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Jean Michel Lee Shim : «Les accusations de connivence avec les autorités sont gratuites»

Jean Michel Lee Shim se dit convaincu que People’s Turf PLC, dont il est l’un des principaux membres, pourra organiser seule les 36 journées de courses hippiques de la saison 2023. Il était, avec Anil Kumar Ramnarain, membre fondateur et ex-administrateur du MTC, les invités de l’émission Au Cœur de l’Info sur Radio Plus, vendredi, sur le plateau de Nawaz Noorbux et de Jugdish Joypaul. 

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Nawaz Noorbux (NN) :
Est-ce la fin des courses hippiques à Maurice ?

Jean Michel Lee Shim (JMLS) : Les courses hippiques étaient sur une ‘downward trend’ depuis ces 25 dernières années déjà. C’est d’ailleurs pourquoi le Mauritius Turf Club (MTC) avait sollicité PricewaterhouseCoopers (PWC), dans le passé, pour un rapport qui avait fait état des mesures à adopter, calquées sur le modèle hongkongais. C’est dommage que ce rapport ait été mis au fond d’un tiroir. 
Plus récemment, en 2017, face à un déclin dans les revenus, la Gambling Regulatory Authority (GRA) avait demandé à la firme BDO de faire une étude, laquelle avait soumis un ‘roadmap’ à suivre pour les années 2018, 2019  et 2020. Mais la baisse des revenus était trop drastique. Les ‘betting revenues’ étaient en baisse. Et aussi, il y a eu l’avènement des paris pour les matchs de foot, le loto, etc. Sans compter les paris illégaux. 

Anil Kumar Ramnarain (AKR) : C’est en parti vrai que les courses étaient sur un ‘downward trend’. Mais la MTC a commencé a rencontré réellement des problèmes à partir de 2015/2016. C’était un acte prémédité et un complot politique par le gouvernement pour se débarrasser du MTC. Parmi les actions prises par le gouvernement, il y a l’élimination du ‘bookmaker off-course’. Les parieurs se sont alors tournés vers SMS Pariaz, au détriment du MTC. C’est là que les revenus ont commencé à tomber. Il y a aussi une hausse de la Betting Tax. Forcément, les gens parient moins. Ensuite, il y a eu la COVID-19. Alors que les casinos et les boîtes de nuit rouvraient leurs portes, les courses au Champ de Mars se faisaient toujours « in camera ». 

JMLS: Les changements apportés par les autorités, tels qu’évoquait par Anil Kumar Ramnarain est, en fait, en ligne avec ce que le rapport Parry avait préconisé. Les changements ont été fait petit à petit jusqu’à la création de la Horse Racing Division. Ce n’est donc pas vrai de dire que tout ça a été fait pour éliminer le MTC.

Pourquoi pensez-vous que le gouvernement a voulu « kas lerin » MTC ?

AKR : C’est clair qu’ils voulaient favoriser Jean Michel Lee Shim et lui donner le monopole [dans l’organisation des courses hippiques]. Sans compter qu’ils ont aussi voulu donner une connotation communale à cette affaire. 

Est-ce vrai qu’il y a connivence entre PTP et les autorités ?

JMLS : (rires) Il s’agit d’accusations gratuites, non fondées. 

N’êtes-vous pas inquiet par le manque d’enthousiasme dans la population maintenant que seule la PTP va organiser les courses ?

JMLS : Lorsque PTP organise les courses, il y a au contraire plus de foule [que lorsque la MTC organise]. Les gens viennent en famille, les parents, les enfants. Pour la dernière course, nous avions réuni entre 6 000 et 7 000 personnes. 

Les ‘fees’ réclamés au MTC pour l’entretien de la piste du Champ de Mars sont jugés exorbitants…

JMLS : En décembre, la piste était dans un état pitoyable et il fallait démarrer rapidement les travaux pour la restaurer. Seule la PTP détenait une licence à ce moment-là. Des dépenses ont été faites et nous avons fait parvenir un Cost-Sharing-Agreement au MTC. Si le MTC n’était pas d’accord avec certains montants réclamés, ils auraient dû nous en parler et non pas se tourner vers les médias. C’est pourquoi il y avait un ‘Non Disclosure Agreement’ rattaché à cela. La PTP aurait mis en avant tous ses chiffres pour justifier sa demande. 

