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La lourdeur bureaucratique décriée : 57 formulaires nécessaires pour jeter l’ancre à Port-Louis

L’excès de bureaucratie décourage les navires à venir à Port-Louis. Cette récrimination des agents maritimes locaux est soutenue dans un document du Board of Investment (BoI) daté du 13 février 2017.

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Dans un rapport soumis cette semaine, le Board of Investment (BoI) avance que dans les documents des divers départements que doivent remplir les capitaines ou les agents maritimes, 80 % à 90 % des données à fournir sont identiques. « It was observed that the nearly 80-90 % of the data requested in many of these documents are fully or almost identical. » Ces données sont : informations relatives à l’identification du navire (Ship’s particulars), l’heure d’arrivée prévue, la cargaison et les détails des marchandises jugées dangereuses.

Ces documents, précise le rapport, doivent être des originaux et sous format papier. Ils doivent être remplis manuellement par les agents maritimes ou les capitaines. Le rapport concède néanmoins que, dans certains cas, quelques autorités acceptent de manière informelle des documents originaux, préalablement scannés, que leur soumettent les capitaines ou les agents maritimes.

Si près d’une soixantaine de documents sont requis, c’est parce que Maurice considère que les 7 formulaires FAL de l’International Maritime Organisation (IMO) sont insuffisants pour recueillir les informations nécessaires. « Mauritius adopted the use of the FAL forms, which however do not provide all the information required by the national authorities and are not sufficient. » Maurice n’a pas non plus adopté la version électronique de ces formulaires, comme suggéré par FAL, estimant qu’ils ne couvrent qu’une partie des autorisations requises.

En sus du fait que les 7 formulaires FAL de l’IMO doivent être remplis, certains doivent être  soumis en plusieurs exemplaires originaux. Idem pour la « Nil List », le « Stowaway », la liste des passagers et la liste des ports accostés. D’où le nombre de 57 documents à remplir et à soumettre à 7 autorités, notamment la National Coast Guard  (NCG), la Mauritius Revenue Authority (MRA), le ministère de l’Agro-industrie, celui du Shipping, la Santé, la Pêche et la Passeport & Immigration Office (PIO).

Deux heures

Actuellement, les autorités prennent deux heures pour valider les divers documents. Toutefois, il est prévu qu’une fois complétés les travaux infrastructurels entrepris par les autorités portuaires et les mesures incitatives prises, le nombre de navires devrait connaître une hausse significative. Les utilisateurs du port craignent que le temps que passent les navires à quai ou dans la limite du port n’augmente si les procédures de validation ne sont pas rationalisées et accélérées. Ce qui pourrait décourager les navires à faire appel à nos services portuaires. 

Deux propositions ont été faites dans le rapport pour contrer cet excès de bureaucratie. La première, considérée comme une solution temporaire, consiste à utiliser des formulaires numériques que les capitaines devront remplir une seule fois et devront expédier par courriel aux diverses autorités. La deuxième proposition serait l’introduction d’un National Single Window for Port & Vessel Clearance. Ce qui simplifiera et facilitera largement le processus consistant à fournir et à partager les informations nécessaires pour satisfaire les exigences réglementaires des autorités et de l’industrie maritime.


La MPA annonce une évaluation des frais

La Mauritius Ports Authority (MPA), se disant au courant de ce problème soulevé par les agents maritimes, indique en avoir discuté avec les membres du Port Users Council. « Les diverses autorités concernées en ont été informées. » Parallèlement, la MPA planche sur un exercice d’évaluation des frais portuaires pratiqués. De nombreuses requêtes ont été soumises par des agents maritimes locaux. Ils estiment ces frais portuaires « trop élevés » comparés à d’autres ports de la région. « We are currently working on a Port Tariffs Study which will provide us insights on price as well as service elements in view of an evolving bunkering market and a number of expansion and development projects taking place in the region », précise la MPA.

Le manque d’incentives aux opérateurs locaux, surtout ceux évoluant dans le domaine du bunkering, est un autre point soulevé par les agents maritimes. La MPA indique qu’elle a mis en place des mesures incitatives pour encourager les navires à se ravitailler à Port-Louis. Ces derniers bénéficient d’une remise de 50% sur les frais portuaires (Port dues), et sur les services de remorquage et de pilotage.

Afin de promouvoir Port-Louis comme un major bunkering hub, la MPA a instauré deux autres mesures incitatives qui seront valides jusqu’en août 2017. Primo, les Pipeline dues qui étaient de USD 1,15 par tonne de carburant ont été enlevés. Secundo, le tonnage brut des navires est plafonné à 35 000 tonnes au lieu de 100 000 tonnes pour le calcul des frais.


Afzal Delbar : «Un changement de mentalité est primordial»

« Le problème de lourdeur administrative dans le port se résoudra uniquement à travers un changement de mentalité de la part des autorités. » C’est ce qu’indique Afzal Delbar, président du conseil d’administration du Port Users Council. Il concède que cet excès de bureaucratie engendre un problème dont se plaignent souvent les capitaines des navires. « Cela constituerait un facteur dissuasif qui rendrait notre port moins compétitif », assure-t-il.

Le président du board du Port Users Council déplore également que malgré les investissements énormes consentis par certaines autorités pour la numérisation de leur service, certaines insisteraient quand même pour « gagn sa papie la ! ».  Pour Afzal Delbar, ce serait l’une des raisons pour lesquelles les capitaines ne souhaitent plus se ravitailler ou faire appel à d’autres services à Port-Louis, tels que le changement d’équipage ou le bunkering. Ils se contentent de décharger leur cargaison et de partir juste après. « Ils préfèrent aller à La Réunion ou à Madagascar, où les procédures sont moins lourdes. C’est donc un manque à gagner conséquent pour l’économie mauricienne, car de nombreux side businesses pourraient en profiter », affirme notre interlocuteur. Citant l’exemple de la MRA, Afzal Delbar indique que cette autorité est parvenue à éliminer 75 % des procédures avec l’adoption d’un logiciel.

« Encore faut-il que les autres autorités lui emboîtent le pas », dit-il. Pour Afzal Delbar, il n’y a pas 36 solutions : il faut avant tout un changement de mentalité de la part de certaines autorités. « Le gouvernement investit des milliards de roupies pour développer le port, ce qui est très bien. Toutefois, cela doit être couplé à un changement de mentalité pour que la venue des navires à Port-Louis ne soit pas un fardeau pour les capitaines », dit-il.

 

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