Dans son rapport déposé mardi au Parlement, le Directeur du Bureau de l’audit indique que le Haut-Commissaire de Maurice au Mozambique a logé pendant 11 mois dans un hôtel. Ce dernier a refusé plusieurs propositions de résidences avant d’accepter une maison bien plus chère que celle de son prédécesseur. Jean-François Chaumière, le Haut-Commissaire en question, donne son point de vue sur le sujet.
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Le Directeur de l’audit note que vous avez habité, en tant que Haut-Commissaire de Maurice au Mozambique, pendant 11 mois, c’est-à-dire du 14 juin 2022 à fin mai 2023, dans un hôtel et que vous avez accepté de déménager que lorsque vous avez été satisfait de la résidence que l’on vous a allouée. Quel est votre point de vue sur cette affaire ?
Soulignons d’abord que cette partie du rapport du directeur de l’Audit est basée sur les informations qui lui sont fournies par les officiers de l’administration du ministère des Affaires étrangères. Après le décès de mon prédécesseur, feu Jean Pierre Jhumun, en juillet 2021, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, m’a proposé de prendre le poste de Haut-Commissaire de Maurice au Mozambique. J’ai accepté volontiers malgré certaines contraintes familiales. À mon arrivée au Mozambique en juin 2022, l’ancien second secrétaire m’avait suggéré un hôtel basique, le temps de trouver une maison adéquate pour une résidence officielle. Les maisons préalablement sélectionnées étaient soit vieilles, mal entretenues ou non meublées. Or, un des critères du ministère était que la maison devait être totalement meublée.
La situation s’était dégradée avec l’ancien second secrétaire pour plusieurs raisons, notamment parce qu'il m'avait fait comprendre que c’était lui le chef de la mission, que ma présence était purement honorifique et que c’était lui qui dirigeait l’ambassade. Entretemps, ma famille m’ayant rejoint en août 2022, il fallait trouver une alternative pour se loger. C’est alors que le personnel mozambicain de la chancellerie a cherché un hôtel le moins cher possible avec deux chambres pour ma femme, ma fille et moi. Et malgré la situation ambiante, avec l’aide du personnel de la Haute-Commission, on a continué à prospecter les agences immobilières, et même la visite du Secrétaire permanent du ministère à Maputo en décembre 2023 n’y a rien changé. Ce n’est que lorsque le nouveau second secrétaire est arrivé fin avril 2023 que la situation a été débloquée. On a pu enfin se loger dans une vraie maison. En passant, le contrat de location pour la résidence officielle a été signé en mai 2023, suite à l’accord du ministère, et non en mars 2023 comme écrit dans le rapport de l’Audit. On y a aménagé au mois de juin 2023.
Le rapport de l’audit précise aussi que la mission diplomatique de Maurice à Maputo a demandé plusieurs cotations et que les soumissionnaires ont proposé des résidences avec des loyers allant de US$ 3 480 et US$ 5 000. Or, vous auriez signifié votre mécontentement sous prétexte de problèmes de sécurité malgré, souligne l’audit, que « les offres incluaient des logements dans des régions occupées par de précédents Hauts-Commissaires ». Pouvez-vous nous expliquer ?
Maputo est considéré dans le jargon du service diplomatique comme un « hard- posting » du fait de l’insécurité chronique, des maladies endémiques, telle que la malaria ou le choléra, et des actes de violence sporadique. Il est à noter qu'un ancien ambassadeur de Maurice a été attaqué dans cette région, tandis que la résidence de mon prédécesseur immédiat, située à 8 km de l'ambassade, a été victime de cambriolages à deux reprises. La question de sécurité est donc primordiale au Mozambique et ne peut servir de prétexte à quoi que ce soit. Deuxièmement, le logement à Maputo est extrêmement cher et même plus cher qu’à Cape Town, par exemple, du fait de la spéculation foncière et de la forte demande due au grand nombre d’expatriés y vivant.
Le directeur de l’audit souligne également qu’il n’y avait pas de « breakdown of expenses incurred » pour le remboursement de Rs 2,5 millions pour votre passage à l’hôtel. Ceci laisse la porte ouverte à des soupçons.
Des soupçons de quoi ? À plusieurs reprises, et déjà à partir de septembre 2022, j’avais envoyé des correspondances au ministère des Affaires étrangères pour leur faire comprendre que, non seulement ce séjour prolongé dans un hôtel me causait du tort à moi et à ma famille, mais que cette promiscuité devenait intenable pour mon épouse, devant rester une journée dans une chambre d’hôtel. Vous savez, je ne souhaite à personne d’être obligé de résider dans un hôtel avec sa famille sur une aussi longue période. Nos seuls effets personnels se trouvaient dans nos valises et le reste dans des cartons à l’ambassade. De plus, il faut savoir qu’à chaque fin de mois, je devais payer la chambre d’hôtel de ma poche avant de me faire rembourser par le ministère le mois suivant, ce qui était difficile pour mes finances. En regardant maintenant le montant mensuel que je dépensais à l'hôtel, je réalise qu'il est pratiquement équivalent au loyer d'une maison décente.
Le directeur de l’audit note aussi qu’au final, c’est US$ 7 000 au lieu de US$ 5 000 « received in the quoted bill » qui seront déboursés. Pouvez-vous nous éclairer à ce sujet ?
En l’absence de détails dans le rapport, je ne sais pas de quelle maison il s’agit. La résidence officielle est une maison meublée complète pour correspondre aux critères du ministère. Ce choix s’est fait en tenant compte que c’est dans l’enclave diplomatique, dans un environnement protégé et sécurisé avec pour voisins d’autres ambassadeurs. Outre d’être ma maison, c’est aussi la résidence officielle où nous sommes souvent appelés à y recevoir des invités, dont nos propres collègues et des ministres du pays hôte, ainsi que mes propres compatriotes, par exemple, pour la fête de l’Indépendance et le Nouvel An.
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