AKR : La piste s’est dégradée en décembre car c’est la COIREC qui s’en occupait. C’est n’est ni la faute du MTC ni de la PTP. Au sujet du Non Disclosure Agreement, ce n’est pas possible que ces négociations se fassent entre deux personnes seulement et que les membres ne soient pas au courant. C’est louche. C’est pourquoi la présidente du MTC n’a pas voulu signer cet accord. Sans compter que le coût exigé par la PTP était vraiment exorbitant. 

Qu’est-il arrivé à cette affaire de sabotage de la piste ?

AKR : Très bonne question. À ce jour, nous n’en savons rien alors qu’a priori, les personnes concernées avaient été identifiées. 

Comment est la piste à la veille du coup d’envoi de la saison hippique ?

JMLS : La présidente de la MTC a félicité monsieur Maurel, agronome (pour l’état de la piste), je pense que ça veut tout dire. 

Quand pensez-vous pouvoir évoluer à Côte d’Or ?

JMLS : Je pense que ça devrait être prêt d’ici deux ans. Le Champ de Mars sera alors être chose du passé. C’est le projet du gouvernement, soulignons-le. Moi je songeais à y faire un centre équestre, comme celui de Balaclava. 

Le centre de Petit-Gamin reste un centre d’entraînement seulement ?

JMLS : Avec les récents développements, je ne vous cache pas qu’à partir de la fin du mois de mars, nous avons l’intention de commencer à y planter de l’herbe. Nous ne sommes pas à l’abri de voir des clous, un autre acte de sabotage [sur la piste du Champ de Mars] ou voir surgir une injonction. Il faut à tout prix un plan B. Pe degaze plante-la. 

Pensez-vous pouvoir organiser une saison hippique seul ?

JMLS : Oui, nous sommes en mesure de le faire. Cela dit, ce n’est pas une bonne chose. Get MTC, inn organiz lekours tousel pandan 210 an, zordi kot li ete ? C’est toujours mieux d’être en compétition. 

AKR : Si les autorités ne voulaient pas la mort du MTC, elles auraient pu laisser la PTP aménager son hippodrome et laisser le MTC opérer tranquillement. Chacun aurait alors pu avoir 40 journées de courses. Mais c’est clair que tout a été fait pour nous écarter en imposant des conditions que nous ne pouvions accepter. Et lorsqu’on accepte finalement, sur avis légaux, les autorités refusent d’accepter l’argent dont nous devions nous acquitter pour obtenir notre licence. Il y a eu des ‘delaying tactics’ jusqu’à ce qu’ils parviennent à mettre sur pied la COIREC et reprendre le Champ de Mars.

JMLS : Jamais le Champ de Mars n’a été arraché intentionnellement au MTC. Ce dernier détenait un bail pour organiser les courses. Lorsque PTP est arrivée, il a fallu alors le partager. C’est là que le bail a été résilié. De la a dir ki monn rass dipin dan ou labouss, li pa koumsa (…) Si ou ti pei ou lisans Horse Racing Organizer a tan , pa ti pou kapav retir Champ de Mars ek ou. 

Il semble que le stakesmoney a baissé drastiquement, alors que les coûts d’opération ont augmenté…

AKR : Au niveau de la MTCSL, ce n’est que l’année dernière seulement que le stakesmoney ca été revu à la baisse, car nous n’avions pas le choix. D’une part, il y a eu un boycott de certaines écuries et nous avions eu seulement une vingtaine de journées de course. Il avait alors été constaté qu’on n’avait d’autre choix que de diminuer cet argent. 

JMLS : Je sais que le stakesmoney a diminué de 50 % (au niveau de PTP)

Mais comment vont-elles opérer les écuries ?

