Société

Incident lors de la Marche des Fiertés: la communauté LGBT face aux mentalités

Pour la 11e année, les membres de la communauté LGBT ont participé, samedi, à la Marche des Fiertés, organisée par le Collectif Arc-en-Ciel. Or, l’évènement ne s’est pas déroulé comme prévu. Il y a eu une contre-manifestation avec des personnes bandissant des pancartes anti-LGBT. Faisons le point sur les mentalités qui semblent avoir la peau dure… Il est vrai qu’à Maurice, l’homosexualité n’est pas interdite et condamnée par la peine de mort, comme c’est le cas en Arabie saoudite, aux Émirats arabes unis, en Iran ou au Soudan. Cependant, l’homophobie reste bel et bien présente dans notre société. Certains citoyens expriment leur mécontentement sous le couvert de l’anonymat. D’autres le font à visage découvert. Samedi 4 juin, lors de la Marche des Fiertés organisée par le Collectif Arc-en-Ciel (CAEC), la situation a failli dégénérer lorsque des personnes sont intervenues avec des pancartes sur lesquelles on pouvait lire : « LGBT produit démon-crazy » ou encore « LGBT non jamais ». Même si l’attention était plus braquée sur ces personnes, qui distribuaient aussi des pamphlets, les marcheurs ont choisi de poursuivre leur chemin. Les organisateurs expliquent que c’est la première fois que la marche est organisée à Port-Louis et que depuis ces dernières années, ils s’attendent à ce genre de démonstration. Cependant, ils avancent que « la liberté d’expression, doit primer dans un État démocratique ansi que le respect l’opinion de tous ». Ils réclament, toutefois, la protection des autorités.

« Malpropreté, démon, peuple maudit… lapidation »

Après l’incident de samedi, les commentaires sur les réseaux sociaux n’ont pas tardé à fuser. On y lisait davantage de commentaires homophobes que de messages de soutien envers la communauté LGBT. « Malpropreté » ; « démon » ; « peuple maudit »… Autant de termes utilisés pour qualifier les membres du mouvement. Certains internautes vont jusqu’à réclamer leur « lapidation ».  
 

Un abri temporaire pour ceux rejetés par leurs familles

L’initiative revient à Young Queer Alliance. En effet, l’association a mis sur pied un abri temporaire, qui est opérationnel depuis mai, dédié aux jeunes faisant face au rejet familial. « Il existe beaucoup d’incompréhension. Les jeunes sont souvent victimes de bullying ou de rejet de la part des membres de leurs familles. »  
 

Témoignage  d’une pangenre - Caro: « L’amour avant tout »

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"18615","attributes":{"class":"media-image alignleft wp-image-31794","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"200","height":"521","alt":"Caroline"}}]]Caroline, surnommée Caro, s’habille comme un homme. Elle a une voix de fille. Elle n’est ni gay, ni lesbienne, et encore moins transgenre. En fait, elle est pangenre. Un terme que vous ignorez sans doute. Caroline explique qu’elle peut sortir avec un garçon, une fille ou un transgenre. Pour elle, le sexe de la personne ne compte pas ; ce qui prime avant tout, ce sont les sentiments qu’elle éprouve pour cette personne. « L’amour avant tout, le feeling. Si je me sens bien avec une personne, je ne m’arrête pas à son identité sexuelle. Je suis une personne épanouie et je m’assume, c’est l’essentiel. Les gens peuvent dire ce qu’ils veulent. » [row custom_class=""][/row]  
 

« Ma mère, mon soutien »

