouiller seul avant de se mettre en couple, lance Rina Madoo, 31 ans. C’est très important, selon elle, pour que la relation fonctionne. « Déjà quand on se case, il faut partager les responsabilités, au lieu de prendre pour acquis que l’autre est là pour tout faire pour nous. Une fois en couple, notre mère n’est plus là pour nous préparer nos plats préférés quand on le veut, pour ranger notre chambre ou être présente en permanence pour nous aider. Notre père n’est plus là pour nous conduire en ville. Il faut ainsi grandir et apprendre à faire des choses sans dépendre des autres », indique la jeune femme. Notre interlocutrice soutient n’avoir pas eu le temps d’apprendre toutes ces choses avec ses études. Mais ce n’est que partie remise, affirme-t-elle, car il n’est jamais trop tard pour bien faire. « Je veux apprendre à me débrouiller dans la cuisine, même si c’est pour préparer des mets simples et aussi à faire les tâches ménagères. J’aimerais aussi tenter l’expérience de vivre seule, si j’en ai la chance, car je ne voudrais pas être un fardeau pour mon conjoint », conclut-elle.

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