JMLS : J’ai expliqué comment le stakesmoney est passé des Rs 300 M en 2018 à Rs 140 M en 2022. You must cut your coat according to your cloth. La PTP ne veut pas venir dire aux employés, en 2024, que la part belle a été faite aux propriétaires de chevaux en 2023, mais qu’aujourd’hui, les caisses sont vides. Nous devons travailler à partir d’un « worst case scenario ». Les dépenses pour la police, la MBC et la COIREC reviennent à Rs 1 M par journée, ce qui fait Rs 36 M pour 36 journées. Les services d’employés additionnels pour les semaines de course coûtent Rs  1 M par journée, ce qui vous fait à nouveau Rs 36 M. Ajoutez Rs 14 M pour la piste (pour une année), cela revient à Rs 86 M. Nos coûts fixes sont de l’ordre de Rs 30 M . Nous sommes à Rs 116 M déjà. Si les stakesmoney reste à Rs 140 M , combien vous reste-t-il ? Ou pa kapav donn plis ki seki ou ena ! 

Comment expliquez-vous la fermeture de l’écurie Gujadhur après 118 ans?

AKR : C’est une grande honte. Il a expliqué comment il a voulu sauver le MTC, mais qu’il a été déçu par la suite. Il pensait que le Premier ministre allait intervenir pour empêcher cette catastrophe. Il a dit qu’il ne pouvait s’associer à la mafia des courses. 

JMLS : M. Gujadhur doit être constant dans ce qu’il croit. Il parlait de « mafia » dans le passé déjà. L’intégrité des courses réside dans la Horse Racing Division (HRD). Et depuis une dizaine d’années au moins, M. Gujadhur exprime son souhait de raccrocher, ne voyant pas la relève. Sa inn koinsid avec PTP. 

Vous êtes un membre très influent du PTP, l’unique organisateur des courses. Vous êtes aussi dans le betting, vous êtes propriétaire de chevaux… Il ne vous manque plus qu’à devenir jockey ? Est-ce normal qu’une compagnie organisatrice de courses importe des chevaux ?

JMLS : Prenons l’exemple du MTC qui préparait lui-même ses fixtures, délivrait les permis et décidait du handicap des chevaux. Quand il y avait des sanctions, c’était toujours le MTC qui écoutait l’appel. 

AKR : Je suis d’accord que l’appel ne pouvait et n’aurait pas dû tomber sous le MTC, mais le MTC n’était pas dans le betting. Contrairement à vous qui avez le Tote, sans parler de l’importation des chevaux. Sous le MTC, vous ne pouviez être propriétaire de chevaux et, en même temps, être commissaire. Je ne sais pas si la HRD a amendé en catimini les règlements pour permettre cela !

Vous avez dit un moment que Mme Julienne avait félicité le PTP pour l’entretien de la piste. Je viens de recevoir un message de Mme Julienne qui affirme le contraire… 

JMLS : Je présente mes excuses à Mme Julienne. Je crois que j’avais lu ça quelque part.

AKR : Un entraîneur nous a fait comprendre que c’est Jean Michel Lee Shim qui donnait les instructions et qui décidait quel jockey qui allait piloter quel cheval… 

JMLS : Ce n’est pas vrai ! 

NN :
Parlons de l’importation massive des chevaux… D’où vient cet argent ?

JMLS : Ça passe par la banque. Il faut aussi passer par la MRA. Tout est transparent et contrôlé.

Jugdish Joypaul (JJ) :
Ça coûte beaucoup d’argent ? 

JMLS : Bien sûr. Mais nous ne prenons pas des chevaux qui coûte cher.

NN :
Combien avez-vous investi ?

JMLS :  Environ Rs 200 M à Rs 300 M !

Vous attendez-vous à la grande foule au Champ de Mars pour la première journée ce samedi ? 

JMLS : Non, pas à la grande foule en raison de la météo qui va, semble-t-il, jouer au trouble-fête.

Laissez-moi me tourner vers M. Ramnarain. Au niveau du MTC, vous aviez le monopole de l’organisation des courses. Qu’est-ce qui a été fait pour moderniser les courses ?

AKR : Je suis d’accord qu’on aurait pu faire plus. Mais nous avons fait selon nos moyens. Nous aurions dû nous concentrer davantage sur nos réserves.

NN :
Jack Bizlall a parlé d’un trou de Rs 144 M… 

AKR : Nous avons comblé ce trou. Cela datait de 10-12 ans.