[[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"18614","attributes":{"class":"media-image alignleft wp-image-31793","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"300","height":"360","alt":"Nygel Evenor-Deklerck"}}]]Ces propos, indique Nygel Evenor-Deklerck, il les a entendus à plusieurs reprises et ce, depuis de très longues années : « Je me suis rendu compte que j’étais attiré par les garçons depuis l’adolescence. J’ai vécu caché durant des années. Je suis sorti avec des filles, surtout pour ne pas attirer l’attention de mes proches. Je ne voulais pas continuer à jouer à cache-cache avec les sentiments des autres et leur faire du mal. J’ai fait mon coming-out à 18 ans. Je n’oublierai jamais les paroles que ma mère a prononcées ce jour-là. Elle a dit : ‘Tu es et resteras toujours mon fils’. Je l’adore ma mère. C’est mon soutien, mon tout. Je la remercie pour cela. » S’il a eu le courage de s’assumer, d’autres, en revanche, vivent toujours cachés, dans la peur et l’angoisse. Il espère qu’un jour ceux-là  pourront jouir pleinement de leurs droits. « Pas de droits spéciaux, mais les mêmes droits que tout être humain ou citoyen de la République de Maurice.  » [row custom_class=""][/row]  
 

Pauline Verner, coordonnatrice du Collectif Arc-en-Ciel: « L’homophobie est culturelle »

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/div> Nous sommes en 2016. Quel est votre constat de la situation de la communauté LGBT à Maurice ? Nous constatons surtout que les droits humains ne sont pas respectés pour toutes les personnes à Maurice, notamment celles de la communauté LGBT. C’est ce qu’on voit surtout au niveau de l’emploi et des services publics. Les gens se fient toujours aux apparences pour juger les autres. Selon une étude du CAEC en 2015, 45 % des transgenres sont au chômage. Cela pose un problème aux recruteurs d’employer les transgenres. Avec la mise sur pied de l’Equal Opportunities Commission, on pensait que les choses évolueraient. Hélas, de nombreuses personnes ne veulent pas déposer si elles ne peuvent le faire anonymement. Nous ne pouvons pas non plus déposer en tant que partie civile pour elles. Beaucoup de membres de la communauté LGBT ont peur, ayant subi diverses insultes et actes d’intimidation. Les menaces au sein de la famille sont les plus fréquentes. En 2016, il est triste de constater qu’il n’y a aucune protection contre les actes homophobes. Aucune loi ne viendra sanctionner de tels actes qui auraient pu décourager de telles attitudes. L’homophobie reste-t-elle présente dans la société mauricienne ? Il existe plusieurs types d’homophobies. Il y a d’abord l’homophobie qui résulte de la méconnaissance. Certaines personnes disent des choses sans savoir de quoi elles parlent. En général, elles ne sont pas méchantes et ne vont pas jusqu’à se montrer violentes. Le plus gros problème à Maurice, c’est que l’homophobie est culturelle. Si un couple ne se conforme pas à la règle traditionnelle « mariage-enfant », il est considéré comme « anormal ». Souvent, on a tendance à tout rapporter à la religion. Puis, il y a l’homophobie cachée qui se pointe à des moments précis. Ces personnes, très connues du public et qui ont de nombreux amis sur les réseaux sociaux, distillent des messages de haine et des menaces concrètes. On sent une légère amélioration, mais nous ne sommes pas à l’abri. Nous avons souvent reçu des menaces de mort. Que faut-il faire pour que les mentalités évoluent ? Il faut poursuivre le travail de sensibilisation à grande échelle. Il doit être adapté à divers publics, notamment les parents. Il faut une approche différente. Souvent, ces personnes se sentent coupables. Elles pensent que leurs enfants ont une orientation sexuelle différente à cause d’une lacune à leur niveau, à propos de leur méthode d’éducation. Quant aux autorités, nous continuons à envoyer notre plaidoyer aux décideurs politiques. Il importe qu’ils réagissent avant qu’il y ait un jour une agression grave.  
 