On parle aussi souvent de clans au MTC et que certains touchaient de gros salaires comparé aux autres employés, comme les palefreniers qui, malgré quelque 20 ans de service, touchaient Rs 13 000 par mois…

AKR :
Pas que Rs 13 000 ! Il y avait aussi d’autres entrées d’argent pour eux dépendant des journées de courses qui ramenaient leurs salaires jusqu’à Rs 18 000 voire Rs 20 000. Mais concernant les gros salaires, je me souviens d’un employé étranger qui en touchait, mais pas les Mauriciens.

Qu’adviendra-t-il maintenant des employés ?

AKR : Ils auront leur dû.

M. Lee Shim, est-ce que la PTP recrutera une partie de ces quelque 200 employés ?

JMLS : Nous sommes prêts à les recruter ! Surtout ceux qui travaillent sur la piste. Ils sont 60 je pense. Mais aussi les palefreniers. Nous les attendons afin de recommencer à recruter. C’est un drame humain. Mais ils attendent de négocier avec le MTC avant de s’engager. Nous les attendons.

On nous dit que l’ambiance au Champ de Mars n’est plus comme avant. Vous érigez des structures métalliques, le terrain de football n’existe plus. Qu’avez-vous à répondre?

JMLS : Ce sont des exagérations ! Nous savons dans quel camp sont ceux qui disent cela. Oui, nous érigeons des structures métalliques. Le terrain de foot était inoccupé et les gens pouvaient facilement se blesser. Nous réhabilitons un terrain pour ceux qui voudront jouer en toute sécurité. Nous embellissons le Champ de Mars. Pour mettre de l’ordre, il faut du désordre. 

Pourquoi avez-vous attendu la dernière minute pour revoir à la baisse le stakesmoney ?

JMLS : C’est la PTP qui a pris cette décision.

Dans votre dernière interview sur Radio Plus, vous nous avez dit que vous aviez financé le MSM en 2019 ? 

JMLS : Nous sommes ici pour parler de courses et pas de politique !

Justement, c’est lié… Vous vous rappelez du montant ?

JMLS : Je vous avais dit environ Rs 10 M.

Vous allez encore financer le MSM aux prochaines élections ?  

JMLS : Nous saurons après le Nomination Day. Si vous voulez parler de politique, nous pouvons faire une autre émission demain.

Mais la perception est que c’est un complot politique. Donner le monopole à la PTP pour ensuite avoir du financement pour les élections… 

JMLS : En 2010, je n’étais pas avec Ramgoolam ?

Il ne vous avait pas donné le Champ de Mars…

JMLS : Je ne parlerai que de courses. C’est impossible de faire de l’argent avec les courses.

NN :
Impossible ? Pourquoi êtes-vous dans l’industrie hippique en tant que businessman ?

JJ :
Vous acceptez donc de perdre de l’argent ?

JMLS : Je suis un passionné des courses. Même les propriétaires ne gagnent pas en course. On le fait pour l’amour du cheval. Le plaisir d’aller en piste pour accueillir une cheval gagnant sous les applaudissements du public. 

NN :
Vous me dites que vous n’êtes pas dans le giron hippique pour l’argent ?

JMLS : J’aime simplement quand mes chevaux gagnent. 

Vous savez à l’avance qui va gagner ?

JMLS : Mais non !

AKR : Comment expliquez-vous que le prix de certains chevaux passe de Rs 2 000 à Rs 500 avant de gagner ?

JMLS : Ça a toujours été le cas. Il y a des chevaux qui sont passés de Rs 4 000 à Rs 250 qui ont gagné.   

NN : N’avez-vous pas peur d’un changement de régime ? Allez-vous financer l’autre parti également ?

JMLS : Vous devez avoir de la conviction. On ne peut financer deux partis politiques, c’est sans valeur à mes yeux. 

Vous allez financer seulement le MSM ?

JMLS : Je n’ai pas dit ça ! Il faudra attendre le Nomination Day, voir le programme et suivre le plus convaincant.

JJ :
Vous souhaitez un retour du MTC pour plus de compétition ?

JMLS : Nous voulons d’un concurrent qui aura un Business Model. Si le MTC revient avec le même style, il sera encore une fois voué à l’échec.

 

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