Les revendications du Collectif Arc-en-Ciel

[row custom_class=""][/row] • Abrogation de l’article 250 du Code pénal de 1838 Le droit au respect de la vie privée est bafoué par l’existence de cette loi anti-sodomie, adoptée en 1838, qui s’applique au cadre privé, dans le cadre d’une relation entre adultes consentants. Depuis 2011, les lois sur la sodomie ont été abrogées en Europe, et dans plusieurs États d’Amérique du Nord et d’Amérique du Sud. Il est urgent que Maurice réagisse et participe à une évolution légale et sociétale. L’existence de cette loi place Maurice dans la liste des 56 pays homophobes. [[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"18618","attributes":{"class":"media-image aligncenter size-full wp-image-31798","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"1280","height":"720","alt":"Collectif Arc-en-Ciel"}}]] • Protection légale contre les violences et insultes homophobes et transphobes, (ou modification de l’article 282 du Code pénal) L’homophobie peut avoir des conséquences dramatiques : violences verbales ou physiques, intimidation, harcèlement et discrimination. À ce jour, le Code pénal ne prévoit rien pour protéger les individus subissant ces violences en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre. L’article 282 du Code pénal sur « l’incitation à la haine raciale » est basée sur la race, la caste, le lieu d’origine, l’opinion politique, la couleur de peau ou la croyance religieuse. Il n’englobe aucunement l’orientation sexuelle, le genre et d’autres statuts tels que ceux cités dans l’Equal Opportunities Act. Sans pouvoir prouver la volonté de l’auteur de l’agression (verbale ou physique) de troubler l’ordre public, cette loi ne peut être appliquée. Il est  impératif qu’elle soit modifiée pour que l’orientation sexuelle et l’identité de genre et la volonté de troubler l’ordre public ne soit qu’un facteur d’aggravation supplémentaire au crime de haine. Notons que douze États membres de l’Union européenne (UE) punissent les discours d’incitation à la haine, à la discrimination ou à l’hostilité à l’égard d’une personne en raison d’un préjugé fondé sur une caractéristique donnée, comme son orientation sexuelle ou son identité de genre. Dix états membres de l’UE pénalisent les crimes à caractère haineux, désignant toute agression verbale ou physique motivée par un préjugé à l’égard d’une personne, fondée sur une caractéristique donnée ou supposée, telle que son orientation sexuelle ou son identité de genre. Les auteurs de ces crimes sont plus sévèrement punis par des facteurs aggravants tels que l’homophobie ou la transphobie. [[{"type":"media","view_mode":"media_large","fid":"18617","attributes":{"class":"media-image aligncenter size-full wp-image-31797","typeof":"foaf:Image","style":"","width":"1280","height":"720","alt":"Collectif Arc-en-Ciel"}}]] [row custom_class=""][/row]  
 

Top 8 des pays les plus gay-friendly

Le site PlanetRomeo a lancé une étude sur le Gay Happiness Index des pays. Le classement est le suivant :
  1. Islande: C’est le premier pays à avoir élu, en 2009, un dirigeant ouvertement homosexuel, la sociale-démocrate Johanna Sigurdadottir.
  2. Norvège: En matière de droits LGBT, la Norvège se place en très bonne position. Le mariage civil et l’adoption y sont autorisés depuis 2009. L’Église autorise également les pasteurs homosexuels.
  3. Danemark: Les rapports entre personnes du même sexe ont été légalisés en 1933. Sachez qu’en France, l’homosexualité ne figure plus dans la liste des maladies mentales depuis 1981.
  4. Suède: La Suède autorise le mariage religieux (luthérien) entre personnes du même sexe depuis 2009. Ce qui ne la fait pas remonter dans le classement.
  5. Uruguay: L’Uruguay est le pays le plus sympathique d’Amérique du Sud envers la communauté LGBT. Les rapports sexuels homosexuels sont légaux. On n’a pas le droit de les discriminer. Ils ont le droit d’entrer dans l’armée, de se marier et d’adopter.
  6. Canada: Sachez que le Canada marie volontiers les ressortissants étrangers du même sexe. Une loi dont ont profité de très nombreux citoyens américains qui voulaient se dire oui pour la vie.
  7. Israël: Tel-Aviv est l’une des plus importantes capitales LGBT du monde. L’État hébreu accorde la nationalité aux conjoints non-juifs d’homos juifs israéliens.
  8. Pays-Bas: Le premier pays à légaliser le mariage homosexuel (en 2001). Malheureusement, c’est le pays où l’on recense de plus en plus d’actes homophobes.
Quant à la République de Maurice, elle figure à la 76e place du classement, juste avant la Malaisie.
 

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